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L’Église catholique condamne-t-elle la masturbation et pourquoi ?

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75 commentaires

  1. Michaël 2

    Masturbation (suite)
    Bonjour Cat, j’ai essayé de retrouver rapidement cette étude sur le net mais ca fait déjà pas mal d’années et je ne retrouve plus le site. Il faudra que je fasse une recherche plus approfondie dès que je trouve un peu plus de temps.
    Ceci dit, cette étude n’a pas non plus une très grande importance dans la mesure il est évident que la masturbation fait partie de la vie sexuelle de l’homme (que le premier homme qui lit ses lignes et qui ne s’est jamais masturbé et ne se masturbe jamais nous explique comme il fait) et les gens d’Eglise sont aussi des hommes (je ne parle en effet que des hommes vu que j’en suis un et donc comme tout homme (de maintenant 60 ans) je connais intimement cette réalité physiologique qui a ses exigences que la morale ne peut en aucun cas “dompter”. Il y a de toute façon d’autres études de sexologie qui vont dans le même sens, la masturbation fait partie de la vie sexuelle de tout homme, avec des variantes selon les âges et les besoins. Et en général elles concluent pas le fait que “c’est bon pour la santé” voyez comme on est loin de la doctrine! Tous les hommes ne sont pas égaux et certains ont des besoins sexuels plus importants que d’autres, de même que la sexualité n’est pas la même à 15 ans qu’à 60 ans… Donc, pas besoin d’étude pour savoir si les hommes se masturbent ou non. Ils le font tous, mais à un degré différent. Et il est vrai aussi que les hommes mariés y recourent tout autant si non plus que les autres. La sexualité c’est aussi comme un muscle et plus on l’exerce plus il a besoin d’être exercé. De même que tout dépend du contexte dans lequel on vit. Si on vit dans un monde très sexué avec beaucoup de stimulis alors le désir sexuel vit avec plus de force. Et puis aussi tout dépend de l’évolution spirituelle de la personne. Plus elle orientée vers les choses de l’esprit plus l’attrait sexuel diminue. Mais cependant ne disparait pas totalement vu qu’un homme produit journellement des milliards de spermatozoïdes et qu’il faut bien à un moment qu’ils s’évacuent, soit manuellement, soit naturellement par un écoulement séminal nocturne le plus souvent. C’est donc un besoin physiologique et ils suffit de regarder un chien par exemple pour voir qu’à un certain moment, s’il ne trouve pas de partenaire, il se soulage lui-même. Vous allez me dire que nous ne sommes pas des animaux, eh bien si, nous sommes aussi des animaux, des mammifères programmés pour la reproduction. C’est d’ailleurs assez pénible ces pulsions sexuelles vu qu’il est rare de pouvoir les assumer sereinement. Avoir une vie sexuelle équilibrée (et qui est, j’en conviens, bien préférable à la masturbation) est rarement atteinte et si oui dure rarement dans le temps. D’ou les mésententes et les divorces quant la relation n’est basée que sur le désir sexuel. Pour ce qui concerne la vie dans l’Eglise, il faut vraiment refuser de voir la réalité en face pour croire qu’ ‘un jeune homme qui entre dans la vie religieuse n’ait plus aucun besoin sexuel et puisse avoir uniquement recours à la “sublimation”. Cette dernière existe et est partie prenante de la vie spirituelle, dans de nombreuses tradition religieuses d’ailleurs, mais elle n’est effective qu’à un certaine niveau d’élévation spirituelle qui lui-même n’est pas stable. D’ou le fameux “qui veut faire l’ange fait la bête” de Pascal. Il n’en demeure pas moins que la maîtrise de l’énergie sexuelle et la question fondamentale du rapport à l’autre sont également une réalité. Mais il n’est pas possible d’édicter des règles qui vont à l’encontre de la nature humaine au point de provoquer des refoulement très dommageables. La sexualité est un mystère très profond qu’on ne peut circonscrire à coup de morale. Et aller se confesser pour un “péché de masturbation” est sur le fond catastrophique parce que cela nourrit de la culpabilité pour un acte naturel et que l’on s’empressera de commettre à nouveau sous la pressions physiologique. L’idée c’est tout de même de ne plus pécher : “va et ne pèche plus” et non pas : “va et de toute façon tu recommenceras pas que tu n’es pas en mesure de contrôler”. D’où la notion de “fumisterie” dont parlait Claude. Mais il faut aller plus loin, si vice il y a , et une trop grande fréquence de masturbation peut être considéré comme un vice, un comportement qui “vice ” un ordre naturel sain il est préférable de travailler sur les vertus (voir la vertu correspondante, et quelle serait la vertu correspondante dans ce cas?) que de s’auto accuser en permanence et de s’enfermer dans le cycle sans fin de la culpabilité. Là on pose la question de la valeur et du sens de la confession vu que de nombreux péchés (tous?) sont le fruit de blessures qui peuvent remonter à la petite enfance. Lorsque nous blessons autrui c’est parce que nous avons été blessés nous-mêmes. Mais c’est un autre sujet.
    Quand vous dites ” De toute façon, les prêtres et les religieux devraient être les premiers à savoir que ce n’est pas un drame de tomber dans le péché quand on le regrette et que l’on accueille la miséricorde de Dieu.
    Je pense qu’ils le savent en effet! Même si, quand on lit bien la doctrine de l’église, c’est un acte grave et un péché (et qui a même été considéré autrefois comme un péché mortel, c’est dire si on vient de loin) et que cet “acte grave” ne peut pas ne pas être commis parce que la nature a ses raisons que la morale ignore. Donc, la masturbation est elle un acte grave et un péché? Grave non, mais peut être un péché si elle détourne de l’accomplissement de l’acte sexuel vécu dans l’amour. Elle peut aussi, si elle est trop présente, attirer l’homme vers son animalité et l’y piéger. Il y a donc une part de “péché” est c’est de là que sont nés cette condamnation. Toutes ces questions relatives à la sexualité sont très importantes, surtout de nos jours, parce que je pense que c’est à partir de là qu’il y a désaffection et rejet de cette “autorité morale” qui montre par ailleurs des signes graves de déséquilibre (pédophilie). Repenser la “théologie du sexe” est donc tout aussi vital que l’acte sexuel lui-même qui a trop longtemps été considéré comme honteux alors que c’est par lui que nous sommes en vie (on voit la l’immense perversion de la chose). Mais il est vrai que l’Eglise l’a compris en mettant en avant la théologie du corps. La vie sexuelle fait partie de l’intime de la condition humaine et elle ne doit pas être réprimée mais épanouie. Il faut mieux donc étayer ses réflexions sur les études de psychologie et de sexologie que sur les dires de l’Eglise surtout qu’on sait bien qu’on a affaire à des hommes célibataires qui n’ont aucune expérience de la sexualité (mais de la masturbation si! D’ou d’ailleurs la crispation sur ce sujet). Quand l’Eglise aura enfin abolit l’obligation du célibat des prêtres alors elle offrira un nouveau visage qui lui donnera une plus grande crédibilité. Ca devrait entrer même dans une urgence de la “nouvelle évangélisation” que l’Eglise à le plus grand mal à comprendre et accepter l’idée qu’elle en serait le principal obstacle. La voie de la sainteté se doit de reposer sur une “voie de la santé holistique” prônant l’harmonie entre tous les plans de l’être. La souffrance et le refoulement ne doit pas être recherché pour eux-mêmes. Faire l’expérience de Dieu c’est faire l’expérience de l’Amour qui guérit tout et ainsi qui régule des comportements qui lui sont contraire. Il faut donc partir du haut de la recherche de cette expérience plutôt que s’enfermer dans la condamnation de comportement qui ne sont l’expression que d’un manque d’amour.
    A partir de la masturbation nous effleurons ici un vaste sujet. Il faut toujours tenter de tout remettre dans une perspective plus haute. Et sortir une bonne fois pour toute du dolorisme et du mépris de soi pour s’élever vers la lumière (Dieu est amour et lumière) qui nous justifie et nous libère.
    “La où est la joie, là est le chemin “( dialogues avec l’ange)

    • Cat-modératrice

      Bonjour Michaël,

      Bonjour Michaël,

      Vous parlez de beaucoup de choses, et je n’aurai pas le temps de répondre à tout les points que vous abordez ! Si certains vous tiennent à cœur, n’hésitez pas à publier une nouvelle question.

      Je trouve que vous allez un peu vite pour affirmer que vous savez que tous les hommes, absoluments tous les hommes, se masturbent. Vous n’en savez rien, et je n’en sais rien non plus.

      Par contre, vous êtes très pertinent lorsque vous dites : « La sexualité c’est aussi comme un muscle et plus on l’exerce plus il a besoin d’être exercé. De même que tout dépend du contexte dans lequel on vit. Si on vit dans un monde très sexué avec beaucoup de stimulis alors le désir sexuel vit avec plus de force. »

      Saint Jean-Paul II, avant d’être pape, écrivait lui-même dans Amour et responsabilité, que pour les couples mariés qui ont l’habitude d’avoir des relations sexuelles, cela devient un besoin qu’il est très difficile de contenir.

      Et, en effet, tout dépend du contexte. Dans notre société hyper-sexualisée, où nous sommes saturés d’images, de publicités, de scènes pornographiques qui apparaissent à l’écran, de textes incitant à vivre une sexualité débridée, de films avec des scènes qui stimulent l’imagination… Dans ce contexte, la chasteté devient en effet un combat beaucoup plus difficile pour ceux qui veulent la vivre. Et ceux qui entrent dans des communautés religieuses ou dans des séminaires sont nombreux à avoir eu auparavent une expérience de relations sexuelles et de masturbation régulière, ce qui rend l’engagement au célibat souvent plus difficile. De même que dans une société violente, il est plus difficile de donner le témoignage de la douceur, dans une société athée, il est plus difficile de tenir ferme dans la foi, etc.

      Vous dites aussi : « Il est préférable de travailler sur les vertus (voir la vertu correspondante, et quelle serait la vertu correspondante dans ce cas?) que de s’auto accuser en permanence et de s’enfermer dans le cycle sans fin de la culpabilité. »

      Je suis entièrement d’accord avec vous sur ce point ! C’est aussi ce que les spirituels et les théologiens catholiques enseignent. Saint Pierre dit : « L’amour couvre une multitude de péchés », mais l’absence de péché ne couvre pas l’absence d’amour ! 

      Pour ne jamais pécher, on peut s’éloigner des êtres humains, on aura beaucoup moins d’occasions de chute, mais on n’aura plus non plus d’occasion d’aimer… C’est aussi ce que nous dit la parabole du bon grain et de l’ivraie : mieux vaut laisser grandir le bon malgré le mauvais, que d’arracher le bon avec le mauvais !

      Quand au fait de vivre constament dans la culpabilité, c’est un péché. Jésus nous a rachetés de nos péchés, nous laisser ronger par eux c’est refuser d’accueillir le salut. Des saints, comme St Ignace de Loyola et Ste Thérèse de l’Enfant Jésus, sont passés par l’épreuve des scrupules. Ils ont dit eux-mêmes que les scrupules étaient de l’ordre du péché, et qu’ils s’enracinaient dans une très mauvaise compréhension de Dieu et du salut. Combattre les scrupules a été l’un des combats les plus difficiles et les plus fondamentaux de leur vie. Ils n’ont ensuite plus jamais vécu dans la peur ou dans la honte.

      • Michaël 2

        Réponse à Cat
        Bonjour Cat,

        Merci pour votre texte qui dit mieux que moi ce que j’ai tenté de dire, tout y apportant des références que je ne connaissais pas.

        Je recopie donc tout simplement parce que c’est à lire et à relire :

        Vous dites aussi : « Il est préférable de travailler sur les vertus (voir la vertu correspondante, et quelle serait la vertu correspondante dans ce cas?) que de s’auto accuser en permanence et de s’enfermer dans le cycle sans fin de la culpabilité. »
        Je suis entièrement d’accord avec vous sur ce point ! C’est aussi ce que les spirituels et les théologiens catholiques enseignent. Saint Pierre dit : « L’amour couvre une multitude de péchés », mais l’absence de péché ne couvre pas l’absence d’amour !
        Pour ne jamais pécher, on peut s’éloigner des êtres humains, on aura beaucoup moins d’occasions de chute, mais on n’aura plus non plus d’occasion d’aimer… C’est aussi ce que nous dit la parabole du bon grain et de l’ivraie : mieux vaut laisser grandir le bon malgré le mauvais, que d’arracher le bon avec le mauvais !
        Quand au fait de vivre constament dans la culpabilité, c’est un péché. Jésus nous a rachetés de nos péchés, nous laisser ronger par eux c’est refuser d’accueillir le salut. Des saints, comme St Ignace de Loyola et Ste Thérèse de l’Enfant Jésus, sont passés par l’épreuve des scrupules. Ils ont dit eux-mêmes que les scrupules étaient de l’ordre du péché, et qu’ils s’enracinaient dans une très mauvaise compréhension de Dieu et du salut. Combattre les scrupules a été l’un des combats les plus difficiles et les plus fondamentaux de leur vie. Ils n’ont ensuite plus jamais vécu dans la peur ou dans la honte.

        Pour d’autres points que vous relevez, il y a je pense une réflexion à mener (et qui a été menée) sur la question de la chasteté, qu’il ne faut pas confondre avec l’abstinence sexuelle. Un sujet important qu’il faudrait développer dans notre réflexion sur la sexualité.

        Et pour finir, par un point assez secondaire, qui est celui de “mon affirmation que tous les hommes se masturbent”, je dirais qu’il ne s’agit pas de provocation mais d’une connaissance minimale de la nature humaine. Comment peut-on imaginer que l’homme, un être sexué, puisse n’avoir aucune vie sexuelle? Dans le cas des gens d’Eglise, ils sont dans une démarche de “sublimation” mais il faut bien comprendre que c’est la chose la plus difficile qui soit parce ce que cela veut dire qu’il y a une parfaite maitrise de la vie sexuelle qui elle, continue sous une autre forme. Dans cette optique ascétique, qui ne doit pas être cependant un modèle dans la mesure ou la vie sexuelle n’est en rien une entrave à la sainteté (et c’est un peu le problème de l’Eglise que de mettre les moines et les moniales comme un exemple en les présentant comme des sortes de “champions spirituels” et délivrant ainsi le message que la spiritualité doit s’affranchir de toute vie sexuelle)? Donc pour ce qui les concernent, la voie de la sublimation est fatalement ponctuée de “chutes” et bien sûr que les moines se masturbent surtout s’ils sont jeunes. Il y a pas mal de témoignages vécus accessibles pour peu que l’on cherche un peu.
        Le monachisme n’est d’ailleurs pas pour moi une vie véritablement évangélique. Le Christ ne s’est pas enfermé dans un monastère et marchait à la rencontre du monde. “Je te demande de me garder du monde” ne veut pas dire “de me retirer du monde”. C’est bien sûr un point de vue personnel mais en effet il me semble qu’une vie véritablement évangélique implique d’aller à la rencontre de l’altérité et non pas de se replier en communauté de “tous semblables”. On peut de plus avoir une vie mystique de prière très approfondie tout en vivant en couple ou en famille.

        • Cat-modératrice

          Réponse
          Oui, bien sûr, il ne faut pas confondre chasteté et abstinence sexuelle. Heureusement, à l’heure actuelle dans l’Église on cherche beaucoup à sensibiliser les couples comme les consacrés à cette différence.

          Je continue à penser que votre affirmation que tous les hommes se masturbent se base uniquement sur votre propre expérience d’homme, et vos préjugés. Vous ne pouvez pas savoir comment les autres hommes vivent leurs pulsions sexuelles.

          Vous dites : « la vie sexuelle n’est en rien une entrave à la sainteté (et c’est un peu le problème de l’Eglise que de mettre les moines et les moniales comme un exemple en les présentant comme des sortes de “champions spirituels” et délivrant ainsi le message que la spiritualité doit s’affranchir de toute vie sexuelle)? »

          En effet, la vie sexuelle n’est en rien une entrave à la sainteté. Beaucoup d’hommes et de femmes sont appelés à se sanctifier à travers leur vie sexuelle. Heureusement, on ne présente plus aujourd’hui les religieux comme des champions de la vie spirituelle, et les laïcs sont beaucoup encouragés à cheminer vers l’union à Dieu et vers la sainteté. Le concile Vatican II, en particulier, a insisté sur ce point.

          « Le monachisme n’est d’ailleurs pas pour moi une vie véritablement évangélique. Le Christ ne s’est pas enfermé dans un monastère et marchait à la rencontre du monde. »
          La vie évangélique n’est pas d’imiter en tout point la vie de Jésus, sinon personne ne se marierait non plus. Jésus avait une vocation spécifique, et il a d’ailleurs chargé d’autres que lui d’annoncer la Bonne Nouvelle aux non-Juifs.
          Il faut bien des vocations différentes pour traduire tout le mystère de Jésus dans les vies humaines.
          Les moines ne se coupent pas des êtres humains, ils prient pour le monde, ils apprennent à s’aimer les uns les autres entre frères, ils reçoivent des intentions de prière, des gens qui viennent leur parler, etc.

    • ermort

      Petit commentaire
      Bonjour,
      […]

      Une remarque: vous affirmez, sans la moindre source d’ailleurs que votre idéologie personnelle, que tous les hommes se masturberaient. Et vous en déduisez que l’Eglise devrait, de ce fait, changer son discours…
      Ce que je sais, c’est que tous les hommes commettent des péchés. Cette unanimité obligerait-elle l’Eglise à changer sa parole sur le péché?
      100% de gens dans l’erreur ne produisent pas la vérité pour autant.

      Maintenant, vous pouvez bien-sûr ne pas apprécier ce que dit l’Eglise. Mais prétendre mieux savoir que le Saint Esprit ce qu’elle doit dire… hum…

      • Michaël 2

        Suite et fin pour Ermort
        Pour vous, il n’est pas possible de voir le réel sans mettre des “lunettes idéologiques”. Ou y a-t-il l’expression d’une idéologie dans le fait d’affirmer une réalité qui sans doute vous gêne, comme beaucoup, et cela à cause d’une éducation catholique qui a causé pas mal de dégâts sur le plan de la sexualité et qui est d’ailleurs une des grandes causes de la fuite des fidèles n’en pouvant plus de cette culpabilisation omniprésente. Vous êtes un bon catholique et ainsi la parole de l’Eglise n’est pas critiquable car “inspirée directement de l’Esprit saint”. Et c’est donc l’Esprit saint qui nous dit que la masturbation est un péché grave? Libre à vous de la croire. Personnellement, ce point de doctrine m’effraie par sa perversité puisqu’elle condamne une pratique qui relève d’un besoin physiologique. Ainsi, si vous avez faim, alors manger pour satisfaire sa faim est un péché. Plus loin, il peut s’agir d’un déséquilibre et d’une angoisse que l’on souhaite apaiser. Et si la personne ne résout pas son angoisse et son stress elle y aura recours quelque soit le poids de la morale. “Commettre un péché” est le plus souvent le fruit de blessures intimes et ce n’est pas par la culpabilisation que l’on guérit.
        Oui je pense que l’Eglise devrait changer son discours sur cette question et quand un vieux prêtre nous dit au sujet de la masturbation “ne vous en inquiétez pas, ce n’est pas grave du tout”, il en parle d’expérience parce qu’il a vu toutes ces personnes culpabilisées à outrance et il remet les choses en perspectives. Encore un donc qui remet en cause les “directives du Saint Esprit”. Au fait, quand aux siècles derniers la doctrine parlait de “péché mortel”. C’était aussi l’Esprit Saint qui parlait? Non l’Esprit saint n’est pas un édicteur de doctrine. Cette dernière est le fruit du travail de communautés d’hommes dans des contextes historiques précis. Et c’est donc naturel qu’elle évolue sur certains points. Parce qu’encore une fois, si la doctrine est une révélation intouchable alors pourquoi ne pas continuer à croire que la masturbation est un “péché grave”?
        Si vous ne savez pas que tous les hommes se masturbent et que sans doute beaucoup d’hommes catholiques font tout pour éviter cette pratique démoniaque au prix de déséquilibres encore plus grands, alors c’est que vous avez du mal à voir la réalité. Il y a d’ailleurs de nombreux témoignages de prêtres sur cette question sur le net et qui admettent avoir recours à cette pratique pour leur équilibre. C’est bien beau l’angélisme mais il faut aussi savoir être au plus prés de la réalité de la vie des hommes. Nous ne sommes pas des anges, désolé, et nous devons assumer cette difficile réalité de la vie sexuelle. Ou la refouler et sur ce plan les “cathos” sont des maitres en la matière c’est bien connu. Voyez moi, ca m’étouffe tout ca et si je suis resté chrétien, et même catholique ce n’est certainement pas à cause de l’Eglise qui m’a fait fuir pendant tant d’années et dont j’ai bien connu les perversités de l’intérieur. Et qui continue d’ailleurs très largement à me désoler.
        Donc, je suis libre et c’est bien ca la vérité de l’Esprit saint, c’est qu’il nous rend libres.

        • ermort

          Réponse à Mickaël
          Bonjour Mickaël;
          je vais prendre un peu de temps pour vous répondre, mais pas trop. En effet, vous tournez en rond, et ne prenez même pas la peine d’intégrer les apports des autres personnes. Je réponds dans votre texte.

          “Pour vous, il n’est pas possible de voir le réel sans mettre des “lunettes idéologiques”. Ou y a-t-il l’expression d’une idéologie dans le fait d’affirmer une réalité qui sans doute vous gêne, comme beaucoup, et cela à cause d’une éducation catholique qui a causé pas mal de dégâts sur le plan de la sexualité et qui est d’ailleurs une des grandes causes de la fuite des fidèles n’en pouvant plus de cette culpabilisation omniprésente. ”

          IDEOLOGIE: vous répétez les leitmotiv qu’on lit partout, actuellement. Et qui n’acceptent pas une autre vision.

          “Vous êtes un bon catholique et ainsi la parole de l’Eglise n’est pas critiquable car “inspirée directement de l’Esprit saint”. Et c’est donc l’Esprit saint qui nous dit que la masturbation est un péché grave? ”

          PECHE GRAVE: j’ai déjà répondu. Vous mélangez ce qui est de l’ordre de la matière grave, et ce qui est de l’ordre du péché. ne pouvez-vous pas en tenir compte dans vos propos?

          “Libre à vous de la croire. Personnellement, ce point de doctrine m’effraie par sa perversité puisqu’elle condamne une pratique qui relève d’un besoin physiologique. ”

          DOCTRINE: Relisez le catéchisme avant de clamer de la doctrine, en vous trompant.

          BESOIN PHYSIOLOGIQUE: c’est vous, et toute la clique actuelle, qui l’affirmez.
          La sexualité relève de la pulsion et pas de l’instinct (au niveau individuel en tout cas). Tant chez les animaux que chez les humains. Elle n’est pas un besoin vital.
          Regardez donc les boeufs, ou tout autre animal castré.
          Relisez aussi ce que dit Jésus: Matthieu 19.

          “Ainsi, si vous avez faim, alors manger pour satisfaire sa faim est un péché. Plus loin, il peut s’agir d’un déséquilibre et d’une angoisse que l’on souhaite apaiser. Et si la personne ne résout pas son angoisse et son stress elle y aura recours quelque soit le poids de la morale. “Commettre un péché” est le plus souvent le fruit de blessures intimes et ce n’est pas par la culpabilisation que l’on guérit.”

          GUERISON: j’ai aussi répondu. La chasteté proposée par l’Eglise est le seul chemin de guérison possible face à des pulsions non ordonnées.
          La masturbation, résoudre le stress? Comme un verre d’alcool. Peut-être. Mais pour combien de temps?
          Depuis quand soigne-t-on vraiment le mal par le mal?

          “Oui je pense que l’Eglise devrait changer son discours sur cette question et quand un vieux prêtre nous dit au sujet de la masturbation “ne vous en inquiétez pas, ce n’est pas grave du tout”, il en parle d’expérience parce qu’il a vu toutes ces personnes culpabilisées à outrance et il remet les choses en perspectives. ”

          UN PRETRE: et alors? Vous le prenez pour Dieu le Père? Parce qu’un prêtre dit ceci ou cela, vous allez gober sans réfléchir ni faire d’acte de foi? J’ai connu des prêtres qui disaient qu’il n’y a pas la présence réelle dans l’Eucharistie. Je dois les croire?

          “Encore un donc qui remet en cause les “directives du Saint Esprit”. Au fait, quand aux siècles derniers la doctrine parlait de “péché mortel”. C’était aussi l’Esprit Saint qui parlait? Non l’Esprit saint n’est pas un édicteur de doctrine. Cette dernière est le fruit du travail de communautés d’hommes dans des contextes historiques précis. Et c’est donc naturel qu’elle évolue sur certains points. Parce qu’encore une fois, si la doctrine est une révélation intouchable alors pourquoi ne pas continuer à croire que la masturbation est un “péché grave”?”

          SUR LA THEOLOGIE DU CORPS: lisez donc l’enseignement de l’Eglise. Vous n’y comprenez manifestement rien… et prétendez juger quand même. Ce n’est pas sérieux.

          “Si vous ne savez pas que tous les hommes se masturbent et que sans doute beaucoup d’hommes catholiques font tout pour éviter cette pratique démoniaque au prix de déséquilibres encore plus grands”

          PLUS GRANDS: qu’en savez-vous? Voilà bien une manière paresseuse de régler la question et de rester croupir dans ses échecs.

          “, alors c’est que vous avez du mal à voir la réalité. Il y a d’ailleurs de nombreux témoignages de prêtres sur cette question sur le net et qui admettent avoir recours à cette pratique pour leur équilibre. C’est bien beau l’angélisme mais il faut aussi savoir être au plus prés de la réalité de la vie des hommes. Nous ne sommes pas des anges, désolé, et nous devons assumer cette difficile réalité de la vie sexuelle. Ou la refouler et sur ce plan les “cathos” sont des maitres en la matière c’est bien connu. ”

          BIEN CONNU: alors vous ignorez les multiples approches, propositions, analyses, etc. qui présentent la sexualité d’une manière bien plus intéressante que l’image que vous en véhiculez.

          “Voyez moi, ca m’étouffe tout ca et si je suis resté chrétien, et même catholique ce n’est certainement pas à cause de l’Eglise qui m’a fait fuir pendant tant d’années et dont j’ai bien connu les perversités de l’intérieur. Et qui continue d’ailleurs très largement à me désoler.”

          CATHOLIQUE: hors de l’Eglise… impossible. J’ai l’impression que vous vous prenez pour Dieu. Pas d’humilité dans votre démarche, mais des jugements de quelqu’un qui croit tout mieux savoir qu’une Mère et Educatrice de 2000 ans, aussi Epouse du Christ.

          “Donc, je suis libre et c’est bien ca la vérité de l’Esprit saint, c’est qu’il nous rend libres.”

          LIBRE: la Vérité rend libre. (Jean 8). Et cette liberté, vous ne la trouverez pas en vous excluant volontairement de l’Eglise, en y prenant juste ce qui vous arrange.

          Pour finir, je cite St Alphonse de Liguori (Docteur de l’Eglise). Ça vous éclairera peut-être sur la culpabilité et ce que vous prétendez que l’Eglise en aurait fait. Au lieu d’accuser l’Eglise, regardez plutôt du côté de pasteurs maladroits ou mauvais.
          «  Il nous faut user de douceur envers nous-même. Se mettre en colère contre soi-même pour avoir commis une faute, ce n’est pas humilité mais orgueil subtil (…) Se mettre en colère contre soi-même après la faute est une faute plus grande encore que celle qu’on vient de commettre, et qui aura pour conséquence d’en commettre beaucoup d’autres: on délaissera ses dévotions, l’oraison, la communion; ou, si l’on s’en acquitte, elles ne seront guère bien faites. »

          • Michaël 2

            Suite et fin pour Ermort
            Bonjour Ermort,

            Voici un commentaire bien “mortel”, […]. Mortel, parce qu’encore une fois, la réalité de l’autre et de son cheminement est nié face à la pure observance des règles de l’Eglise qui serait une mère parfaite depuis près de 2000 ans. Alors fatalement, en rien elle ne peut être responsable du fait que de nos jours 96% des personnes se disant catholiques en France ne vont plus à l’Eglise. Elle n’y est pour rien vu qu’elle est parfaite. Et comme elle est parfaite pourquoi se remettrait elle en cause? Sans doute que quand nous serons arrivés à 100% quelques questions devront sans doute se poser.
            Comme vous n’essayez même pas de comprendre ma pensée vu que vous la vivez comme une menace contre vos croyances, il n’est pas très utile d’approfondir cet échange, mais je vais juste relever un point pour m’adresser d’une manière plus générale à tous les croyants qui sont hors de l’Eglise.
            Vous me dites donc : hors de l’Eglise… impossible. J’ai l’impression que vous vous prenez pour Dieu. Pas d’humilité dans votre démarche, mais des jugements de quelqu’un qui croit tout mieux savoir qu’une Mère et Educatrice de 2000 ans, aussi Epouse du Christ.
            Vous êtes ici dans le “hors de l’Eglise point de salut”. Mais de quelle église parlez-vous? De l’Eglise catholique romaine? qui n’est devenue dans le temps qu’une église catholique parmi d’autre, même si elle a l’antériorité et est encore la plus importante en nombre, a force d’avoir provoqué exclusions et schismes. La véritable Eglise catholique est celle de “l’assemblée de tous les appelés”, quelque soit leur appartenance confessionnelle ou non. Et qui intègre également l’Eglise de l’au-delà ou je doute que ces différentes confessions existent encore.
            Aussi, toute personne qui prie et entre en relation avec la sainte Trinité fait partie de l’Eglise. “Le royaume de Dieu est au dedans de vous”, “si tu veux prier, ferme la porte de ta chambre et tu rencontreras ton Père qui est présent dans le secret de ton cœur”. Ainsi ce n’est pas forcément “en frappant à la porte du temple (Eglise) que vous pourrez faire l’expérience de Dieu” (ce n’est pas moi qui le dit mais le Père Di Falco) mais en frappant à la porte de votre propre temple, c’est-à-dire, en recherchant le “royaume de Dieu qui est en soi”. Maria Valtorta (que l’on considère ses écrits comme “légitimes” ou non) nous dit que le Christ aurait dit (dans ses visions) que le Notre Père, “en soi”, fait église à lui seul et assure en ce sens, sans le secours de l’institution, sa propre sanctification. Il ya de très nombreux catholiques qui sont très croyants et priants et qui ne vont pas à l’Eglise. Comme il y a beaucoup de catholiques qui vont à la messe par routine et qui ne vont pas bien loin dans l’expérience de l’amour. Parce que c’est bien de ca dont li s’agit, de faire l’expérience ce l’amour ou alors tout est vain. Dieu ne nous demande pas d’être de “bons paroissiens”. Et il se trouve qu’il y a un nombre incalculable de catholiques (pour être précis selon les dernières études qui se sont détournés de l’Eglise et ont, soit “perdu la foi”, soit recherchent Dieu dans leur propre cœur et ne supportent plus cette “toute puissance institutionnelle divinisée” qui les écrase. Alors a vous d’avoir l’humilité de reconnaitre que l’Eglise ne remplit pas forcément son rôle d’être un “chemin de l’expérience de l’amour” ou alors tout le monde irait à l’église puisque tout le monde cherche l’amour.. Et de saisir qu’elle ne peut plus se cramponner à sa toute puissance d’antan ou l’on déclarait en effet “point de salut hors de l’Eglise (romaine)”. C’est même le contraire, on pourrait aller jusqu’à dire que le salut se trouve de nos jours “hors de l’institution”. Pour ce qui me concerne mes rapports avec l’Eglise, et dont vous êtes un bon exemple, m’écartent justement de cette profonde relation intérieure que je cultive, sans effort, avec ma récitation matinale du Rosaire et qui me met ainsi en communion avec la véritable église catholique, c’est à dire l’Eglise universelle. Au Japon, le Rosaire aura permis à cette “église non structurée” de perdurer pendant 200 ans sans prêtres.
            Vous faites dont partie de ces catholiques romains qui se permettent du haut de leur adhésion doctrinale aveugle de juger de la réalité de l’exprience spirituelle d’autrui et ici, de son niveau d’humilité , ce qui est pour le coup très orgueilleux, et dans tous les cas, complètement à côté de la plaque, parce que vous n’accueillez pas la réalité de parcours qui s’écarteraient de la voie autorisée. Comme si la voie de l’expérience de Dieu était unique. Voila ce genre d’attitudes qui me font fuir. Je n’ai ainsi aucunement besoin de vos conseils spirituels vu que vous confondez spiritualité authentique et appartenance à une institution et dont justement la mystique a cédé le pas depuis bien longtemps à la morale, pour pas dire l’ordre moral (cause première de la désaffection généralisée). Je conçois que vous y trouvez votre sécurité. Mais l’expérience de la foi, qui est celle de l’amour, échappe à toutes les règles et toutes les doctrines. Vous voyez, dans le rosaire nous nous adressons directement à Marie, mère spirituelle de tous les chrétiens, quelque soit leur appartenance (Marie n’appartient à aucune religion) et la “pure religion”, ce n’est pas d’aller à l’Eglise et de se soumettre à sa doctrine, mais de vivre l’expérience de la charité dans la vie quotidienne. Le Christ, en s’incarnant est devenu l’unique prêtre. Nous n’avons donc pas besoin d’autre médiation et si le Christ estime que certaines âmes (et nombreuses de nos jours) doivent cheminer hors de l’institution, il doit bien avoir ses raisons. Je pense même que tout chrétien qui se revendique tel malgré son éloignement de l’institution (ce qui nécessite une vérité intérieure profonde puisque privée de tout autre soutien) fait partie des pierres sur lesquelles se construisent l’église de demain et le temps est proche ou celle ci va émerger au grand jour. L’Eglise à fait de nombreuses erreurs, et même très graves, vu qu’elle “a du sang sur les mains”, et elle paie aujourd’hui le poids de son histoire. Sur le fond, on peut dire que “tout es cassé” et nous ne pouvons rien faire d’autre que d’attendre que le Christ vienne tout réparer. En attendant chacun vit sa foi comme il est appelé à la vivre. Pour ce qui me concerne c’est “très loin de Rome” (et pourtant je prie en latin et chante le grégorien ce qui montre que je ne rejette aucunement le dépôt très précieux de la “foi de nos pères” mais que oui, je ne supporte plus le poids de cette institution qui m’a au fond “pourri la vie” alors que ce n”était peut être pas véritablement nécessaire, ce qui est très différent et, si vous avez un tant soi peu de “charité chrétienne” à vous de tenter de comprendre ce cheminement et de l’accepter.
            C’est mon dernier post sur ce forum, en espérant qu’il soit publié, vu que suite à la censure de l’administratrice qui coupe les textes selon son bon plaisir et aussi parce que bla bla sur des forums n’apportent rien si non en permanence des conflits puisque chacun s’identifie à ses convictions et qu’ainsi toute critique est prise comme attentatoire à son identité (le temps des débats constructifs et donc “détaches” n’a plus cours de nos jours). je préfère le silence de la prière et de l’étude et surtout, tenter tant bien que mal de construire dans la “vrai vie”.

            Bonne chance E Vie

            • Cat-modératrice

              Je n’ai pas censuré mais déplacé votre message

              Bonjour Michaël,
               
              Ce que vous dites n’est pas très honnête. Le message dont je n’ai laissé qu’un passage dans la discussion de « Est-ce Jésus qui me parle », je l’ai publié entièrement, avec les messages le précédant, dans une nouvelle publication du site. Il n’était pas sorti de son contexte, puisque j’y ai dupliqué tous les textes le précédant, ce qui m’a pris BEAUCOUP de temps.
              Comme vous m’avez ensuite écrit que mon acte était inexcusable et que vous quittiez le site et que ces discussions ne vous intéressaient pas, alors j’ai supprimé cette nouvelle publication, avec votre message qui était dans son intégralité.
              Il n’est donc pas honnête de votre part de m’accuser de censure.
               
              Dans votre dernier message que je viens de publier, j’ai censuré par contre une part de phrase où vous vous en prenez au nom de quelqu’un, ce qui est interdit sur ce site.
               
              Sinon, pour répondre au reste de votre commentaire, je citerai Jean-Paul II dans son encyclique Redemptoris Missio :
               
              Il est vrai également qu’un certain nombre de personnes déclarent avoir intérieurement donné leur foi au Christ et à son message, sans pour autant vouloir s’engager sacramentellement parce que, à cause de leurs préjugés et des fautes des chrétiens elles ne parviennent pas à percevoir la vraie nature de l’Église, mystère de foi et d’amour. Je voudrais encourager ces personnes à s’ouvrir pleinement au Christ, en leur rappelant que si elles se sentent attirées par le Christ, c’est lui qui a voulu l’Église comme le « lieu » où elles peuvent effectivement le rencontrer. En même temps, j’invite les fidèles et les communautés chrétiennes à témoigner authentiquement du Christ par leur vie nouvelle.
               
              • Michaël 2

                Bien, alors j’ai mal lu et je

                Bien, alors j’ai mal lu et je m’en excuse, mais le texte a été tout de même supprimé de sa place originelle et vous avez sorti des extraits qui ne correspondait plus au mouvement de la discussion. De toute façon ce n’est pas grave, je n’attends rien d’un forum à par des engueulades, qu’il soit chrétien ou non. C’est un site catho pour les “bon cathos” et voilà. Vous citez JPII qui parle de la vraie nature de l’Eglise. Certes et elle ne se réduit pas ni à l’église romaine ni à une quelconque institution. La vraie nature de l’Eglise est “méta institutionnelle”. Par contre je me rappelle bien de cette époque ou JPII avait destitué le bon Mgr Gaillot et l’avait nommé à la tête d’un évêché fantôme à “Partenia” et qui d’ailleurs a eu un très grand succès ce qui montre bien que l’Eglise romaine à un gros problème et que beaucoup en ont souffert et en souffre au point de s’en aller. Je me souviens qu’a l’annonce de sa destitution, les paroissiens s’étaient agglutinés devant le parvis, refusant d’entrer dans l’église pour assister à la messe. Le prêtre  a dû sortir pour aller à leur rencontre et entendre des “si c’est comme ca on ira chercher Dieu ailleurs” (c’est d’ailleurs ce que j’ai fait en devenant bouddhiste pendant quelques années et ce qui m’a fait le plus grand bien!) Tout le monde a oublié mais c’est bien le symptôme de cet autoritarisme et ce refus d’écouter de l’institution que JPII a exprimé. Et avec cette expression terrible : “Mgr Gaillot, il faut chanter avec le chœur”. Voilà, toute initiative et toute pensée personnelle est prohibée, il faut obéir au chef. Alors que le pape devrait être le plus petit d’entre nous… Je dis ca juste pour montrer la différence entre la vraie nature de l’Eglise et le vrai visage de l’Eglise qui est sur le fond une véritable machine à broyer et à exclure. Et elle l’a largement montré au cours du temps. Et aussi parce que site reprend le titre de JPII très rapidement canonisé alors que ceux qui l’approchaient de près l’on décrit comme un véritable tyran. Il est temps qu’une autre Eglise émerge et qui revienne aux fondamentaux des premiers temps qui ont été très largement déviés donnant naissance à une dérive autocratique qui a été une source terrible de division et d’oppression. “On attendait le retour du Christ et on eu l’Eglise” disait avec dépit les gens au XIXe siècle…” 
                 
                Bonne continuation
                 
                Pour ceux qui veulent aller plus loin dans la critique institutionnelle, je cite quelques ouvrages majeurs :
                 
                “Fonctionnaires de Dieu”, du théologien catholique Drewerman (viré, hum ca sent bon la liberté d’expression)
                 
                “Prisonnier de Dieu” ou Michel Benoit relate les 18 ans qu’il a passé dans un monastère bénédictin (et ou il a été lui aussi exclu à la fin par les “frères” dominicains)
                 
                Et le terrible “Pathos catholique” de Jean-Yves Jézéquel, qui a été abbé des Carmes pendant 37 ans et déclaré “relapse et hérétique” (comme au bon vieux temps!). Le livre le plus terrible que j’ai lu  et qui exprime avec des mots précis le pourquoi de toutes les souffrances “des hommes libres” confronté à l’institution.
                 
                J’invite les personnes souhaitant répondre à ce message à le faire dans la nouvelle discussion ouverte à cette occasion : L’Église institutionnelle source d’exclusion ?
            • ermort

              Réponse à Mickaël
              Vous écrivez:
              « la réalité de l’autre et de son cheminement est nié »
              En lisant vos textes (difficiles à lire vu leur présentation en bloc compact assez indigeste), je n’ai pas perçu le témoignage d’un cheminement personnel, mais des affirmations générales assénées sans aucune preuve.
              J’ai répondu à ces affirmations fantaisistes.

              Vous interprétez beaucoup, et n’écoutez pas… Ce dont vous faites reproche à autrui, sans interroger votre propre pratique.

              Je ne me sens aucunement menacé. J’ai confiance en l’Eglise. Et j’ai assimilé la promesse du Christ à Pierre: les portes de l’Enfer ne tiendront pas contre l’Eglise.
              Je sais aussi que le Christ a vaincu le monde.

              Je ne répondrai pas à tout, car vous passez beaucoup de temps à interpréter et déformer.

              Vous citez Maria Valtorta, dont l’Eglise a circonscrit les interventions de manière claire.

              Pourquoi répartissez-vous les gens en deux camps? Il me semble qu’il n’y a pas que deux voies possibles. Soit les bons qui prient chez eux sans aller à l’église, soit les hypocrites pratiquants « bons paroissiens » comme vous les nommez, sans trop dire ce que ça serait d’ailleurs.

              Vous oubliez que le Christ lui-même a fondé l’Eglise, sur Pierre.
              L’Eglise est sainte, car corps du Christ, épouse du Verbe.
              Elle est aussi constituée d’hommes pécheurs, et les péchés de ses membres déforment effectivement la mission. Mais vous ne pouvez honnêtement mélanger les deux sans vous tromper lourdement.
              L’institution vous pèse, alors vous la rejetez? Cette fuite vous rend-elle plus saint? Sûrement pas.
              Cette institution est une part de l’Eglise qui, bien-sûr, est aussi au ciel, constituée de tous ceux qui ne sont pas en enfer.

              Vous ne vous sauverez pas sans l’Eglise, ses sacrements, son intercession (des vivants sur terre ou au ciel), etc. Je vous souhaite de le découvrir un jour. Même si certains de ses membres ne sont pas du tout fidèles, et peuvent nous blesser gravement.

              Bonne chance à vous aussi.

              • Cat-modératrice

                Selon Jean-Paul II

                Au sujet du fait que nous avons besoin de l’Église pour être sauvés, j’ajouterai encore une citation de Jean-Paul II, toujours Redemptoris Missio, qui montre qu’aucun être humain n’est perdu pour des raison ne relevant pas de sa volonté :

                L’universalité du salut ne signifie pas qu’il n’est accordé qu’à ceux qui croient au Christ explicitement et qui sont entrés dans l’Église. Si le salut est destiné à tous, il doit être offert concrètement à tous. Mais il est évident, aujourd’hui comme dans le passé, que de nombreux hommes n’ont pas la possibilité de connaître ou d’accueillir la révélation de l’Évangile, ni d’entrer dans l’Église. Ils vivent dans des conditions sociales et culturelles qui ne le permettent pas, et ils ont souvent été éduqués dans d’autres traditions religieuses. Pour eux, le salut du Christ est accessible en vertu d’une grâce qui, tout en ayant une relation mystérieuse avec l’Église, ne les y introduit pas formellement mais les éclaire d’une manière adaptée à leur état d’esprit et à leur cadre de vie. Cette grâce vient du Christ, elle est le fruit de son sacrifice et elle est communiquée par l’Esprit Saint : elle permet à chacun de parvenir au salut avec sa libre coopération.

                C’est pourquoi le Concile, après avoir affirmé le caractère central du Mystère pascal, déclare : « Et cela ne vaut pas seulement pour ceux qui croient au Christ, mais bien pour tous les hommes de bonne volonté, dans le cœur desquels, invisiblement, agit la grâce. En effet, puisque le Christ est mort pour tous et que la vocation dernière de l’homme est réellement unique, à savoir divine, nous devons tenir que l’Esprit Saint offre à tous, d’une façon que Dieu connaît, la possibilité d’être associés au Mystère pascal» .

                Donc si quelqu’un rejette l’Église parce que, à cause des péchés des chrétiens, il n’a pas pu comprendre ce qu’est vraiment l’Église, il n’est pas forcément exclu du salut. Mais s’il accueille le salut, ce sera quand même en relation, mystérieusement, avec l’Église.

              • Michaël 2

                Je vous cite : Vous ne vous

                Je vous cite : Vous ne vous sauverez pas sans l’Eglise, ses sacrements, son intercession (des vivants sur terre ou au ciel), etc. 
                 
                Et que faites-vous du “bon larron” à qui le Christ a dit “aujourd’hui même tu seras avec moi au Paradis”? Comme ca sans passer par l’Eglise et sa discipline, ses sacremeents… 
                 
                Enfin, je dis juste ca pour illustrer le fait que les choses ne sont pas forcément aussi simples que vous le pensez. Et pour ce qui est de vos commentaires sur ce que je serais ou non, il me semble que l’on ne peut en émettre que dans la mesure ou l’on connait un minimum la personne. Et si je suis revenu à la foi créthienne, ce n’est pas en allant à l’église mais par la pratique de la prière du coeur orthodoxe près d’un lac sur une haute montagne ,dans la solitude la plus totale…. Donc vous voyez, pas d’église catholique romaine, pas de doctrine pas de sacrements etc. Juste une communion spirituelle profonde établie par une pratique que je n’ai d’ailleurs pas quittée depuis….  Et qui est pour moi un véritable chemin de sainteté, tout comme le rosaire d’ailleurs. Donc vous voyez, “l’Esprit Saint souffle ou il veut et quand il veut”. 
                 
                J’invite les personnes souhaitant répondre à ce commentaire à le faire dans la nouvelle discussion créée à cette occasion : Hors de l’Église point de salut ?
    • Claude (homme)

      Bonjour Michaël.
      Bonjour Michaël.

      Je n’étais plus venu sur ce site depuis de nombreux mois et c’est suite à un de tes courriers que j’ai reçu un message du site.
      Ce courrier m’a beaucoup apporté.

      J’ai parcouru par moment des parties de ce que tu écris.

      Ferais-tu l’éloge de la masturbation ?

      Si tel est le cas, nous nous trouvons en opposition sur la vision de cette chose. Je n’ai jamais fait son éloge ; au contraire, et oui, je considère que c’est une abomination. Et les moyens que j’utilise pour distraire mon esprit aux moments où je me livre à ces choses sont quant à eux encore plus abominables puisque je puise en la pornographie qui est en totale opposition à toute dignité de l’homme, et ce, même si je trouve du plaisir en ces choses.

      Le plaisir ne sera jamais la réponse à tout, ni une justification.
      Certains éprouvent du plaisir à tuer, torturer ou violer, voler, mentir, tricher, etc.
      D’ailleurs, David lui-même a subi ces penchants, se dressant contre ce qui est bon et allant jusqu’à laisser mourir un de ses fidèles soldats pour se saisir de son épouse.
      Bref, pour moi, la masturbation est plus une maladie qu’autre chose. Et dans le mot maladie, tu remarqueras le mot « mal ».
      Cette chose est un mal, une arme de Satan qui se sert de notre chair pour attirer vers lui. Et il y réussit si bien. Après, bien sûr, la culpabilité…
      « Pourquoi te caches-tu ? » a demandé le Seigneur à Adam, de suite après la faute.

      Satan nous pousse à la faute et ensuite nous montre la laideur, notre laideur, et notre indignité à nous approcher de Dieu. « Pourquoi te caches-tu ? »
      Satan nous a offert la honte, une tache sur nos âmes qui ne sont plus immaculées.

      Je me masturbe depuis ma petite enfance. Ce n’est pas pour autant que j’affirmerais que cela est indispensable ni même que chaque homme se masturbe, car c’est faux. Des hommes s’abstiennent, et de cela je suis sûr.

      Comment serais-je sûr ?

      Suite à ma Rencontre bénie avec Notre Seigneur, ce mal est sorti de moi, et ce, pendant des mois. Et c’était merveilleux. Toutes les femmes que je rencontrais étaient en un instant devenues mes sœurs, et jamais un objet de convoitise.
      Je n’ai plus recherché ce plaisir ni songer à le rechercher.
      Et puis, un jour…

      L’autre raison qui me permet d’être sûr de cela, à savoir que l’homme peut vivre et vit très bien sans assouvir ce genre de besoin tellement lié à la chair et aux pulsions charnelles, c’est simplement le Christ, Notre Seigneur. Il a été homme et entièrement homme, mais sans péché.

      Ensuite, il y a ces saintes âmes, comme celle d’un Saint François, et tant d’autres.
      Donc, non, je n’ai pas cette vision des choses que tu sembles avoir toi. Même si, et je le redis, j’ai apprécié ce courrier qui a fait que je me retrouve aujourd’hui en ce site.

      La Vie est belle.
      Lorsque j’écris ceci, je pense à la Vie spirituelle, Celle de ceux qui ont la chance d’être spirituellement vivants.
      Celui qui est spirituellement vivant vit de Christ. Et Christ Lui-Même me dit que la masturbation, et tout ce qui s’y lie, est abominable. Et cependant, ce Claude qui écrit ces lignes est vivant, car rien n’est impossible à Dieu.

      • ermort

        Merci Claude 🙂
        Merci du temps passé à écrire ce beau texte.
        Vous avez eu plus de patience que moi 🙂

        • Claude (homme)

          Je ne pense pas que ce soit
          Je ne pense pas que ce soit de la patience dont use le Seigneur à mon égard, mais plutôt, de l’Amour. Et il se trouve que j’aime Ses enfants, dès lors qu’Il aime en moi. J’ai tant et tant reçu gratuitement.
          D’autre part, sur certains points, je comprends absolument Michaël. Ce qui est peut-être ennuyeux, c’est d’accuser l’Église, alors que selon moi, ce sont davantage certains hommes d’Église qui ont eu, ont et auront des attitudes ou pensées pas forcément en accord avec la Doctrine, avec l’Amour de Dieu, et surtout, l’amour du prochain.
          Michaël est mon frère. Peut-être souffre-t-il, vu tant d’exaltation, alors, je sais que mon Seigneur se tourne particulièrement vers lui. Il n’est pas venu pour les bien-portants.
          Enfin et pour conclure, le temps passé à écrire ce “beau texte” est un temps de grâce. Car je ne suis pas seul. Et je ne fais pas que passer lorsque je croise un frère, et même lorsque je te croise toi.
          Nous sommes tous des temples du Béni, par le Souffle de vie, pour un temps imparti. Mais qui en a conscience, et qui sait user au mieux de ce temps si précieux?

          • ermort

            Merci Claude.
            “Ce qui est peut-être ennuyeux, c’est d’accuser l’Église, alors que selon moi, ce sont davantage certains hommes d’Église”

            Tout à fait.

            Souffrir n’empêche pas d’utiliser à la fois son cerveau, à la fois sa bonne volonté. Visiblement, Mickaël prétend bien connaître ce que dit l’Eglise… mais déforme tout. Et, quand on le lui fait remarquer, ne prend pas le temps de se former mieux. A ce niveau, il n’y a pas que de la souffrance, mais de la mauvaise volonté, voire de la malhonnêteté, à mon avis.

            Il y aune cohérence dans ce qu’enseigne l’Eglise à la suite du Christ. Un peu d’humilité permet, lorsqu’on se sent en contradiction, de se remettre en question soi-même, au lieu de jeter l’anathème sur l’Eglise par principe.

            Bonne soirée 🙂

      • Cat-modératrice

        Bonjour Claude,
        Bonjour Claude,

        Merci pour votre témoignage.

        Si je comprends bien, d’après votre expérience, un regard irrespectueux sur les femmes est une conséquence de l’habitude de la masturbation ?

        • Claude (homme)

          Je ne dirais pas
          Je ne dirais pas irrespectueux mais plutôt biaisé. Il peut devenir irrespectueux si l’on ne lutte pas contre certaines pensées “bondissantes”, et des images irrespectueuses d’une femme devant nous que l’on peut très vite imaginer dévêtue, et bien pire bien sûr. Mais là, je ne dirais pas que c’est une conséquence de la masturbation. Je pense que c’est la conséquence d’abus de nourriture pornographique.
          Il n’y a pas d’irrespect dès lors que ces pensées sont coupées à la racine. Encore faut-il avoir quelque considération pour la personne en face ainsi que pour soi-même. Je pense que les chrétiens en dispose.

      • Michaël 2

        Réponse à Claude (masturbation)
        Bonjour Claude,
        Non je ne fais pas l’éloge de la masturbation, mais je minimise en effet ce que tu appelles être une “maladie” alors que pour de nombreux sexologues la masturbation n’est non seulement pas une maladie mais en plus est considérée comme “bonne pour la santé”. A condition bien sûr que cela ne devienne pas une addiction. Il faut bien comprendre que nous avons été culpabilisés “à mort” ‘(péché mortel) sur un plan historique par l’Eglise et donc il est temps de s’en dépêtrer a moins de se complaire dans la culpabilité. On n’imagine pas à quel point ca peut devenir pervers. La meilleure c’est à mon avis celle là, celle d’un évêque qui disait avoir besoin de se masturber avant d’écrire son sermon, pour se “sentir le plus misérable possible”. Il n’arrivait pas à écrire autrement…
        Quand tu dis que c’est une abomination, c’est donc que “tu repousses avec horreur” cette pratique à laquelle pourtant tu ne peux renoncer, hormis un “passage angélique” ou la sexualité n’avait pas de prise sur toi. Sauf qu’elle est revenue et tout simplement parce que tu n’es pas un ange. Plutôt que de parler de péché peut-être pourrais tu interroger ta vie relationnelle et voir si tu ne pourrais pas avoir une vie sexuelle plus saine? Tu ne penses pas que ce serait mieux que de t’enfermer dans la culpabilité? Sachant aussi que même une vie sexuelle épanouie n’empêche pas le recours à cette pratique. Il y a beaucoup d’hommes pour qui cela ne pose pas de problème parce qu’il ne sont pas enfermé dans cette culpabilité qui fait de cette “chose abominable” une “monstruosité”. Maintenant, loin de faire l’éloge de cette pratique je considère qu’elle n’est pour autant très saine par ce qu’elle ne s’exprime pas dans le cadre d’une relation amoureuse authentique. Mais encore faut-il pouvoir être dans une relation hors beaucoup sont seuls de nos jours. Il est difficile pour beaucoup de trouver un partenaire. Bref, quand on est seul, on fait comment? On fait comment le matin quand on a une érection très forte? On se met a genoux et on prie de toutes ses forces que cette abomination passe? Comme dans les couvents des temps passés? Franchement…. C’est cette culpabilité qui est à l’origine de toutes les déviances et c’est celle ci qu’il faut fuir.
        Après tu parles du besoin de pornographie, ce qui est logique et c’est vrai que c’est là que les choses se gâtent sur un plan spirituel parce que cela amène à développer un regard chosifiant sur l’autre, à en faire uniquement un objet de plaisir personnel. Là c’est malsain en effet, ce qui indique ainsi qu’il doit y avoir un “art de la masturbation” qui soit plus sain que d’autre. De toute façon si on y a un recours trop important, c’est qu’à la base il y a un déséquilibre relationnel et c’est en tentant de rééquilibrer les choses qu’on peut arriver à s’en dégager. Ca relève donc plus de la thérapie. Après à toi de préférer le combat avec le démon qui serait l’inspirateur de cette pratique. Et de considérer que toute pulsion sexuelle est démoniaque, on l’a longtemps cru. Et qu’ainsi le désir sexuel est maléfique puisqu’il nous pousse au “péché de chair” et à défaut à la masturbation.
        Tu dis que le Christ lui-même te dis que c’est une abomination, et tu le penses ainsi sincèrement, alors tente de t’en libérer et pour ça il faut en prendre les moyens. D’abord reconnaitre que le besoin sexuel est une réalité à laquelle nous devons faire face et ainsi travailler à ce que ce besoin ne se transforme pas en malédiction et donc qu’il puisse s’exprimer. En gros, soit tenter de construire une relation et partir à la recherche de l’âme sœur, soit choisir l’abstinence en sachant qu’i ne sera pas possible d’échapper à ce “fléau”. Ou alors accepter cette pratique comme une manière occasionnelle pour régulariser sa vie sexuelle et orienter son esprit vers autre chose. Il y a des choses plus importantes et plus graves dans la vie tout de même. Tourner en rond autour de ce problème c’est aussi une forme d’onanisme et de renfermement sur soi.
        Ou alors aller régulièrement se confesser pour cette faute abominable, sans cesse recommencée, et plonger dans les délices de l’auto flagellation perverse. (parce que là aussi il y a une forme de jouissance maladive)
        Voilà un peu mon avis sur cette question qui n’a pas pour moi, comme tu l’auras compris, la gravité que tu lui donnes. Ce qui est donc important à mon avis c’est de voir qu’elle cache d’autres problématiques bien plus profondes et auxquelles il faut tenter de répondre quand cet acte se répète par trop et finit donc par devenir aliénant et négatif.

        • Claude (homme)

          Bonjour Michaël.
          Bonjour Michaël.

          Merci pour ton investissement.
          Oui, il y a bien plus grave que ces problèmes liés à la masturbation.
          Quoique…

          Va dire à un drogué qu’il y a bien plus grave que les difficultés qu’il rencontre, dues à son addiction, et je ne suis pas sûr que tu l’aides vraiment.

          Je considère, peut-être à tord, que les addictions ont une chose en commun. Cette chose étant une emprise sur l’esprit. Cette emprise utilisant la chair, le plus souvent. Je pense à l’alcool, la drogue, le sexe. Il y en a d’autres, comme le jeu qui semblent se suffire en atteignant l’esprit.
          Bref. Dans tous les cas, il y a emprise sur l’esprit, et elle peut être extrêmement puissance, destructrice, avilissante.

          Tu termines ta lettre par les mots « aliénant et négatif », s’agissant d’un usage intensif et déréglé de la masturbation et, je pense, une grande addiction à la pornographie.

          Or, il s’avère, pour ma part, que je suis concerné par ces derniers critères. Je suis un aliéné, obsédé sexuel, déviant, vicieux, voyeur… La liste serait longue.

          Mais ce qui te paraîtra étrange, vu qu’il est extrêmement question de culpabilisation dans ton courrier, c’est que je ne me sens pas coupable.
          Je suis coupable, tout simplement, sans me sentir coupable.
          Je reconnais mon vice et mes dérives, mais cela s’arrête là.
          La culpabilité n’est pas une marque inscrite sur mon front.
          Je suis un aliéné, un estropié qui véhicule une tare, mais ce n’est pas l’essentiel, car Claude n’est pas ça.
          Il n’est pas ce péché.
          Ce péché n’est pas Claude.
          Car il y a péché. Et c’est bon de l’admettre. Car admettre un dérèglement qui conduit à la faute, c’est déjà là se présenter humblement et recevoir le pardon, la remise en état, la liberté de l’âme.
          Je ne suis pas esclave du péché.
          Pourtant, je suis esclave, possédé.
          Je suis esclave de l’Amour.

          Il m’a fallu certainement du temps, pour être à ce point libre, et tant d’amour de Dieu. Pour pouvoir regarder ce Claude sans l’accabler ; acceptant un état, s’il ne devait changer.

          Paul nous parle assez bien d’un poids, d’une charge qui le blesse en son âme, d’une écharde en sa chair, qu’il devra conserver, et qui le préservera peut-être de l’orgueil si malsain.

          Des supports pornographiques, j’en possède des tonnes, des terra-octés. Je remplis les silos à outrance. Et pour me les fournir, j’ai forcément usé d’autres lieux interdits, comme le téléchargement illicite. Donc, je suis aussi voleur.
          Le problème d’un drogué, d’un joueur invétéré, d’un alcoolique, ne se limite pas à une dépendance. Ce problème déborde au-delà.
          J’ai connu un papa attristé qui me parlait de son fils en me disant : « Vous ne pouvez pas imaginer tout ce qu’il fera pour avoir de l’argent et se fournir sa drogue, et quels dégâts cela peut occasionner dans toute une famille.»

          Et Claude est en paix ; un imbécile heureux qui parle d’amour, de sainteté, de grâce et de bonheur en compagnie de Dieu.

          Et Claude est en paix… qui parle de combat et dénonce le Diable…

          Où s’arrête donc l’aliénation ?
          Où commence la vérité, la liberté, la paix ?

          Je t’ai lu. J’ai lu aussi « Ermort », si Ermort est un nom.
          J’ai repensé au crash, à la tension que tu as dû saisir entre Cat et Claude, à une autre époque.

          Ce site, « Site d’entraide saint Jean-Paul II » est forcément un site à consonance religieuse et spirituelle.
          N’y est-il pas question d’Amour ?

          Ne faisons pas l’impasse sur cet Esprit de Dieu.
          Il est là qui mendie. Il mendie notre Amour qu’Il se meurt tant d’offrir afin que nous aimions.
          « Soyez deux à parler en mon nom et je serai au milieu de vous ».

          Il nous aime. Il est là. Le voulons-nous présent ?
          Ou bien nous suffisons-nous, par nos raisonnements, connaissances, sagesses, intelligences ?
          Ne manquons-nous pas tous d’humilité, oubliant l’Essentiel et oubliant d’aimer ?

          Hier soir, j’avais déjà répondu à ta lettre, dans un assez long courrier, différent, que j’ai écrit en approchant minuit. Et au dernier moment, au moment d’envoyer, le Seigneur m’a freiné. Et j’ai mis de côté.
          Pourtant, j’ai bien aimé.
          Etait-Il bien présent en cette lettre ? That is the question…
          La question que je me dois de me poser sans cesse.

          « Pierre, m’aimes-tu ? » « Va, et paisse mon troupeau ».
          L’un ne va pas sans l’autre.

          Michaël, aimes-tu Claude, Ermort, Cat ?
          Cat, aimes-tu Michaël, Ermort, Claude ?
          Ermort, aimes-tu Cat, Claude, Michaël ?
          Claude, aimes-tu Mes enfants, comme Je t’ai aimé ?

          Avant d’observer l’autre, et même d’écouter, il est bon de s’observer soi.
          L’Amour est-Il en moi ?
          Ou suis-je assez fou pour m’avancer sans Lui ?

          Je parle de combat, d’Ennemi et du Diable, car il y a combat.
          « Si mon Royaume était de ce monde, vous verriez mes Armées… »
          Le voici le « culpabilisateur », l’ennemi. Car notre ennemi, ce n’est jamais l’Eglise, et ce ne sont pas nos frères, les hommes faibles et pécheurs, leur haine et leur mépris.
          Notre Ennemi, c’est lui et c’est lui, l’accusateur, qui se retrouve et doit se retrouver désormais au le banc des accusés. Il a failli. Il est tombé. Et il erre, en colère, haineux et virulent. Mais cependant si malin.

          J’appartiens à l’Eglise, je suis Eglise, et je suis homme faible. Mais à la Tête de ce Corps, mon Maître a vaincu.

          J’ai lu dans le journal du pape Jean XXIII : « Satan est dans le Vatican.»
          Mais Satan n’est pas l’Eglise. Et Jean XXIII a combattu. Et Pierre a combattu, jusqu’au sang versé.
          Respectons notre Eglise et glorifions-La. Ne nous dressons pas contre nous-même et ainsi contre Dieu qui a construit l’Eglise, et La construit sans cesse, ajoutant quelques pierres, jusqu’à la fin des temps.
          Soyons pierres vivantes, en aimant.
          Obéissons à Son Commandement. Et aimons-nous les uns les autres comme Il nous a aimés.

          Mon Seigneur lui-même est Esclave, Esclave de l’Amour qu’Il cherche tant en nous.
          Il est mendiant, dévêtu, malade et souffrant. Il a soif, Il a faim. Il tend la Main, face à tant d’indifférence.

          Aimons-nous les uns les autres, comme Il nous a aimés, car Il est le Chemin.
          Il n’y a qu’un Chemin.

          L’homme peut être sous addiction et cependant aimer, aimer en vérité. Car rien n’est impossible à Dieu. C’est peut-être un essentiel message que j’aimerais passer à mes frères si faibles qui souffrent et qui sont seuls.

          • Anonyme

            Bonjour Claude
            Vos publications datent déjà de quelques mois, mais je m’y dois d’y répondre.

            Je partage l’idée des autres : on doit aller se confesser pour quelconque péché de masturbation. C’est un mal objectif même si la faute subjective elle peut être plus ou moins grande.

            Qu’est-ce donc à dire ? Vous seriez rejeté de la face de Dieu et de l’Église ? Bien non ! Vous dites vous-mêmes que le Christ se fait présent à vous ! N’avez-vous pas soif de plus d’intimité avec votre Seigneur ? Ce que vous goûtez de sa présence, c’est tout petit comparé à la grandeur de l’amour de Dieu! Suis-je en train de vous comparer avec moi ? Pas du tout! Nos péchés nous coupent de la grandeur de l’amour de Dieu!

            Bonne nouvelle alors! Par la confession sans cesse recommencée, le Seigneur nous donne sa grâce… Petit à petit il va vous délivrer des chaînes de votre passion afin que vous soyiez le vrai maître de votre vie ! Libre de choisir le Christ en tout temps au lieu de vous choisir! Déjà, il travaille votre coeur… et une grâce spéciale vous attends en tout temps, lorsque vous tombez !

            Bonne route amoureuse avec le Christ!

            • Claude (homme)

              Bonjour.
              Bonjour.
              Je ne sais pas si vous êtes un garçon ou une fille, et je ne connais pas votre prénom. C’est dommage.

              Me confesser à Dieu.
              Est-ce que je ne le fais pas tous les jours, Lui demandant pardon et récitant le Notre Père?
              Pardonne-moi mes fautes Seigneur, car je T’entends et personne ne pèche contre moi, puisque par Ta Grâce en moi, je parviens au pardon absolu de toute faute commise à mon égard.
              Car pardonner est une grâce. Sans cette grâce qui parvient à aimer l’ennemi, à prier pour le persécuteur?
              Si mon cœur est en paix, que je n’ai pas d’ennemi et que j’aime mes frères, comme Jésus Christ me le demande; s’Il est Lui-Même cet amour en moi à l’égard de ces frères, cela ne suffit-il pas?
              N’est-Il pas Lui mon Avocat auprès du Père, mon Confesseur, comme Il nous l’a promis?
              Ne suis-je pas mort à ce monde, ressuscité en Lui?
              N’est-il pas écrit dans la Sainte Bible que nous avons vaincu le Mauvais?
              Paul était-il ce péché qui l’accablait et ne voulait pas commettre? Etait-il cette écharde ou bien était-il Paul, Apôtre de Notre Seigneur?
              A-t-il changé sa conduite?
              Cette écharde lui a-t-elle été enlevée?
              Ou bien l’a-t-il gardée?

              Sur la croix, je ne suis qu’un larron, et Celui qui est cloué, transpercé, tout près de moi, Celui-là m’aime, et Il me pardonne tous mes péchés. Devrais-je en douter et rencontrer un prêtre?
              Chaque homme est unique.
              Chaque homme est aimé de Dieu.
              “Pierre, m’aimes-tu?”
              Voilà ce qui compte. Aimer en esprit et en vérité. Adorer le Maître, Jésus Christ, le Père, par Son Esprit, le Paraclet que Jésus nous offre, et alors, il n’y a plus de place pour aucun péché. Nous devenons des temples sacrés, habités par l’Esprit de Dieu. C’est ce que Notre Seigneur m’a appris.

              Vous dites, me semble-t-il, que sans la confession sans cesse recommencée, l’homme ne reçoit pas la grâce du pardon. Vous dites donc, (corrigez-moi si je me trompe) que le tête à tête, le face à face avec Jésus Christ ne signifie pas ce qu’il sous-entend et qu’il ne peut suffire, garantir le salut. Libre à vous de le penser, de le croire. Libre à moi de considérer que votre chemin, (votre pensée), que je ne conteste pas, que je ne dénigre pas, n’est pas un chemin exclusif.

              Vos termes : “Libre de choisir le Christ en tout temps au lieu de me choisir…”
              Soit on est avec Lui, soit on est contre Lui. Il n’y a pas d’alternative. Et je L’adore en vérité.
              Ne soyez pas exclusif, intolérant, rigide. Il est vraiment possible de sortir de la barque et de marcher sur l’eau.
              L’Amour est absolu. Il est sans condition autre que l’Amour.
              Je ne suis qu’un serviteur inutile. Cependant, je suis … lorsque beaucoup se cherchent ou suivent un troupeau. Chaque homme est unique et se doit de suivre Jésus Christ.
              Ce n’est pas moi que j’ai choisi, comme vous semblez le dire. Mais c’est bien Lui.
              Concernant l’importance que je m’accorde à moi-même, ma gloire n’est-elle pas à chercher en mes faiblesses, dès lors qu’Il est ma Force et mon Salut?

              Un prénom s’il vous plaît, si vous poursuivez cet échange.
              Christ m’appelle par mon nom. Je suis chrétien.
              Claude

  2. Anonyme

    Bien à vous Claude !
    Lorsque je vous lis mon bien cher ami et frère,
    j’ai l’impression que vous avez atteint la plénitude de l’union au Christ et la plénitude du bonheur ! Mais le Christ peut tellement vous combler infiniment plus encore ! Même si ce que vous goûtez déjà de lui est incroyablement savoureux!

    C’est tout simple à comprendre : Dieu se fait époux de l’âme qui reconnait sa faiblesse… Il s’en fait époux en la sauvant d’elle-même! La femme adultère, Dieu ne la condamne pas !!!! Mais il lui dit : va et ne pèche plus. La femme adultère qui accueille sa Parole en est transformée! Pierre a renié le Christ, mais quand il accueille sa Parole : Pierre, m’aimes-tu ? Il en est transformé. À la Pentecôte, celui qui renie Dieu maintenant l’annonce d’un coeur confiant, et il le fera jusqu’à sa mort !

    Que c’est beau de se faire libérer par le Christ ! C’est en ce sens que je vous dis que la grâce de Dieu est là pour vous! Il ne vous condamne pas, et vraiment, il a son projet sur vous pour vous libérer ! Vous libérer de quoi ? Lorsque l’on se masturbe, on est en train de répondre à une pression d’une émotion ou d’une pensée qui nous pousse intérieurement. En réalité, on n’est pas capable de résister à cette pression intérieure. On en est esclave. Et si on est esclave de cette pensée, c’est donc à dire automatiquement qu’on est également incapable de résister à d’autres pensées. Souvent, les Pères vont dire que le péché de gourmandise est intiment lié au péché de la sexualité. Peut-être ont-ils expérimenté dans leur chair que les deux étaient liés : L’envi irrisistible de se choisir une bonne nourriture et celui de se masturber sous la pression intérieure soit d’une image soit d’un désir de se faire du bien.

    Mais Jésus le dit lui-même de différentes façon : Il ne fait rien de lui-même, Il reçoit tout de la main du Père. Ainsi, lorsque le Seigneur vient nous libérer de notre penchant à se faire du bien soi-même, c’est le Christ et le Père, unis dans leur Esprit, qui viennent en nous, nous faire du bien. Essayez-le, vous verrez que c’est vrai. Juste une fois : Lorsque vous aurez le goût de vous procurez un plaisir, ou de vous enlever une pression ou une angoisse intérieure, vous qui avez une grande foi, placez-vous devant le Bien-Aimé, ouvrez vos bras et dites : Seigneur, soit celui qui vient me combler ! Alors, vous l’expérimenterez dans votre chair : L’amour du Seigneur est tellement suave que le plaisir de la masturbation est infiniment petit comparé à cet amour. À force d’expérimenter ce grand amour de Dieu, un jour, vous courrez à lui de toutes vos forces pour être avec lui… Et alors, la masturbation sera vaincue! Dans le fond, la masturbation et les autres péchés, on les fait parce que l’on a pas goûté encore à l’infini amour de Dieu qui est infiniment plus plaisant et bienfaisant que le bien que je me procure par moi-même. ¨(Et je fais partie moi aussi de ces pécheurs qui ne connaît pas encore l’amour du Seigneur… Et j’espère avoir la grâce de toujours me reconnaître comme tel, afin que de plus en plus, le Seigneur me révèle qui Il est en tout son amour!)

    Pourquoi le prêtre ? Simplement parce que le Seigneur est plus incarné que chacun de nous ! Nous nous voulons allez à Dieu directement, mais lui, il n’aime pas avoir une relation dans les nuages avec nous. Dans l’histoire biblique, il a toujours passé par des personnes : Sa Parole a été écrite par des mains d’hommes, ses prophéties sont passées par des hommes, Jésus est né d’une humble crèche, et d’une humble femme. Puis, les Évangiles ont encore été écrites par des hommes (Il aurait pu le faire lui-même)…
    Surtout, il ne prend pas n’importe quel homme, il choisit les plus faibles, comme les prêtres !

    Évidemment, Dieu peut passer par ailleurs. Mais il sait que lorsque je passe par le prêtre, ça me prend un acte de foi plus grand envers Lui, Dieu… Ça me prend une confiance infinie ! … Et ce petit plus qui me fait mourir à moi-même, en allant bien souvent contre ma volonté-propre – est déjà en soit une guérison !

    Bien à vous !
    Ensemble, pécheurs heureux dans l’amour du Christ !

    Lucie

    • Anonyme

      Chère Lucie,
      Chère Lucie,
      Anonyme (utilisateur non inscrit) – 6 mars, 2018 – 09:57.
      Chère Lucie,

      je vais commencer mon propos comme tu commences le tien, chère amie et sœur en Christ.
      Pour cette raison, j’use du tutoiement, puisque je tutoie Notre Roi et Père et que nous appartenons à cette Saint Famille.

      Ai-je atteint la plénitude de l’union au Christ?
      Je suis rempli par Lui. Et Il adore mon Dieu, Son Père, en cet homme que je suis. Pour moi, je ne peux pas recevoir davantage, car, Il me remplit. Cependant, c’est comme si chaque nouveau jour, Il élargissait mon âme qui de ce fait Le contient davantage. Il grandit en mon âme qui grandit par Lui.

      Tu écris que Notre Amour peut nous combler infiniment plus.
      Ce que je viens d’écrire démontre que je n’en doute pas.
      Je ne suis pas pressé. Nous avons pour nous l’Éternité. Et grâce à Lui, nous sommes déjà ressuscité, et donc, en cette Éternité.
      Je ne suis qu’un larron. Cet état me convient et m’enchante. Il faut de tout, pour tous, afin que chacun se reconnaisse et se sente assimilable à cette grande Famille.
      Oui, je suis une tare, et cela m’enchante. Un jour, tout ce qui est taré en moi passera. Mais jusqu’à ce jour, je suis.

      Ce matin, en pensant à toi, j’ai eu envie de te poser une question. La question la voici : “Saisis-tu la différence si considérable qui existe entre faire et être?”.
      Car ce matin, en lisant les lectures de ce jour, suivies d’un commentaire de saint François de Sales, j’ai vu Notre Seigneur cloué, immobilisé et ne pouvant agir, continuant à être, priant et implorant pour nous.
      J’ai beaucoup aimé cette image, cette vérité. Cloué sur une croix, on peut encore aimer, et toujours pardonner, non pas sept fois, comme le demande si joliment notre Pierre, mais bien infiniment. Et là, je vois l’impuissance de Satan, la toute puissance de mon Dieu.
      Je ne suis qu’un larron, qu’un pécheur et qu’un homme, et, en même temps, je suis. Par Lui, je suis infiniment et tellement puissant. Par la grâce offerte, je peux tout pardonner. Et tout m’est pardonné.
      Je ne dois pas changer. Je ne suis pas pressé. Et mon Seigneur me change quand Il grandit en moi. Ce n’est pas moi qui fais. Par Lui, je suis. Par Lui, je suis unique. Il n’existe qu’un Claude qu’il ne faut surtout pas imiter. Car il est bon d’être. Il est bon d’être unique, original, aimé.
      “Aime et fais ce que tu veux!” ai-je entendu en cette âme qui est la mienne et qui reçoit Dieu.
      Pourquoi espérer davantage?
      Comment espérer davantage… sans témoigner d’ un manque ressenti, et que Dieu, ce Serviteur Fidèle, ne me sert pas comme Il le devrait ?
      Non, le Seigneur me sert à cette Table comme il est bon que je sois servi.
      Non, je ne veux pas davantage. Je veux ce que Lui veut, comme Il le veut. Je n’ai même pas envie de bouger, de faire le moindre geste. Car moins je bouge et mieux Il opère en moi, mieux Il me transforme et me sanctifie.
      Je ne suis qu’un serviteur inutile. Il est Tout. Et je suis.
      Je reconnais ma… et mes faiblesses. Il est mon Époux. Il m’a déjà sauvé. Il m’a émancipé. Et je suis libéré.
      Pire, je suis un hors la Loi, amoureux de la Loi. En mon cœur, je suis Loi. En mon cœur, Il est Amour. Il est le Seul qui règne, malgré ce que je fais, parce que je suis, que je n’aime que Lui; qu’Il pardonne mille fois mille fois; à l’infini; à la mesure de Son amour pour moi.
      Ce Claude est comme l’enfant prodigue qui rentre à la maison, avec un cœur brisé; que le Père enlace et bénit, et qui repart le lendemain dilapider à nouveau les richesses jusqu’au soir où il entre à nouveau. Et Claude ne joue pas. Cependant, Claude est.
      Ce Claude est faiblesse par la chair, et toute puissance, par le cœur.

      Je t’ai tellement parlé de ce Claude, et je l’espère aussi de Dieu. Même si dans mon esprit, en fait, je n’ai parlé que de Lui. Parle-moi donc de toi. Qui es-tu? Et qui est-Il pour toi ?
      Tous les hommes que j’ai côtoyés ne m’ont jamais parlé de Lui comme parle un cœur rempli par Lui, comme Il me parle Lui. Vas-tu me montrer ton cœur, Notre Seigneur en lui? Vais-je L’entendre ? Oseras-tu? Le peux-tu seulement?
      Aime et fais ce que tu veux…
      Je n’ai pas de limites. Peut-être en as-tu?
      De Lucie… de celle à qui je m’adresse en cet instant, il n’en existe qu’une. Révèle-la et sois! Au moins quelques instants. Comme si tu te trouvais dans le Jardin D’Éden et que tu n’aies pas envie de te cacher; comme si tu avançais nue… parce que libre.

      Tu écris que c’est beau de se faire libérer par le Christ. Tu as tellement raison. Avec Ses Membres, Ses Mains, Ses Pieds cloués, Il parvient à me sauver. Et tandis que je cloue sans cesse et à nouveau Ses Membres, en chacun de mes péchés, Il me sauve. Car Il m’aime; car je L’aime, et que Nous sommes Un. Le pécheur et le Sauveur; le larron et Dieu. Et du péché, du Diable qui est péché et père du péché, il ne reste rien. Et il ne reste que la Grâce, la Miséricorde, l’Amour. Tout le reste est brûlé. En ce creuset, il ne reste que le Pur. Il ne reste que ce qui ne brûlera jamais et au contact duquel l’Ennemi se consume, disparaît et n’est plus.
      Nous avançons vers lui. Nous avançons vers l’Ennemi.

      Tous les jours il me pique en ce désert, il me mord, il m’envenime. Tous les jours, je lève les yeux et je contemple mon Roi, la Croix. Et tous les jours, je ne meurs pas ; et tous les jours, je suis. Et je suis, par tout mon être, la preuve, le témoignage de Sa toute Puissance. Il est le Miséricordieux. IL EST.

      Peut-être saisiras-tu le sens de tout ce qui est insensé, ou tout ce qui parait, en l’être que je suis ? Peut-être comprendras-tu à quel point la confiance est vaste et infinie ?

      Tu m’expliques la masturbation. Je te montre un mystère.
      Tu me montres le poison dont semble s’abreuver ma chair, je te montre l’Hostie dont est nourrie mon âme. Car rien n’est impossible à Dieu. Et celui qui Le suit déplace des montagnes.

      Tu dis que Jésus ne fait rien de Lui-même; qu’Il reçoit tout des Mains du Père, et tu dis bien.
      Et que fait Claude de lui-même?
      Souviens-toi de ma question. Faire… et… être.

      Tu écris que l’amour du Seigneur est tellement suave que le plaisir de la masturbation est infiniment petit comparé à cet amour. Et je réponds qu’il n’y a pas de plaisir en la masturbation. Comme il n’y a pas de plaisir à s’infliger la mort, à boire un poison, à se détruire.
      Et je pense à la drogue, à toutes les dépendances.
      L’éphémère n’est pas. Dieu Est.
      Le seul plaisir qui soit se trouve dans la gloire du Nom du Père et dans le salut des enfants de Dieu.

      Lucie, qui es-tu?
      L’as-tu toujours aimé, ce depuis ta naissance, ou L’as-tu rencontré en ton chemin de vie?
      Il n’y a rien d’indiscret en ma demande.

      Jamais je n’ai honte de Lui, ni de Le montrer en moi. Montre-Le moi en toi! Témoigne de ton si grand amour pour Lui. Car, en cet amour que tu Lui portes, tu sais que ce n’est pas toi mais bien Lui qui agit.
      Puisque Jésus ne fait rien de Lui-même, qu’Il reçoit tout des Mains du Père.
      Soyons serviteurs inutiles. Laissons-Le nous servir et glorifier le Nom du Père, l’Amour qui règne en nos cœurs.

      Tu dis : “Pourquoi le prêtre?” et tu ajoutes que le Seigneur n’aime pas avoir une relation dans les nuages avec nous.
      Le Royaume est là Lucie. Nous sommes citoyens du Royaume. Et cette relation que nous partageons avec Lui sur cette montagne où Il se montre, transfiguré, saint, unique, elle n’est pas une relation dans les nuages. Elle est simple vérité. Elle est, comme Lui Est. Et par cette relation, je suis. Je suis uni à Lui. Nous sommes Un.

      Tu penses que les Évangiles ont été écrites par des hommes et qu’Il aurait pu le faire lui-même. Alors que tu dis que Jésus n’a rien fait de Lui-même et que tout a été fait par la Main de Dieu.
      Saisis-tu ton erreur?
      C’est Dieu qui écrit l’Évangile et qui écrit ma vie. C’est l’Amour qui écrit l’Évangile et qui écrit ma vie. C’est l’Esprit Saint qui nous guide et nous conduit. C’est le Verbe de Dieu, Jésus Christ.
      Et pour ce qui est de l’écriture de la vie de Claude, j’ai donné mon amen. Et Jésus est le “nègre” qui écrit et se cache à nos yeux. Comme Dieu a écrit la Vie de Christ, puisque le Christ est Dieu.
      “Non pas ma volonté, mais ta volonté.”
      “Père, pourquoi m’as-tu abandonné?”
      Faire…être…

      Bien à toi Lucie. Bien à toi ma sœur pécheresse. Bien à toi Seigneur qui te caches en chacun de mes frères, de mes sœurs.

      Claude

  3. Anonyme

    Cher Claude
    Merci de ce beau message.

    Je ne vais pas répondre à vos questions. Mon désir était de répondre à l’objectif premier de ce forum. Je ne vais donc pas m’évertuer à essayer d’écrire…

    Alors, vite faite :

    qui je suis ? J’aimerais bien être la personne qui prie sincèrement le Canon de saint André de Crête.

    Qui est Dieu en moi ? Il le sait, et moi, je ne le sais pas… (Si je suis dans la grâce qu’Il m’y garde, et si je ne le suis pas, qu’Il m’y mette).

    Et je termine la conversation ici avec vous. Si vous êtes bien heureux avec le Christ, alors je m’en réjouis avec vous. Je sais toutefois que ce n’est pas le cas pour toute personne, dont celles qui viendront sur ce forum. Donc, dans un futur prochain, je publierai un commentaire pour ceux qui ne vivent pas leur situation de la même façon que vous.

    Bien à vous,

    Lucie

    • Claude (homme)

      Bonne route Lucie.
      Bonne route Lucie.

      A nous revoir en Lui.

      Nous sommes déjà en Lui, cependant, comme les membres d’un corps, il nous semble parfois que nous sommes opposés. Nous ne le sommes pas … opposés, dès lors que l’Amour nous commande, nous dirige, nous unit.

      Merci pour votre intervention, lorsque vous avez ajouté un commentaire. Je ne suis jamais sur ce site. Sauf lorsque je reçois un mail qui m’annonce un message.

      La Vie est merveilleuse.

      Soyez!

      Claude

      Je réalise tout-à-coup que je vous ai vouvoyée. C’est bien. Tout reprend sa place. Car tout est ordonné.

  4. Pelostome

    Un jour, mon ex-femme m’avait raconté une histoire qui l’avait chagrinée. Elle déjeunait au restaurant, et à la table à côté, il y avait deux collègues de travail : un homme, une femme. Sans vouloir être indiscrète, elle avait entendu un peu leur conversation. La collègue femme semblait plaindre très fort son homologue masculin qui faisait état de difficultés dans son couple. Mon épouse d’alors était énervée. Elle prétendait que, sous couvert d’empathie, la collègue féminine tentait de mettre la main sur l’homme. Lorsqu’un homme et une femme se séparent, le premier est souvent pointé du doigt au motif qu’il a trompé son épouse et l’a lâchement abandonnée pour partir avec une autre femme. On se pose rarement la question de ce qu’il a pu endurer de rejets dans sa vie intime avant de se laisser aller à cette extrémité.

    Cela n’est pas été mon cas lorsque ce premier mariage a battu de l’aile. J’ai beaucoup enduré, mais c’est plutôt elle qui a cherché ailleurs. Elle travaillait dans un bar et rentrait tard ; parfois au petit matin. Je faisais de la musique, je regardais un film érotique pour me caresser et m’endormais seul. Dans mon second mariage, la fréquence de notre intimité s’est également lentement érodée même si nous nous aimons toujours très fort.

    Depuis 1990, la notion de viol conjugal est reconnue par la jurisprudence française. Par ailleurs, la notion de harcèlement moral dans le couple est punie par la loi depuis 2010. Cependant, personne ne semble s’être posé la question du harcèlement sexuel dans le couple. D’ailleurs, le Code Civil qui stipule noir sur blanc que « les époux s’obligent mutuellement à une communauté de vie » semble légitimer totalement la notion de « devoir conjugal » promu pendant des siècles par l’Église au service de la bourgeoisie bien-pensante et patriarcale.

    Ainsi, chaque fois que je mendie en vain quelques miettes d’amour physique à ma moitié, je tremble qu’un jour, excédée, elle me traîne devant le juge en m’accusant de harcèlement sexuel, et que je sois reconnu publiquement coupable, condamné et puni. Autant vous dire que, pour elle, le fait que je m’adonne à la masturbation quand elle est trop fatiguée, trop énervée, trop malade, trop obnubilée par son boulot, trop heureuse de sortir entre filles avec ses copines, ses collègues, ses ex-collègues, ses ex-amies de fac… ça ne la dérange pas vraiment. Au contraire.

    Nous vivons dans un monde de dingues. Nous sommes soumis à un stress incessant. Nous pouvons en mourir physiquement (ça a failli être mon cas). Si nous avons la chance de ne pas trop ressentir de souffrance physique, nous en ressentons sur le plan psychologique, intellectuel, affectif, spirituel… Pour faire face à cette agression permanente de ce que Jean appelle « le monde », il existe un moyen simple, sain, naturel, présent depuis des millénaires dans le règne animal sans que personne ne s’en offusque : l’orgasme.

    On a longtemps prétendu que l’Église est totalement dégoûtée par l’amour charnel, et ne le tolère que parce qu’il est nécessaire à la procréation. Je pense sincèrement que c’est inexact. Aujourd’hui, le catéchisme de l’Église catholique reconnaît avec force la beauté et la profondeur de l’orgasme entre époux.

    Uniquement entre époux. Jamais seul. Toujours à deux. Jamais à plus de deux. Et, normalement, d’après la stricte interprétation du dogme, uniquement dans le mariage. On ne compte plus le nombre de chrétiens pratiquants qui devraient, en toute bonne logique, être interdits de communion parce qu’ils ne sont pas mariés. A l’église. S’ils sont mariés civilement, ça ne compte pas. Qui les accuse ? Qui les enjoint à aller d’urgence se confesser ? A faire cesser au plus vite ce scandale en se mariant sur le champ ?

    La réalité, c’est qu’on en revient au paragraphe précédent : l’Église célèbre, glorifie, exalte l’amour charnel uniquement en tant que signe de l’amour spirituel. Ainsi, pour les Juifs, le chef-d’œuvre de poésie érotique qu’est le Cantique des Cantiques se doit d’être lu exclusivement comme la relation d’amour entre Dieu et son Peuple. Que dire d’ailleurs de la prière nuptiale de Tobie et Sara ! Grosso modo, s’ils s’unissent devant Dieu, ils jurent que ce n’est absolument pas par désir sexuel, mais pour respecter la Torah… ce sont ces Roméo et Juliette bibliques qui sont cités en exemple aux fiancés ! Et si les Chrétiens avaient des velléités de modernisme, Paul enfonce le clou au plus profond de nos poignets : « Ce mystère est grand : je le dis en référence au Christ et à l’Église ».

    Ainsi, Louis et Zélie Martin constituent un cas exceptionnellement ahurissant, puisqu’il s’agit du seul et unique couple à avoir été canonisé, alors même qu’ils avaient, au début de leur mariage, choisi délibérément de vivre dans la continence perpétuelle… ce qui, techniquement, aurait dû entraîner de facto la nullité pure et simple de leur union devant Dieu, par défaut du pilier « Ouverture à la vie », autrefois dénommé « Fécondité ». Grâce soit rendue à leur confesseur qui les en a dissuadés ; sinon, nous n’aurions jamais eu Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus !

    Il est cependant très révélateur de les voir canonisés : on ne saurait mieux marquer la condescendance de l’Église pour le sexe ; ce n’est pas sale, ce n’est pas mauvais, ce n’est pas un péché. C’est juste que, pour l’Église, le sexe en lui-même, sans amour marié, spirituel, fécond et pratiquant, le sexe pour le sexe, quoi, ce n’est même pas l’abomination de la désolation : c’est nul et non avenu, bestial, animal, indigne de l’être humain.

    C’est le dénominateur commun à toute vie, l’activité la plus naturelle qui soit, et Dieu sait combien l’Église adore la nature (tout ce qui n’est pas naturel est suspect, car Dieu seul est au-dessus des lois de la nature, et toute tentative humaine de dépasser la nature est entachée du soupçon d’idolâtrie, c’est-à-dire d’auto-déification de l’homme).

    Ah, oui, mais non. La masturbation peut être couramment répandue parmi les animaux sans que ça ne dérange personne. Parce que les animaux sont considérés par l’Église comme strictement inférieurs aux humains. Ils ne sont pas soumis à la conscience. Comme ils n’ont pas conscience que la masturbation est un désordre grave qui dénature profondément l’amour insufflé par Dieu, ils échappent au péché et n’ont pas besoin d’aller se confesser.

    Pour les confesseurs et les moralisateurs, la masturbation est une bénédiction. Son attrait est extrêmement puissant parce que c’est Dieu lui-même qui l’a répandue à profusion dans sa Création. Je ne voudrais pas dire que personne ne peut y échapper. Je pense juste que les êtres humains ne sont pas tous égaux à ce niveau. Mais on nous a enfoncé à coup de burin dans le crâne que c’est un péché. Donc il faut le confesser ; et pour être absous, il faut manifester la ferme volonté de s’en défaire. Seulement, comme on y revient toujours, on est alors en état de dette perpétuelle. Il n’y a sans doute aucun meilleur moyen de maintenir les croyants en état de dépendance et de soumission.

    On pourrait peut-être s’interroger sur les effets à long terme de cette attitude. Se demander si la chute vertigineuse des vocations, des mariages, des baptêmes même, n’est pas liée à un certain réflexe de survie face à des magistères qui « chargent les gens de fardeaux impossibles à porter ».

    Ma femme a un besoin impérieux, quasi vital, de massages. Je ne compte plus les heures que je passe sur le canapé à lui masser le pied, les jambes, les genoux, devant des inepties débilitantes à la télévision qu’elle-même finit par ne plus regarder car elle s’endort sous l’effet de mes massages.

    Moi, j’ai besoin de sexe, et j’ai l’impression d’être mal payé en retour. Et si je tente maladroitement de m’accorder moi-même ce qui me fait défaut, je me rends coupable du plus abominable des crimes : je m’octroie souverainement une étincelle divine préfiguratrice du Paradis sans que cela me soit donné par un(e) autre, donc je me fais Dieu moi-même. « Dieu s’est fait homme pour que l’homme devienne Dieu » ; certes, mais à une condition : que l’homme ressasse éternellement et inlassablement sa misérable et méprisable condition de pécheur dans les siècles des siècles.

    Il y a environ une dizaine d’années, un collègue m’avait rapporté qu’un jeune Toulousain avait reçu un appel téléphonique du Pape François après lui avoir écrit ses doutes du fait qu’il était chrétien et homosexuel. « Ton homosexualité, on s’en fiche ; il faut continuer à être bon », lui aurait dit François. Le Vatican a démenti. Le Vatican est prêt à concéder que François appelle parfois de manière impromptue des personnes privées, mais sur des sujets où le consensus sur le bien et le mal est plus facile à établir : une jeune fille violée, une mère célibataire refusant d’avorter… Du coup, pour moi, le doute subsiste sur ce démenti.

    Il est bien entendu hors de question que j’attende un appel du Vatican. Je voudrais juste entendre une fois, en confession : « La masturbation, on s’en fiche. Ce qui compte, c’est l’amour que vous témoignez envers votre épouse ».

    Quel prêtre de l’Église Catholique, c’est-à-dire de l’Assemblée Universelle de l’Amour, osera proférer un tel blasphème ?

    • Cat-modératrice

      Bonjour Pelostome, merci de nous partager votre témoignage, vos interrogations et vos indignations. Votre commentaire est très long, je vais essayer de répondre à certains passages en les recopiant ici.

      Ainsi, chaque fois que je mendie en vain quelques miettes d’amour physique à ma moitié, je tremble qu’un jour, excédée, elle me traîne devant le juge en m’accusant de harcèlement sexuel, et que je sois reconnu publiquement coupable, condamné et puni.

      Je pense que la condamnation du viol conjugal et du harcèlement moral dans le couple, par la loi, ne conduit pas forcément à la condamnation d’un harcèlement sexuel dans le couple. Le viol comme le harcèlement moral sont des actes de violence ayant pour but de blesser l’autre. Des demandes fréquentes de relations sexuelles ne peuvent pas être considérées comme telles, au sein d’un couple, à moins d’être accompagnées d’un réel harcèlement moral, c’est-à-dire si le conjoint a recours à des humiliations, à des menaces ou à des violences pour pousser son conjoint à accepter.

      Avez-vous discuté avec votre femme du fait que vous souffrez du manque de relations sexuelles ? Dans un couple, il est rare que les deux conjoints aient les mêmes besoins, que ce soit sur le plan sexuel ou sur tous les autres plans de la vie commune. Quand deux époux s’aiment, ils essaient à la fois de faire comprendre leurs besoins à l’autre, et de comprendre les besoins de l’autre. Celui qui a moins envie de relations sexuelles peut, par amour, essayer de s’ouvrir aux besoins sexuels et affectifs de son conjoint. Le conjoint qui est en demande, peut, par amour aussi, essayer de comprendre les besoins de l’autre et les raisons de la distance que l’autre a tendance à mettre. Déjà s’écouter vraiment, échanger sur ces questions est un premier pas d’amour. En général, dans un couple qui s’aime, les deux font des efforts pour faire du bien à l’autre. Bien sûr, parfois le dégoût vis-à-vis des relations sexuelles peut venir de raison très profondes, par exemple de violences subies dans le passé. Dans ce cas-là, il n’est souvent pas souhaitable que la personne blessée se force.

      On a longtemps prétendu que l’Église est totalement dégoûtée par l’amour charnel, et ne le tolère que parce qu’il est nécessaire à la procréation. Je pense sincèrement que c’est inexact. Aujourd’hui, le catéchisme de l’Église catholique reconnaît avec force la beauté et la profondeur de l’orgasme entre époux.

      C’est le jansénisme, hérésie condamnée par l’Église, qui considérait que la sexualité était une concession pour avoir des enfants. La doctrine officielle de l’Église a toujours considérée que la sexualité était voulue par Dieu et bonne, si on la vivait selon le dessein de Dieu. Malheureusement, certains théologiens même non jansénistes ont aussi eu un regard négatif sur la sexualité, mais cela n’a jamais été entériné dans l’enseignement officiel de l’Église. Par exemple, saint Augustin, qui se repentait d’un passé dans la recherche du plaisir, a eu par contrecoup une vision plutôt négative de la sexualité.

      Par contre, il est vrai que jusque dans le Code de Droit Canonique de 1917, l’Église enseignait que la procréation était le seul but de la sexualité. C’était en contradiction avec le fait que les personnes stériles ou les femmes ménopausées avaient le droit de se marier et d’avoir des relations sexuelles. Heureusement, l’Église catholique a officiellement changé de point de vue sur cette question, et enseigne que l’union d’amour des époux est aussi l’un des buts de la sexualité. Voir mon article La procréation est-elle le but de la sexualité.

      Uniquement entre époux. Jamais seul. Toujours à deux. Jamais à plus de deux. Et, normalement, d’après la stricte interprétation du dogme, uniquement dans le mariage.

      En effet, c’est ce qu’enseigne et demande l’Église catholique.

      On ne compte plus le nombre de chrétiens pratiquants qui devraient, en toute bonne logique, être interdits de communion parce qu’ils ne sont pas mariés. A l’église. S’ils sont mariés civilement, ça ne compte pas. Qui les accuse ? Qui les enjoint à aller d’urgence se confesser ? A faire cesser au plus vite ce scandale en se mariant sur le champ ?

      En effet, les chrétiens qui ont des relations sexuelles hors mariage ne devraient pas communier. Cependant, ceux qui donnent la communion ne peuvent pas se renseigner sur la vie privée de ceux qui viennent communier : « Avez-vous trompé votre conjoint depuis votre dernière confession ? » Il est vrai que si un prêtre connaît quelqu’un dans sa paroisse qui est dans une telle situation, il est sensé lui demander de ne pas communier, ou plutôt de communier uniquement spirituellement.

      Par ailleurs, il ne servirait à rien qu’ils aillent se confesser d’urgence, s’ils n’ont pas l’intention de cesser la situation amoureuse dans laquelle ils sont. Si quelqu’un a une relation amoureuse avec une personne mariée, par exemple, il ne peut pas recevoir l’absolution tant qu’il n’aura pas rompu cette relation. Ce qui ne l’empêche pas d’aller à la messe sans communier, et d’avoir une relation avec Dieu.

      Quant à se marier sur le champs (je sais que c’était une proposition humoristique), le pape François s’oppose clairement aux mariages qui ont pour but de régulariser une situation, même quand il y a un enfant.

      Ainsi, pour les Juifs, le chef-d’œuvre de poésie érotique qu’est le Cantique des Cantiques se doit d’être lu exclusivement comme la relation d’amour entre Dieu et son Peuple.

      Saint Jean-Paul II affirmait, dans ses enseignements sur la théologie du corps, que le Cantique des Cantique devait être avant tout compris comme une ode à l’amour humain dans sa dimension sexuelle. Le poème pouvait aussi être compris dans un sens spirituel, mais c’était un sens second. Je pense que pour beaucoup de Juifs, il doit en être ainsi. L’Ancien Testament ne montre vraiment pas de mépris vis-à-vis de l’amour charnel.

      Ainsi, Louis et Zélie Martin constituent un cas exceptionnellement ahurissant, puisqu’il s’agit du seul et unique couple à avoir été canonisé, alors même qu’ils avaient, au début de leur mariage, choisi délibérément de vivre dans la continence perpétuelle… ce qui, techniquement, aurait dû entraîner de facto la nullité pure et simple de leur union devant Dieu, par défaut du pilier « Ouverture à la vie », autrefois dénommé « Fécondité ». Grâce soit rendue à leur confesseur qui les en a dissuadés ; sinon, nous n’aurions jamais eu Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus !

      Il est cependant très révélateur de les voir canonisés : on ne saurait mieux marquer la condescendance de l’Église pour le sexe ; ce n’est pas sale, ce n’est pas mauvais, ce n’est pas un péché. C’est juste que, pour l’Église, le sexe en lui-même, sans amour marié, spirituel, fécond et pratiquant, le sexe pour le sexe, quoi, ce n’est même pas l’abomination de la désolation : c’est nul et non avenu, bestial, animal, indigne de l’être humain.

      Louis et Zélie Martin sont les premiers époux canonisés en tant que couple, mais il y a aussi les époux Quattrocchi qui ont été béatifiés, et au moins deux autres couples dont la cause est en cours.

      En canonisant Louis et Zélie Martin, l’Église ne donne pas pour exemple leur abstinence des premiers temps. Il y a d’ailleurs un autre couple que l’Église a refusé de canoniser parce qu’ils avaient vécu une telle abstinence. La décision de Louis Martin, acceptée douloureusement par Zélie, de vivre cette abstinence, était une erreur. Leur confesseur le leur a fait comprendre, et le nombre d’enfants qu’ils ont eus par la suite, 9 en tout, montre qu’ils n’ont plus hésité à vivre cette dimension essentielle de l’amour conjugal.

      D’autre saints ont été canonisés malgré des erreurs et des péchés. Certains ont vécu dans la débauche, et leur canonisation n’est pas un encouragement à vivre dans la débauche.

      Ah, oui, mais non. La masturbation peut être couramment répandue parmi les animaux sans que ça ne dérange personne. Parce que les animaux sont considérés par l’Église comme strictement inférieurs aux humains. Ils ne sont pas soumis à la conscience. Comme ils n’ont pas conscience que la masturbation est un désordre grave qui dénature profondément l’amour insufflé par Dieu, ils échappent au péché et n’ont pas besoin d’aller se confesser.

      Les animaux ont aussi des relations sexuelles hors mariage, ils tuent d’autres animaux, ils volent la nourriture des autres animaux, etc. En effet, pour tout cela ils n’ont pas besoin de se confesser.

      Donc il faut le confesser ; et pour être absous, il faut manifester la ferme volonté de s’en défaire. Seulement, comme on y revient toujours, on est alors en état de dette perpétuelle. Il n’y a sans doute aucun meilleur moyen de maintenir les croyants en état de dépendance et de soumission.

      La masturbation est donc le seul péché dans lequel vous retombez sans cesse ? Jésus nous a enseigné à prendre conscience de notre faiblesse et à accueillir le pardon de Dieu tout au long de notre vie. Il dit que celui qui pense ne pas avoir besoin de pardon ne peut pas devenir proche de Dieu, contrairement à celui qui a conscience qu’il a besoin d’être pardonné. Ce chemin d’accueil de la miséricorde de Jésus est l’essentiel de la vie spirituelle.

      On pourrait peut-être s’interroger sur les effets à long terme de cette attitude. Se demander si la chute vertigineuse des vocations, des mariages, des baptêmes même, n’est pas liée à un certain réflexe de survie face à des magistères qui « chargent les gens de fardeaux impossibles à porter ».

      Si vous regardez l’histoire de l’Église, et la géographie de l’Église, vous relativiserez peut-être cette chute. Pendant deux millénaires, l’Église a proposé les mêmes « fardeaux » qu’aujourd’hui, et même des fardeaux plus lourds encore qu’aujourd’hui dans certains domaines. La chute en question n’a eu lieu que depuis moins d’un siècle, uniquement dans les pays occidentaux. Il est nécessaire de s’interroger sur les raisons de cette chute, mais rien ne permet de dire que tout d’un coup le fardeau est devenu trop lourd juste pour les chrétiens occidentaux. En tout cas cela ne suffit pas comme explication.

  5. Pelostome

    Bonsoir,

    vous êtes un vrai puits de science. Je connaissais le terme « jansénisme » mais n’avais aucune idée de ce que cela recouvrait. Il faudra que j’approfondisse la question. C’est étrange, d’ailleurs : ce que vous m’en dites m’évoque justement la prière nuptiale de Sarah et Tobie.

    La dernière partie de votre réponse m’a fait penser à un livre que j’avais lu, écrit par un historien, qui établissait un lien entre le refus de l’absolution des hommes qui pratiquaient le coït interrompu et la désaffection des églises. J’ai voulu savoir si le sujet avait déjà été abordé. J’ai vu que vous avez eu de longs échanges sur ce point en réponse à la question « Morale sexuelle en rapport avec les sacrements : questionnement ». Je n’ai pas grand-chose à ajouter sur la contraception physique/chimique vs les méthodes naturelles, mais à la réflexion, ce n’est pas forcément la seule cause.

    Je constate effectivement que la désaffection religieuse touche principalement les pays occidentaux et industrialisés. Autant que je puisse en juger, l’Afrique semble beaucoup plus religieuse. En même temps, j’ai l’impression qu’il y a sur ce continent une pression sociale importante quant à la virilité de l’homme, celle-ci s’exprimant entre autres par des relations extra-conjugales. Ainsi, le succès de la série « Maîtresse d’un homme marié » en Afrique s’explique par le fait qu’elle décrit précisément, voire crûment, un phénomène de société à la fois tabou et répandu.

    Il existait une expression française aujourd’hui tombée en désuétude : « Entretenir une danseuse »; si j’ai bien compris de quoi il s’agit, le terme « danseuse » désignait une maîtresse dont l’amant, marié par ailleurs, réglait toutes les dépenses. La société considérait cela comme normal. L’homme était excusé quant aux relations extra-conjugales au motif qu’il avait des besoins, des pulsions, qu’il ne pouvait pas contenir. J’insiste sur le fait que cela ne concerne pas notre monde moderne accusé de toute part d’« hédonisme ambiant », mais bien une conception datant de plusieurs siècles, profondément enracinée dans le patriarcat.

    Aujourd’hui, une infidélité est un motif de divorce. En quelque sorte, c’est une victoire des femmes sur le patriarcat. Je pense que nous avons gagné en honnêteté. Le remariage étant proscrit par l’Église, il me semble normal que la société, par souci d’honnêteté, délaisse cette doctrine, laquelle reste largement embrassée dans d’autres pays où l’exigence sociale d’honnêteté n’a pas atteint le même niveau.

    Pour en revenir à notre sujet, j’ai lu plusieurs fois sur ce site que la masturbation est considérée comme moins grave que l’adultère. Pour autant, d’après les échanges longs et passionnés sur le sujet, l’honnêteté par rapport à la doctrine de l’Église demanderait de renoncer à l’absolution et à la communion à partir du moment où on ne souhaite pas renoncer à la masturbation. Du fait que ce qui est présenté comme un péché gravement désordonné par le Magistère correspond pour moi à une attitude pleinement naturelle et susceptible d’atténuer la souffrance que nous inflige le stress ambiant, c’est difficile de faire un choix entre l’hypocrisie et l’abandon de l’Église.

    • Cat-modératrice

      Bonjour Pelostome,

      Le rejet de la sexualité n’est qu’un des aspects du jansénisme. Une question a déjà été posée à ce sujet sur le site : « Qu’est-ce que le jansénisme ».

      En ce qui concerne la prière de Tobie avec Sarah, je ne la comprends pas du tout comme vous. Voici le texte de sa prière :

      Tu es béni, Dieu de nos pères,
      et ton Nom est béni
      dans tous les siècles des siècles!
      Que te bénissent les cieux,
      et toutes tes créatures
      dans tous les siècles ! C’est toi qui as créé Adam,
      c’est toi qui as créé Ève sa femme,
      pour être son secours et son appui,
      et la race humaine est née de ces deux-là. C’est toi
      qui as dit :
      Il ne faut pas que l’homme reste seul,
      faisons-lui une aide semblable à lui. Et maintenant, ce n’est pas le plaisir
      que je cherche en prenant ma sœur,
      mais je le fais d’un cœur sincère.
      Daigne avoir pitié d’elle et de moi
      et nous mener ensemble à la vieillesse ! (Tobie 8, 5-7)

      Pour moi cette prière n’exprime pas du tout un rejet de la sexualité. Il insiste sur la communion entre les époux. Tobie dit que son but n’est pas de tirer du plaisir de cette union avec Sarah, mais de vivre une union d’amour dans le respect. Cela ne veut pas dire qu’il rejette le plaisir. Cela veut dire qu’il  ne veut pas l’utiliser comme un objet sexuel.

      Aujourd’hui, une infidélité est un motif de divorce. En quelque sorte, c’est une victoire des femmes sur le patriarcat. Je pense que nous avons gagné en honnêteté. Le remariage étant proscrit par l’Église, il me semble normal que la société, par souci d’honnêteté, délaisse cette doctrine, laquelle reste largement embrassée dans d’autres pays où l’exigence sociale d’honnêteté n’a pas atteint le même niveau.

      Je ne pense pas que vouloir être fidèle à l’engagement du mariage soit un manque d’honnêteté. Je pense qu’il n’est pas inévitable qu’un homme soit infidèle à sa femme, ou une femme à son mari. Mais même en cas d’infidélité, le pardon est possible, c’est ce qu’enseigne l’Évangile. Quand il y a un péché, il y a la possibilité d’un cheminement de pardon. Ce n’est pas un manque d’honnêteté, un pardon constructif suppose une reconnaissance du mal commis et une volonté d’essayer de ne pas recommencer. Cela ne signifie pas qu’une femme doive accepter que son mari entretienne « une danseuse ». Si l’un des deux conjoint refuse de respecter l’autre, la séparation peut être nécessaire. Dans ce cas, il faut aussi se poser la question de la validité du mariage. Par exemple, si un homme ou une femme s’est marié en n’ayant pas l’intention d’être fidèle, alors le mariage n’est pas valide.

      Du fait que ce qui est présenté comme un péché gravement désordonné par le Magistère correspond pour moi à une attitude pleinement naturelle et susceptible d’atténuer la souffrance que nous inflige le stress ambiant, c’est difficile de faire un choix entre l’hypocrisie et l’abandon de l’Église.

      Beaucoup de catholiques sont dans des situations où ils n’ont pas le droit de communier matériellement, mais souvent ils peuvent communier spirituellement. À vous de décider si vous voulez rester dans l’Église en renonçant à la communion matérielle, où si vous considérez cette interdiction de communier comme inadmissible.

      • Pelostome

        Bonjour,

        l’article sur le jansénisme est très intéressant. Si je comprends bien, la désaffection de la société occidentale pour la religion chrétienne serait plus ancienne que je pensais, et trouverait – au moins en (grande) partie – ses racines dans cette hérésie. Je ne sais pas si je dois trouver cela rassurant.

        Les traductions sont un sacré souci. Si c’est vrai pour Saint-Jean de la Croix, c’est également ardu pour la prière de Tobie. Je lis « Ce n’est pas par plaisir que je prends ma sœur » et vous me dites qu’il ne rejette pas le plaisir (au passage, le terme « ma sœur » est surprenant quand on connaît la force du tabou de l’inceste, et pourrait laisser croire à un choix de continence : « vivre comme frère et sœur »). Peut-être voulez-vous exprimer que Tobie ne recherche ni ne rejette le plaisir, que l’important pour lui, c’est l’amour spirituel, et qu’il prend le plaisir qui vient avec l’amour ? A la réflexion, c’est assez bizarre ; je pensais plutôt que dans la nature, la sexualité venait en premier, et qu’avec l’éclosion de la conscience, celle-ci pouvait, dans certaines conditions, donner naissance à l’amour. Physiologiquement parlant, ça me semble plus cohérent.

        Cela m’évoque un écrit du Père Guy Gilbert, dans les années 1980. Si je me souviens bien, Jean-Paul II avait exhorté les chrétiens en ces termes : « Chrétien, ne regarde pas ta femme avec concupiscence », et les commentateurs avaient interprété : « Le pape a dit qu’il est interdit de désirer sa femme ». Guy Gilbert avait d’abord redonné le sens du mot « concupiscence » : non pas « désirer », mais « considérer l’autre comme un objet ». Ca rejoint ce que vous exprimez ; mais dans le même élan, le « prêtre des loubards » regrettait que l’Église utilise un langage suranné, que les gens ne comprennent pas, et qui finit par les induire en erreur.

        Il me semble que la vraie fracture avec la société est insurmontable car l’Église, comme on le voit dans la prière de Tobie, subordonne la sexualité à l’amour, et même à l’amour spirituel et religieux. Si un homme et une femme, tous les deux libres, se rencontrent, se plaisent, se séduisent, font l’amour et reprennent chacun leur route au petit matin, du moment que ce plaisir mutuel a été partagé dans le respect, la tendresse, la joie, l’attention à l’autre et à son désir, la complicité – c’est-à-dire, en fin de compte : chacun considérant l’autre comme un être humain et non un objet – personnellement, je trouverai cela merveilleux ; et ce que vous me dites revient à affirmer que l’Église trouve cela abominable car cela ne prend pas place dans le mariage. Je conçois qu’on puisse faire respectueusement remarquer aux amants libres que toute cette beauté pourrait s’ouvrir sur quelque chose d’encore plus grand ; j’ai du mal à accepter qu’on la salisse au motif que l’homme et la femme choisissent simplement de rester en-deça.

        Affirmer avec force : « Non, la sexualité n’est pas intrinsèquement mauvaise, au contraire, elle est voulue par Dieu et donc intrinsèquement bonne, mais uniquement dans le cadre du mariage, sinon, elle redevient – on se demande par quel miracle – immédiatement, obligatoirement et automatiquement mauvaise et dépravée », ne serait-ce pas, quelque part, remplacer une certaine forme de jansénisme par une autre ?

        • Pelostome

          Bonsoir,

          je vous prie de m’excuser d’avoir mal relu la phrase qui me pose souci dans la prière de Tobie : « Ce n’est pas le plaisir que je cherche en prenant ma sœur, mais je le fais d’un cœur sincère », et non pas « Ce n’est pas par plaisir que je prends ma sœur ».

          Le sens est effectivement différent et se lit bien comme une invitation au respect de l’autre en tant que personne. Je suis désolé de tâtonner ainsi. J’avance pas à pas, souvent de manière circulaire en creusant ma pensée.

          Je m’aperçois, cela dit, que cette invitation au respect ne remet pas en question le reste de ma réflexion ; elle le renforcerait plutôt.

          • Cat-modératrice

            Bonjour Pelostome,

            Pour répondre à vos deux commentaires postés ci-dessus :

            l’article sur le jansénisme est très intéressant. Si je comprends bien, la désaffection de la société occidentale pour la religion chrétienne serait plus ancienne que je pensais, et trouverait – au moins en (grande) partie – ses racines dans cette hérésie. Je ne sais pas si je dois trouver cela rassurant.

            Ce qui est rassurant, c’est que le jansénisme a été vraiment dépassé dans l’Église, à part de rares exceptions. C’est en grande partie Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus qui a permis de se libérer de ce courant de pensées. Les reproches que vous faites aujourd’hui au catholicisme concernant les interdits sexuels ne prennent pas leur source dans le jansénisme. Ils existent depuis les débuts du christianisme et normalement n’ont rien à voir avec la peur de Dieu.

            Je vous prie de m’excuser d’avoir mal relu la phrase qui me pose souci dans la prière de Tobie : « Ce n’est pas le plaisir que je cherche en prenant ma sœur, mais je le fais d’un cœur sincère », et non pas « Ce n’est pas par plaisir que je prends ma sœur ».
            Le sens est effectivement différent et se lit bien comme une invitation au respect de l’autre en tant que personne. Je suis désolé de tâtonner ainsi. J’avance pas à pas, souvent de manière circulaire en creusant ma pensée.
            Je m’aperçois, cela dit, que cette invitation au respect ne remet pas en question le reste de ma réflexion ; elle le renforcerait plutôt.

            Du coup, je ne comprends plus très bien ce que vous voulez dire, car vous dites que le sens est différent, qu’ils se lit comme une invitation au respect de l’autre en tant que personne, mais que cela renforcerait plutôt votre réflexion. Qu’est-ce qui renforcerait quoi ?

            Cela m’évoque un écrit du Père Guy Gilbert, dans les années 1980. Si je me souviens bien, Jean-Paul II avait exhorté les chrétiens en ces termes : « Chrétien, ne regarde pas ta femme avec concupiscence », et les commentateurs avaient interprété : « Le pape a dit qu’il est interdit de désirer sa femme ». Guy Gilbert avait d’abord redonné le sens du mot « concupiscence » : non pas « désirer », mais « considérer l’autre comme un objet ». Ca rejoint ce que vous exprimez ; mais dans le même élan, le « prêtre des loubards » regrettait que l’Église utilise un langage suranné, que les gens ne comprennent pas, et qui finit par les induire en erreur.

            Le problème est qu’il faut souvent choisir entre être précis et juste, et être facile d’accès. Il est normal que les papes choisissent parfois d’être très précis, quitte à être ardus, pour définir la doctrine catholique, et alors c’est aux prêtres et aux catéchistes de retransmettre de la manière la plus appropriée pour chacune.

            Si un homme et une femme, tous les deux libres, se rencontrent, se plaisent, se séduisent, font l’amour et reprennent chacun leur route au petit matin, du moment que ce plaisir mutuel a été partagé dans le respect, la tendresse, la joie, l’attention à l’autre et à son désir, la complicité – c’est-à-dire, en fin de compte : chacun considérant l’autre comme un être humain et non un objet – personnellement, je trouverai cela merveilleux ; et ce que vous me dites revient à affirmer que l’Église trouve cela abominable car cela ne prend pas place dans le mariage. Je conçois qu’on puisse faire respectueusement remarquer aux amants libres que toute cette beauté pourrait s’ouvrir sur quelque chose d’encore plus grand ; j’ai du mal à accepter qu’on la salisse au motif que l’homme et la femme choisissent simplement de rester en-deça.

            L’Église enseigne que Dieu a créé la sexualité pour qu’elle soit vécue dans une alliance entre les deux époux et Dieu. Ceux qui vivent la sexualité autrement n’entrent pas dans la proposition de Dieu pour l’homme. L’Église ne juge pas les personnes qui veulent vivre la sexualité autrement — à une époque ce jugement existait bien, mais plus maintenant, en tout cas pas dans l’enseignement officiel de l’Église —, mais elle prévient que cela ne correspond pas au plan de Dieu pour les êtres humains, à la proposition de bonheur pour les êtres humains. L’Église prévient aussi que ces relations sexuelles peuvent avoir des conséquences pour autrui, si un enfant est conçu. Et cela peut se produire même sous pilule. Ceux qui vivent la sexualité hors du mariage ne doivent normalement pas communier, car ils n’entrent pas dans la proposition d’alliance de Jésus.

            Affirmer avec force : « Non, la sexualité n’est pas intrinsèquement mauvaise, au contraire, elle est voulue par Dieu et donc intrinsèquement bonne, mais uniquement dans le cadre du mariage, sinon, elle redevient – on se demande par quel miracle – immédiatement, obligatoirement et automatiquement mauvaise et dépravée », ne serait-ce pas, quelque part, remplacer une certaine forme de jansénisme par une autre ?

            L’alliance entre la femme et l’homme, avec Dieu, est au cœur de l’enseignement biblique et chrétien. L’enseignement de Jésus sur le mariage est au cœur de son enseignement. Ses apôtres ont d’ailleurs été choqués et dit qu’il ne vaudrait mieux pas se marier, s’il n’était pas possible de divorcer. Ce message de Jésus n’est pas une condamnation envers ceux qui ne vivent pas la sexualité comme il le propose, c’est une invitation envers ceux qui veulent entrer dans l’alliance qu’il est venue proposer. C’est une proposition de bonheur, on ne force personne à l’accepter.

            • Pelostome

              Bonjour,

              je vais reprendre la prière de Tobie car c’est important. Au début, j’avais lu « Ce n’est pas par plaisir que je prends ma sœur », ce que j’avais interprété comme « Je n’éprouve aucun désir pour cette femme, je la prends uniquement pour sacrifier au rituel du mariage ». En relisant, j’ai vu « Ce n’est pas le plaisir que je cherche en prenant ma sœur, mais je le fais d’un cœur sincère » ; ce que j’ai compris de cette phrase, c’est : « Je ne considère pas ma femme comme un objet de plaisir, mais mon désir la considère sincèrement comme un authentique être humain ».

              C’est pour cela qu’elle renforce ma réflexion : le respect est la base de tout. D’où l’exemple que j’ai mis en exergue : un homme et une femme qui partagent un moment de plaisir dans le respect, sans prétention d’engagement. Certes, c’est un exemple poussé à l’extrême car le plaisir partagé, qui plus est dans le respect, suscite souvent des sentiments, mais qui peut se concevoir.

              Votre réponse est intéressante à mettre en relation avec la phrase de Jean-Paul II : « Chrétien, ne regarde pas ta femme avec concupiscence ». S’il prononce cette phrase, c’est qu’il est particulièrement conscient que bien des couples chrétiens succombent à la tentation de voir l’autre comme un objet.

              Ce que vous exprimez par votre réponse finale, c’est qu’entre un moment de plaisir sans lendemain partagé dans le respect, et un mariage indissoluble dont le respect est absent, l’Église choisira toujours le mariage.

              C’est dans ce sens que je ne me sens pas rassuré : un monde où les mouvements tels que #MeToo plaident de plus en plus pour le respect, peut difficilement faire autrement que se détourner d’un tel choix de la part de l’Église.

              • Cat-modératrice

                Bonsoir Pelostome,

                J’apprécie le ton avec lequel vous échangez, il n’est pas toujours possible de partager des points de vue différents aussi paisiblement !

                Par rapport au respect qu’il y a ou non dans une relation sexuelle sans aucun engagement et sans lendemain, il ne faut pas oublier que souvent l’une des deux personnes s’attache plus que l’autre. Souvent, pour l’une des deux personnes, les relations sexuelles sont vécues comme quelque chose de plus profond que pour l’autre. Et souvent, même avec la contraception, même avec la pilule, même avec la stérilisation qui permet quand même 2% de grossesses, ne parlons pas du préservatif particulièrement inefficace, souvent donc, les relations sexuelles aboutissent à des grossesses. Je ne sais pas si pour vous un avortement est quelque chose sans importance, en tout cas pour la majorité des femmes, avorter n’est pas du tout anodin. À mes yeux, c’est porter atteinte à la vie d’un être humain. Et garder un enfant pour toute la vie, l’élever seule, n’est pas anodin non plus ! Le faire naître et le donner à l’adoption non plus.

                Pour toutes ces raisons, je trouve que, même en dehors de la théologie catholique, des relations sexuelles sans lendemain ne sont pas si anodines.

                En ce qui concerne la vision chrétienne de la sexualité, il s’agit-là d’un des fondements du christianisme. Dieu a créé l’homme et la femme pour que dans leur union durable, il vivent de l’amour de la Trinité. Le christianisme est un appel à vivre ce mystère. Saint Paul écrit aussi que le mystère de l’union des époux est semblable au mystère de l’union du Christ avec l’Église. Donc ce n’est pas que l’Église choisira le mariage plutôt que les relations sans lendemain, c’est beaucoup plus important et plus profond que cela dans notre religion.

                Je ne comprends pas bien votre dernière phrase : « un monde où les mouvements tels que #MeToo plaident de plus en plus pour le respect, peut difficilement faire autrement que se détourner d’un tel choix de la part de l’Église. »

                Pour moi, les relations entre hommes et femmes que proposent l’Église expriment un respect bien plus grand que les relations sexuelles sans lendemain. Je ne comprends pas en quoi la proposition de l’Église est contradictoire avec #MeToo. #MeToo c’est justement le refus d’être utilisée comme un objet sexuel.

                • Pelostome

                  Bonsoir,

                  concernant la qualité de nos échanges, je suis très heureux qu’elle vous plaise ; ça me met du baume au cœur et j’en ai besoin. Je suis venu ici avec beaucoup de questions et de doutes (et j’en ai encore plus aujourd’hui). J’ai tâché de lire le maximum des échanges précédents dans cette conversation (et quelques-uns d’autres fils) avant d’écrire à mon tour.

                  J’ai constaté qu’il est très naturel de se laisser aller à écrire beaucoup, et je pense qu’il est préférable pour le dialogue de me restreindre dans mes propos. C’est frustrant car je fais l’impasse sur certains points qui me tiennent à cœur, mais je pense à ceux qui lisent et j’essaie de me concentrer sur un ou deux sujets précis, quitte à revenir peut-être plus tard, si l’occasion se présente, sur des choses que j’ai laissées de côté. Enfin, je tâche de laisser passer quelques jours avant de répondre afin d’éviter autant que possible de surréagir.

                  Je vais donc essayer de préciser mon propos par une autre image. Je suis conscient de forcer le trait mais c’est pour tenter de mieux me faire comprendre.

                  Pour que ce soit plus simple, je vais remplacer la notion de respect par celle d’amour . Je laisse également de côté les relations sexuelles sans lendemain : prenons l’exemple d’un couple qui a bâti un amour sincère et respectueux hors mariage.

                  D’un autre côté, comme je l’indiquais dans mon précédent message, si Jean-Paul II a invité les chrétiens à se détourner de la concupiscence, c’est forcément qu’il reconnaissait lui-même que certains chrétiens mariés devant Dieu perdent la ferveur de leur passion première, jusqu’à regarder la personne qu’ils aimaient comme un objet et non comme un être humain.

                  Ce que j’entends dans votre discours, c’est qu’entre un amour sans mariage et un mariage sans amour, l’Église choisira toujours le mariage. C’est ça qui me fait peur. Et c’est ce choix délibéré de l’Église qui peut susciter une réaction légitime de rejet de la part du monde.

                • Cat-modératrice

                  Bonjour Pelostome,

                  Veuillez m’excuser pour le temps que je mets avant de publier vos commentaire et d’y répondre, mais j’anime ce site bénévolement, en plus de mon travail et de ma vie familiale.

                  Oui, Jean-Paul II reconnaissait que certains chrétiens mariés devant Dieu pouvaient regarder leur conjoint comme un objet et non comme un être humain. Mais je pense que dans tout couple, même aimant, il peut y avoir des moments ou des périodes où le regard sur l’autre n’est plus un regard d’amour et de respect. Je ne pense pas que l’amour soit linéaire vers le haut ou vers le bas.

                  Vous dites : « Ce que j’entends dans votre discours, c’est qu’entre un amour sans mariage et un mariage sans amour, l’Église choisira toujours le mariage. »

                  Je vois trois points à vous répondre :

                  • L’Église ne va pas approuver un mariage sans amour et sans respect de l’autre. Être marié et ne pas respecter son conjoint n’est pas un péché moins grand que de vivre une vie de couple sans être marié. Selon la nature du manque de respect, le péché de celui qui est marié peut être plus grand que le péché de celui qui n’est pas marié.
                  • Le mariage est une école d’amour. Ceux qui se marient devant Dieu prennent l’engagement d’apprendre à s’aimer avec l’aide de Dieu. Ce n’est pas parce que quelque chose ne va pas à un moment que le mariage est raté. Le mariage est aussi un chemin de pardon, et s’il y a un pardon véritable, avec l’aide de Dieu, l’amour peut en sortir grandi.
                  • Le sacrement de mariage est un appel de Dieu, une proposition pour ceux qui veulent suivre Dieu. C’est l’invitation à entrer dans une alliance. Ceux qui ne se marient pas ne répondent pas à cette proposition. Ils ne choisissent pas le christianisme. Mais l’Église n’a aucun mépris pour eux.
                • Pelostome

                  Bonjour,

                  je suis conscient que vous animez ce site bénévolement ; ce fonctionnement, incluant le laps de temps dans vos réponses, est pour moi une école de patience extrêmement bénéfique qui m’invite à me décentrer ; c’est bien.

                  Vous dites que l’amour n’est pas linéaire vers le haut ou vers le bas ; j’en suis conscient. C’est la raison pour laquelle j’ai indiqué que je force le trait, je schématise pour mieux me faire comprendre.

                  Concernant votre réponse en trois points : le premier semble indiquer que je n’ai pas trop mal visé : en quelque sorte, vous écrivez que je suis d’accord avec l’Église sur un sujet essentiel.

                  Le second point est également très pertinent : oui, le mariage est une école de l’amour ; derrière cela, je comprends en creux que la peur de l’engagement et la séparation à la première difficulté portent en germe le risque de ne pas aller au bout de l’apprentissage. Si vous le permettez, je regretterai surtout que les « élèves » de cette école de l’amour ne disposent que d’un bagage extrêmement mince. Certes, il y a la préparation au mariage et les Équipes Notre-Dame. Mais à mon sens, c’est au collège et au lycée que des cours de relations interpersonnelles devraient être institués. Là encore, il y a quelques heures d’éducation sexuelle, qui aborde bien heureusement les questions du respect et du consentement (il était temps) ; mais le décryptage des mécanismes de sentiments, de défense, de repli sur soi, d’ouverture à l’autre, Carl Rodgers, Roman Jakobson, John Gray… sont encore loin d’être au programme de l’école de la République. Le sont-ils seulement dans les établissements scolaires catholiques ?

                  Demander à un couple de s’éduquer à l’école de l’amour, c’est un peu demander à un analphabète de devenir académicien en suivant les cours du CNAM. De plus, nous apprenons beaucoup de nos erreurs ; or les erreurs d’un couple peuvent entraîner une séparation, un divorce qui, bien analysé, peut servir de base de réflexion solide pour se remettre en question et réussir une seconde union. Sauf que pour l’Église, dans ce domaine, le chrétien n’a pas droit à l’erreur puisqu’une nouvelle union est obligatoirement considérée adultère. Une école de laquelle on est exclu quand on échoue au premier examen est une bien piètre école.

                  Enfin, le troisième point est particulièrement significatif. Vous dites bien que le mariage chrétien est une proposition et non une obligation, ce qui apparaît à première vue comme la preuve de la grandeur d’âme de l’Église. Vous insistez sur le fait que l’Église n’a aucun mépris pour les couples non mariés – dont nombre d’entre eux font baptiser leurs enfants, sont plus assidus à la messe que des couples mariés devant Dieu, s’engagent dans leur paroisse, au catéchisme… tout en énonçant qu’« ils ne choisissent pas le christianisme » ; ce qui revient à dire qu’ils ne sont pas dignes d’être appelés Chrétiens.

                  C’est exactement ce que je voulais signifier. Pour être plus précis, nous pouvons considérer que l’Église a une idée très arrêtée de ce qu’est l’amour humain : elle se drape dans sa bienveillance en clamant à qui veut l’entendre que chacun est libre ; elle propose un chemin sans l’imposer, d’accord… mais elle ne veut pas entendre la voix de quelqu’un qui a choisi un autre chemin. Elle ne veut pas savoir si un amour humain cheminant hors de son sentier peut se révéler d’une qualité aussi élevée – voire plus – que celle du mariage chrétien. C’est principalement cela que je voulais pointer.

  6. Pelostome

    Bonsoir,

    j’ai l’impression diffuse que ma réponse du 14 février dernier n’a pas été prise en compte par le site ; entretemps, j’ai continué ma réflexion, aussi je vais tâcher d’affiner mon propos.

    Tout d’abord, je suis conscient que vous animez ce site bénévolement ; ce fonctionnement, incluant le laps de temps dans vos réponses, est pour moi une école de patience bénéfique qui m’invite à me décentrer ; c’est bien.

    Vous dites également que l’amour n’est pas linéaire vers le haut ou vers le bas ; j’en suis conscient aussi. C’est la raison pour laquelle j’ai indiqué que je force le trait, je schématise pour mieux me faire comprendre.

    Concernant votre réponse en trois points, le premier semble indiquer que je n’ai pas trop mal visé : à première vue, je suis d’accord avec l’Église sur un sujet essentiel. Toutefois, le second point nous invite à relativiser.

    Pour étayer mon point de vue, je m’appuierai sur un sujet malheureusement trop fréquent : les violences conjugales. En lisant votre premier point, on peut considérer que l’Église condamne sans équivoque ces crimes. Mais si on considère le second, affirmer avec force que dans toute relation maritale, il peut y avoir de la place pour le pardon, cela peut encourager des femmes en danger à pardonner à leur conjoint et à rester à ses côtés ; la plupart du temps, un mari violent va en effet demander pardon avec force et des accents qui semblent parfaitement sincères. Il n’empêche que statistiquement, il ne va pas changer d’attitude et recommencera à être violent. L’Église pourrait ainsi porter la responsabilité de féminicides.

    Si la femme victime de violences conjugales trouve la force de quitter son mari violent, et par chance, réussit à se reconstruire dans une nouvelle relation amoureuse auprès d’un compagnon qui la respecte, elle ne pourra jamais se marier puisque sa première union est indissoluble. En fait, aux yeux de l’Église, elle n’a qu’une alternative : retourner auprès de son mari violent ou renoncer éternellement à l’amour charnel.

    Voilà un exemple de ce que je souhaite exprimer quand je dis : « Entre un amour sans mariage et un mariage sans amour, l’Église choisira toujours le mariage ».

    Il s’agit bien sûr d’un cas extrême, mais vous conviendrez avec moi d’une part, qu’il ne s’agit pas d’une vue de l’esprit mais de situations malheureusement fréquentes ; d’autre part, que les dispositions de l’Église ne permettent pas de se soustraire à cette double peine : d’abord, la violence, puis l’interdiction de plaisir.

    Enfin, même si nous considérons que la proportion des unions où règne la violence n’est pas aussi élevée que celle des couples aimants, le troisième point de votre réponse reste particulièrement significatif. Vous dites bien que le mariage chrétien est une proposition et non une obligation, ce qui apparaît à première vue comme la preuve de la grandeur d’âme de l’Église. Vous insistez sur le fait que l’Église n’a aucun mépris pour les couples non mariés – dont nombre d’entre eux font baptiser leurs enfants, sont plus assidus à la messe que des couples mariés devant Dieu, s’engagent dans leur paroisse, au catéchisme… mais en même temps, vous énoncez qu’« ils ne choisissent pas le christianisme » ; ce qui revient à dire qu’ils ne sont pas dignes d’être appelés Chrétiens.

    Nous n’arrivons pas à en sortir : in fine, l’Église choisit toujours le mariage.

    • Cat-modératrice

      Bonjour Pelostome,

      Encore désolée pour les bugs du site qui ont empêché la publication de vos commentaire. Heureusement que vous m’avez contactée pour me le dire.

      Vous dites :

      Si vous le permettez, je regretterai surtout que les « élèves » de cette école de l’amour ne disposent que d’un bagage extrêmement mince. Certes, il y a la préparation au mariage et les Équipes Notre-Dame. Mais à mon sens, c’est au collège et au lycée que des cours de relations interpersonnelles devraient être institués. Là encore, il y a quelques heures d’éducation sexuelle, qui aborde bien heureusement les questions du respect et du consentement (il était temps) ; mais le décryptage des mécanismes de sentiments, de défense, de repli sur soi, d’ouverture à l’autre, Carl Rodgers, Roman Jakobson, John Gray… sont encore loin d’être au programme de l’école de la République. Le sont-ils seulement dans les établissements scolaires catholiques ?

      C’est vrai, la plupart des gens, chrétiens ou non, sont très mal préparés à vivre les relations conjugales et à apprendre l’amour. Je ne sais pas de quelle manière il faudrait procéder. Normalement les parents ont un grand rôle à jouer, mais il peuvent eux-mêmes avoir des problèmes de couple, ou n’être pas à l’aise pour parler du sujet avec leurs enfants. Je pense qu’il faudrait beaucoup plus faire connaître le travail des conseillers conjugaux. Des cours sur la psychologie des relations au lycée, cela risque de passer au-dessus de leur tête (ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut pas en faire). Mais quand on est dans la crise et que l’on n’attend pas qu’il soit trop tard, un conseiller conjugal peut aider à comprendre les mécanismes que l’on est en train de vivre.

      Vous dites :

      De plus, nous apprenons beaucoup de nos erreurs ; or les erreurs d’un couple peuvent entraîner une séparation, un divorce qui, bien analysé, peut servir de base de réflexion solide pour se remettre en question et réussir une seconde union. Sauf que pour l’Église, dans ce domaine, le chrétien n’a pas droit à l’erreur puisqu’une nouvelle union est obligatoirement considérée adultère. Une école de laquelle on est exclu quand on échoue au premier examen est une bien piètre école.

      Idéalement, les erreurs d’un couple devraient servir de base de réflexion solide pour se remettre en question et apprendre à réussir le même couple… Mais c’est vrai, la réalité est très souvent différente.

      D’une part, il ne faut pas oublier que le mariage peut ne pas être valide. Par exemple, un mariage où l’un des membres du couple a l’intention, dès le départ, de faire des infidélités à son conjoint quand il en aura envie le jour venu, n’est pas un mariage valide aux yeux de Dieu (c’est-à-dire qu’il n’y a pas eu de mariage, en réalité), et peut être reconnu comme invalide par l’Église. L’Église n’annule jamais des mariages, mais elle reconnaît leur nullité. Le pape François a facilité les démarches pour la reconnaissance de nullité, et il a rendu la procédure entièrement gratuite. Un mariage avec une personne violente n’est pas valide non plus, car la personne violente n’était pas en état de s’engager dans le mariage, etc.

      D’autre part, le mariage qui est un échec peut être effectivement valide, et cela peut être extrêmement difficile de ne pas pouvoir se remarier dans l’Église. Attention, je ne veux pas dire que le catholique qui se remarie est désormais hors de l’Église. Je dis qu’il ne peut pas se remarier dans l’Église : son deuxième mariage civil n’est pas reconnu, et l’Église considère que les divorcés remariés dont le premier mariage était valide, vivent en couple sans être mariés. C’est vrai, cette loi peut être difficile à accepter. Les disciples de Jésus ont eux-mêmes eu une réaction de révolte quand il a donné cette loi :

      Jésus leur répond : « C’est en raison de la dureté de votre cœur que Moïse vous a permis de renvoyer vos femmes. Mais au commencement, il n’en était pas ainsi.

      Or je vous le dis : si quelqu’un renvoie sa femme – sauf en cas d’union illégitime – et qu’il en épouse une autre, il est adultère. »

      Ses disciples lui disent : « Si telle est la situation de l’homme par rapport à sa femme, mieux vaut ne pas se marier. »

      (Matthieu 19, 8-10)

      Dieu veut nous faire aller plus loin dans l’amour. Un amour absolument inconditionnel pour son conjoint est à la fois un signe de la fidélité de Dieu, et un vrai chemin d’amour. Si on permettait le divorce, les conjoints se sépareraient beaucoup plus facilement, même quand il aurait été possible de sauver le couple. Mais il est vrai qu’il est difficile de supporter la situation de personnes divorcées depuis des années, qui ne sont pas forcément responsables de l’échec de leur couple ou du départ de leur conjoint, et qui ne peuvent plus fonder un nouveau foyer en accord avec l’Église. Tout ce que je sais, c’est que Jésus lui-même a proclamé l’indissolubilité du mariage. Dans un autre passage, il dit bien que les femmes ne peuvent pas non plus renvoyer leur mari, et il dit que ceux qui ont été renvoyés par leur conjoints sont eux aussi coupables d’adultère quand ils se remarient.

      Vous dites :

      Vous insistez sur le fait que l’Église n’a aucun mépris pour les couples non mariés – dont nombre d’entre eux font baptiser leurs enfants, sont plus assidus à la messe que des couples mariés devant Dieu, s’engagent dans leur paroisse, au catéchisme… tout en énonçant qu’« ils ne choisissent pas le christianisme » ; ce qui revient à dire qu’ils ne sont pas dignes d’être appelés Chrétiens.

      Pourquoi parlez-vous de dignité ? Jésus propose un chemin, certains l’acceptent, certains le refusent, ce n’est pas une question de dignité. De très grands pécheurs ont choisi de suivre Jésus, et ils étaient conscients d’être indignes.

      Le christianisme est la proposition d’une alliance avec Dieu, et l’une des façons dont se vit cette alliance est en vivant aussi une alliance indissoluble dans le mariage. Ceux qui ne veulent pas vivre ainsi refusent quelque chose qui est au cœur du christianisme. Ce n’est pas qu’il ne sont pas digne, c’est qu’il ne veulent pas vivre ce que propose le christianisme.

      Cependant, des personnes en couple sans être mariées peuvent être chrétiennes et aller à la messe – mais on leur demande de ne pas communier. Bien d’autres chrétiens ne sont pas sensés communier. Il m’est arrivé à moi-même de ne pas aller communier parce que j’avais commis un péché qui m’éloignait de Jésus, et que je ne m’étais pas encore confessée.

      Vous dites :

      C’est exactement ce que je voulais signifier. Pour être plus précis, nous pouvons considérer que l’Église a une idée très arrêtée de ce qu’est l’amour humain : elle se drape dans sa bienveillance en clamant à qui veut l’entendre que chacun est libre ; elle propose un chemin sans l’imposer, d’accord… mais elle ne veut pas entendre la voix de quelqu’un qui a choisi un autre chemin. Elle ne veut pas savoir si un amour humain cheminant hors de son sentier peut se révéler d’une qualité aussi élevée – voire plus – que celle du mariage chrétien. C’est principalement cela que je voulais pointer.

      Comme je vous l’ai dit, l’alliance dans le mariage est au cœur même du christianisme. Saint Paul dit que c’est un mystère semblable au mystère de l’alliance de Jésus avec l’Église. Alors quand vous dites « elle ne veut pas entendre la voix de quelqu’un qui a choisi un autre chemin », c’est comme si vous disiez « elle ne veut pas entendre la voix de celui qui lui dit que le sauveur ne s’appelle pas Jésus mais Jean-Jacques », vous lui demandez de renier ce qui est son cœur. Bien sûr qu’il peut y avoir des amours de grande qualité en dehors du mariage, mais Jésus propose le mariage à ceux qui le suivent. Et oui, l’Église considère qu’un mariage avec engagement d’un conjoint envers l’autre permet un amour plus vrai qu’une vie de couple sans engagement. Ce qui n’empêche pas le fait que certains mariages dans l’Église sont vécus avec moins d’amour que ce qui est vécu dans certains couples non mariés. Mais cela n’est pas une objection au fait que vivre l’amour dans le mariage aide à vivre un plus grand amour.

      Vous dites :

      Pour étayer mon point de vue, je m’appuierai sur un sujet malheureusement trop fréquent : les violences conjugales. En lisant votre premier point, on peut considérer que l’Église condamne sans équivoque ces crimes. Mais si on considère le second, affirmer avec force que dans toute relation maritale, il peut y avoir de la place pour le pardon, cela peut encourager des femmes en danger à pardonner à leur conjoint et à rester à ses côtés ; la plupart du temps, un mari violent va en effet demander pardon avec force et des accents qui semblent parfaitement sincères. Il n’empêche que statistiquement, il ne va pas changer d’attitude et recommencera à être violent. L’Église pourrait ainsi porter la responsabilité de féminicides.

      L’Église n’encourage absolument pas les victimes de violence (femmes ou hommes) à rester avec leur conjoint. L’Église ne permet pas le remariage, mais elle permet la séparation. Et, très souvent, les mariages avec un conjoint violent ne sont pas des mariages valides, car le conjoint n’avait pas la santé psychique ou la maturité nécessaire pour vivre un tel engagement. Une femme battue qui demande conseil à un prêtre sera incitée à quitter son mari, et si le prêtre ne lui donnait pas ce conseil, c’est qu’il ne serait pas équilibré lui-même. Je crois que dans un message précédent, j’avais parlé des cas où il y a un grave manque de respect dans le couple. On ne doit pas laisser notre conjoint nous détruire.

      Vous dites :

      Si la femme victime de violences conjugales trouve la force de quitter son mari violent, et par chance, réussit à se reconstruire dans une nouvelle relation amoureuse auprès d’un compagnon qui la respecte, elle ne pourra jamais se marier puisque sa première union est indissoluble. En fait, aux yeux de l’Église, elle n’a qu’une alternative : retourner auprès de son mari violent ou renoncer éternellement à l’amour charnel.

      Comme je viens de l’écrire, il est rare qu’un mariage où il y a une situation de violence soit un mariage valide. Mais cela pourrait arriver, par exemple si le conjoint violent l’était devenu bien après le mariage, suite à des événements traumatisants qui l’auraient brisés. Dans ce cas, en effet, l’Église demande à la personne séparée de renoncer à une nouvelle union. D’être fidèle à son conjoint sans vivre avec lui. Si cette personne se remarie quand même, elle n’est pas exclue de l’Église pour autant.

      Vous dites :

      Nous n’arrivons pas à en sortir : in fine, l’Église choisit toujours le mariage.

      Pourquoi dites-vous « in fine » ? l’Église demande de vivre l’amour entre homme et femme dans le mariage. Nous sommes d’accord là-dessus depuis le début. Ce n’est pas « in fine », c’est un élément qui est au cœur de l’Église, de la Bible et du christianisme. Vous dites que nous n’arrivons pas à en sortir, mais il n’est pas question d’en sortir.

      • Pelostome

        Bonsoir,

        c’est décidément très difficile d’arriver à nous comprendre. Lorsque j’écris « In fine, l’Église choisit toujours le mariage », c’est pour éviter une répétition qui me semblait trop lourde : « Entre un amour sans mariage et un mariage sans amour, l’Église choisira toujours le mariage ».

        Concernant votre profession et l’aide qu’elle apporte aux couples, je suis bien d’accord ; je rêve qu’un jour tous les couples fassent naturellement un bilan par an avec un conseiller conjugal, complété par un week-end prolongé pour se retrouver en amoureux sans famille ni enfants, le tout remboursé par les allocations familiales, car ça pourrait économiser bien des divorces… Bon, je reviens à des choses plus terre-à-terre.

        Vers la fin de votre réponse, vous évoquez l’échange que nous avons eu il y a quelque temps au sujet des situations où un conjoint ne respecte pas son conjoint ; vous avez convenu qu’il s’agit d’un péché grave, mais sans remettre en cause le mariage lui-même. J’ai alors forcé le trait en évoquant les violences conjugales, et en mettant en avant la notion de pardon qui peut pousser une victime de violences à se mettre en danger en refusant de quitter son conjoint violent. Le fait que vous m’indiquiez qu’un prêtre ne peut qu’encourager une victime à quitter un conjoint violent, et que l’inverse dénoterait un sérieux problème, est un signe encourageant, d’autant plus lorsque vous soulignez que dans la majorité des cas, le mariage peut être déclaré nul, et que les procédures concernant la reconnaissance en nullité ont été simplifiées et sont maintenant gratuites. Le chemin sera certainement encore très long jusqu’à ce que ces démarches deviennent relativement courantes, mais le mouvement est initié.

        Notons cependant que pour en arriver à cette conclusion, il a fallu que j’invoque un cas extrême avec mise en danger de la personne. Lorsqu’il n’y a pas violence au sens strict mais non-respect du conjoint, il est vrai que c’est plus compliqué puisque vous notez que l’amour n’est pas linéaire et qu’une situation peut se détériorer ou s’améliorer au fil du temps ; mais cela signifie quand même qu’il peut y avoir une vraie souffrance, et que l’Église va quasiment systématiquement conseiller de supporter cette souffrance, voire de la sublimer en l’« offrant à Dieu ». Drôle d’offrande.

        Alors oui, la réaction épidermique des amis de Jésus : « À ce compte-là, mieux vaut ne pas se marier ! » résonne particulièrement à nos oreilles, cela d’autant plus que Jésus, qui affirme par ailleurs que pas un iota de la loi de Moïse ne sera aboli, prend ses distances avec cette même loi en lui opposant le texte de la Genèse qui est un poème d’amour ! Est-ce qu’on imaginerait qu’un homme politique s’oppose au Code Civil en s’appuyant sur Victor Hugo ?

        J’ai eu la chance de connaître un prêtre qui disait : « L’amour est comme une toile de maître, dont le mariage est le cadre. L’important, c’est la toile ; mais quand on possède une toile de maître, on a envie de la mettre en valeur avec un beau cadre ».

        Je trouve cela très juste, et ça s’approche de ce que vous exprimez sur le mariage ; il est vrai que par l’engagement, il peut faire grandir l’amour vers quelque chose de très beau (même s’il faudrait toujours garder à l’esprit que l’ensemble des contraintes posées par l’Église peut produire l’effet inverse). Mais ça ne me satisfait pas pleinement.

        D’après ce que j’ai compris de l’enseignement de l’Église, parmi les sept sacrements, ce n’est pas le baptême mais l’Eucharistie qui est central ; cela dit, on ne communie pas si on n’est pas baptisé.

        A bien y réfléchir, un enfant chrétien baptisé peut progresser dans la foi jusqu’à faire sa première communion, et communier ensuite tous les dimanches… jusqu’à ce que, adolescent, il découvre l’orgasme, qui est une sensation absolument incroyable de bien-être. L’intensité de cette expérience est telle qu’il semble tout à fait naturel de la rechercher à nouveau, soit par la masturbation, comme largement répandu dans la nature, soit par une relation de couple qui peut ouvrir sur un amour sincère. Mais dans les deux cas, le chrétien se voit tenu de régresser en se cantonnant à la communion spirituelle et non sacramentelle ; cette dernière constituant le centre de la vie chrétienne, la découverte de l’amour charnel replace le chrétien dans la position d’un bébé non baptisé – jusqu’à ce qu’il soit marié.

        Votre discours est en cela très intéressant car il reflète fidèlement la position de l’Église : le mariage nous est présenté comme un très beau cadre qui apporte une valeur ajoutée à la toile de l’amour. Et bien sûr, il s’agit d’une proposition, en toute liberté, il n’y a absolument rien d’imposé… sauf que vous exprimez que ceux qui ne choisissent pas le mariage ne choisissent pas le christianisme.

        Je n’ai sans doute pas été assez précis en écrivant que les couples non mariés n’étaient, aux yeux de l’Église, « pas dignes d’être chrétiens ». En fait, lorsque vous écrivez : « les couples non mariés ne choisissent pas le christianisme », ça signifie ni plus ni moins qu’ils ne sont PAS chrétiens.

        Je ne sais pas si vous avez pris conscience de cela en me répondant, toujours est-il que vous avez reformulé d’une manière plus subtile : ils « refusent quelque chose qui est au cœur du christianisme ». De fait, les couples chrétiens non mariés sont accueillis avec bienveillance, mais pour se conformer à la règle de l’Église, celle-ci attend d’eux qu’ils s’abstiennent d’eux-mêmes de communier sacramentellement. Et pour accéder à la communion sacramentelle selon les règles de l’Église, la confession ne suffit pas : il faut expressément qu’ils soient mariés. Alors, excusez-moi, mais la proposition du mariage absolument pas imposée, elle me reste un peu en travers de la gorge.

        Et pourtant, la toile de maître, c’est l’amour, pas le mariage. C’est l’amour qui est au cœur de la chrétienté, pas le mariage. Si l’on prend un peu de recul au regard de l’histoire, on voit bien que le mariage est, au départ, une disposition contractuelle sous-tendant le patriarcat et antérieur au christianisme comme au judaïsme. Il est vrai que son cadre peut renforcer l’amour – tout comme il peut contribuer à l’éroder. A mon sens, il constitue un moyen parmi d’autres de faire grandir l’amour. En le choisissant comme moyen exclusif sans chercher à écouter le témoignage des amoureux qui peuvent avoir choisi d’autres voies pour cultiver leur amour, l’Église, il me semble, manque d’humilité.

        • Cat-modératrice

          Bonjour Pelostome,

          Vous avez voulu reparler de : « Entre un amour sans mariage et un mariage sans amour, l’Église choisira toujours le mariage »

          Pour l’Église, le mariage est au service de l’amour. À condition que l’on parle du vrai amour, celui qui respecte l’autre, qui a un regard positif sur l’autre, qui désire être proche de l’autre et qui veut toujours rester aux côté de l’autre. À ceux qui sont en couple sans être mariés et qui s’aiment (dans le cas où c’est un vrai amour respectueux de l’autre), l’Église dirait : « Votre amour est quelque chose de merveilleux, mais si vous voulez suivre le chemin de Jésus, mariez-vous. Votre amour l’un pour l’autre sera plus vrai et plus grand si vous vous engagez l’un envers l’autre pour toujours. » À ceux qui sont mariés mais qui ne s’aiment pas, l’Église dirait : votre mariage doit être au service de votre amour. Si vous voulez suivre le chemin de Jésus, apprenez à vous aimer et à vous respecter. Et si l’amour est absent depuis le début de votre mariage, vous feriez bien de vérifier si votre mariage est valide. »

          Vous écrivez : « Lorsqu’il n’y a pas violence au sens strict mais non-respect du conjoint, il est vrai que c’est plus compliqué puisque vous notez que l’amour n’est pas linéaire et qu’une situation peut se détériorer ou s’améliorer au fil du temps ; mais cela signifie quand même qu’il peut y avoir une vraie souffrance, et que l’Église va quasiment systématiquement conseiller de supporter cette souffrance, voire de la sublimer en l’« offrant à Dieu ». Drôle d’offrande. »

          Ce que vous écrivez peut correspondre à de nombreuses situations différentes. Il existe de nombreux mariages invalides sans violence. Par ailleurs, une personne qui souffre trop dans son couple peut se séparer, même s’il n’y a pas de violence. Mais si le mariage est valide, l’enseignement de Jésus demande de ne pas se remarier. Il peut y avoir une vraie souffrance aussi dans un couple qui traverse une crise. La souffrance n’est pas le signal immédiat qu’un couple est mauvais pour les membres du couples ou pour l’un des deux. Des couples qui ont traversé des crises, qui les ont dépassées, qui s’aiment vraiment, et qui sont heureux, il y en a beaucoup.

          Vous écrivez : « Alors oui, la réaction épidermique des amis de Jésus : « À ce compte-là, mieux vaut ne pas se marier ! » résonne particulièrement à nos oreilles, cela d’autant plus que Jésus, qui affirme par ailleurs que pas un iota de la loi de Moïse ne sera aboli, prend ses distances avec cette même loi en lui opposant le texte de la Genèse qui est un poème d’amour ! Est-ce qu’on imaginerait qu’un homme politique s’oppose au Code Civil en s’appuyant sur Victor Hugo ? »

          Jésus a dit : « Je ne suis pas venu abolir la loi, mais l’accomplir. » Dans cette optique, il a modifié de nombreux points de la loi pour la faire arriver à son but. Par exemple : « Vous avez entendu qu’il a été dit : Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi. Eh bien ! moi je vous dis : Aimez vos ennemis, et priez pour vos persécuteurs. » (Mt 5, 43-44).

          Le texte de la Genèse est bien plus qu’un poème, c’est un texte théologique, d’où découle par exemple l’interdiction du travail le jour du Sabbat qui est fondamentale dans le judaïsme – l’interdiction, plus légère, du travail le dimanche étant très importante aussi. C’est là qu’il est écrit aussi que l’être humain a été créé à l’image de Dieu, élément fondamental des théologies juives et chrétiennes.

          Vous écrivez : « J’ai eu la chance de connaître un prêtre qui disait : « L’amour est comme une toile de maître, dont le mariage est le cadre. L’important, c’est la toile ; mais quand on possède une toile de maître, on a envie de la mettre en valeur avec un beau cadre ». »

          Le mariage est plus qu’un cadre. C’est à travers le mariage que le don de soi à son conjoint peut-être total. Et le mariage est un sacrement à travers lequel Dieu se donne au couple d’une manière spéciale, d’autant plus que l’union de l’homme et de la femme dans le mariage est semblable à l’union entre Jésus et l’Église, et à l’union des trois personnes divines au sein de la Trinité.

          Vous écrivez : « Mais dans les deux cas, le chrétien se voit tenu de régresser en se cantonnant à la communion spirituelle et non sacramentelle ; cette dernière constituant le centre de la vie chrétienne, la découverte de l’amour charnel replace le chrétien dans la position d’un bébé non baptisé – jusqu’à ce qu’il soit marié. »

          La communion spirituelle est une communion aussi vraie que la communion matérielle. Celui qui est uni à Jésus communiera à lui aussi profondément spirituellement ou matériellement. Celui qui est coupé de Jésus ne communiera à lui ni spirituellement ni en mangeant l’hostie. L’Église demande aux personnes qui sont dans des situations qui les coupent de Jésus de ne pas communier matériellement. La possibilité de la communion spirituelle existe parce que l’Église sait que son jugement ne peut être extérieur, elle ne peut pas vraiment savoir quelle est la relation des personnes avec Jésus. Cette interdiction de communier pour les personnes qui ont choisi d’être dans une situation en opposition à la volonté de Jésus dans un domaine grave est à la fois un attitude de respect vis-à-vis de Jésus dans le sacrement, et une nécessité pour la personne elle-même. Saint Paul met en garde contre le fait de communier quand on n’est pas en état spirituel de le faire, il estime qu’il y a un grand danger spirituel.

          Cette raison de s’abstenir de communier n’a rien à voir avec la raison pour laquelle un enfant s’abstient de communier. D’ailleurs, les personnes s’abstenant de communier devraient être beaucoup plus nombreuses, beaucoup de personnes communient alors qu’elle ont commis un péché grave, qui peut n’avoir aucun rapport avec la sexualité. Par exemple, quelqu’un qui a calomnié quelqu’un d’autre devrait s’abstenir de communier tant qu’il n’a pas regretté sincèrement ce qu’il a fait et ne s’est pas confessé – et son confesseur lui demandera de réparer, dans la mesure du possible, le mal qu’il a fait.

          Vous écrivez : « De fait, les couples chrétiens non mariés sont accueillis avec bienveillance, mais pour se conformer à la règle de l’Église, celle-ci attend d’eux qu’ils s’abstiennent d’eux-mêmes de communier sacramentellement. Et pour accéder à la communion sacramentelle selon les règles de l’Église, la confession ne suffit pas : il faut expressément qu’ils soient mariés. Alors, excusez-moi, mais la proposition du mariage absolument pas imposée, elle me reste un peu en travers de la gorge. »

          Si je vous disais : « Personne n’est obligé de croire en Jésus, mais pour être chrétien il faut croire en Jésus. », est-que vous trouveriez aussi mon exigence inacceptable ? Oui, même en vivant en couple sans être mariés il est possible d’être membre de l’Église, mais sans communier. Pour un chrétien, avoir des relations sexuelles en dehors du mariage est un péché grave, car cela s’oppose à la volonté de Jésus sur un point fondamental. Si l’Église cessait de le considérer comme fondamental, il s’agirait d’une autre religion. Je crois que nous avons déjà l’un et l’autre répété plusieurs fois notre point de vue sur ce point.

          Vous dites : « En choisissant le mariage comme moyen exclusif sans chercher à écouter le témoignage des amoureux qui peuvent avoir choisi d’autres voies pour cultiver leur amour, l’Église, il me semble, manque d’humilité. »

          J’ai l’impression que nous répétons les mêmes arguments. Je vous renvoie à mes réponses précédentes.

          • Pelostome

            Bonsoir,

            en lisant vos réponses patientes et précises, je me sens profondément désolé d’arriver à un point où certaines de nos opinions semblent irréconciliables ; j’en ressens une profonde tristesse. Cependant, j’ai relu votre dernier message ; je me suis alors rendu compte que la plupart de vos réponses ont nourri ma réflexion et m’ont permis, je crois, de progresser un peu. Je souhaite, dans un premier temps, revenir sur ces aspects positifs, même si quelques interrogations continuent à me titiller. Dans un second temps, j’essaierai de faire un point pour expliciter mes inquiétudes.

            Votre premier paragraphe concernant le mariage au service de l’amour résume votre point de vue de manière claire et précise ; il pourrait servir d’introduction à une réflexion en présence de couples mariés et non mariés ou en CPM. Je l’ai beaucoup apprécié.

            Votre second paragraphe concernant la souffrance qu’on peut ressentir dans un couple me semble relativement neutre mais là encore, il fait la part des choses, apporte du recul et il est clairement rédigé. La demande de ne pas se remarier reste rappelée mais il est indéniable que celle-ci est présente dès les Évangiles ; il me semble même qu’elle est mentionnée 4 fois dans les 3 synoptiques ! C’est dire à quel point cette question est brûlante et ne sera jamais vraiment épuisée.

            Concernant la réponse de Jésus qui oppose à la loi de Moïse le poème d’amour de la Genèse, votre remarque selon laquelle il vient accomplir la loi en l’améliorant, en quelque sorte, semble frappée au coin du bon sens. Pour moi, un doute subsiste cependant : j’ai bien lu dans l’Évangile que Jésus professe « Vous avez entendu qu’il a été dit : tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi ». Mais Jésus dénonce également les traditions qui ne font pas partie de la loi et qui vont jusqu’à l’annuler. Or, il professe que ce passage qu’il cite a été « dit » ; il n’emploie pas le mot « écrit ». La phrase « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » fait bien partie de la Torah écrite. Mais la deuxième partie « Tu haïras ton ennemi » est-elle véritablement écrite dans la loi ou est-elle un ajout de la tradition ?

            Pour le livre de la Genèse, il me semble que les exégètes sont aujourd’hui unanimes à considérer que sa forme est une forme poétique, mythologique, épique, selon les différents récits. Je ne peux cependant pas honnêtement contredire votre avis : « le texte de la Genèse est bien plus qu’un poème ». Les sociologues considèrent les mythes comme des textes fondateurs de la structure de pensée de l’humanité. Aussi, je ne peux que reconnaître l’importance de l’émerveillement de l’homme et de la femme, la violence larvée qui précède le meurtre d’Abel, la volonté d’élévation des êtres humains telle qu’elle est présentée à Babel, le déchirement d’Abraham devant la coutume de sacrifier les premiers-nés… La liste est trop longue pour la dérouler entièrement. Je n’avais également jamais fait attention au fait que la Genèse est considérée comme partie intégrante de la Torah. On peut donc considérer qu’elle n’énonce aucun texte de loi de manière explicite, mais qu’elle montre de manière implicite un certain nombre de dispositions bonnes ou mauvaises de l’esprit humain qui ont valeur d’enseignement. Je me rends donc à votre avis.

            Concernant le fait que le mariage est plus qu’un cadre, je réserve mon appréciation. Pour moi, il est évident que d’un point de vue historique, le mariage contient une part d’alliance sociale, voire politique, entre deux familles, qui procède clairement du patriarcat. Mais si celui-ci précède le christianisme et le judaïsme, il est sans doute contemporain des premières religions. Il faudrait donc que je me familiarise plus précisément avec l’histoire des religions pour avoir une idée de l’évolution du sens du mariage. J’ai l’impression diffuse que ce sens a évolué d’une alliance principalement sociale, l’amour y tenant une place anecdotique, vers un sens quasiment uniquement spirituel dans le christianisme, ne figurant que l’image de l’amour du Christ pour l’Église, en reléguant au second plan l’amour charnel et affectif. Mais je ne saurais l’affirmer avec certitude.

            Le paragraphe concernant la communion spirituelle m’ouvre à un mystère que je n’arrive pas encore à bien appréhender. Personnellement, depuis quelques semaines, suite à nos échanges, je m’abstiens de communier sacramentellement. Les premiers dimanches, je n’en étais pas trop affecté. J’avais surtout peur d’être jugé par les autres paroissiens. J’avais également peur de perdre le goût de communier, et de finir à terme par perdre toute pratique religieuse. Dernièrement, je me suis senti plus apaisé, j’ai eu une véritable envie de communier sacramentellement. Je me suis alors abstenu une nouvelle fois en me disant que ça doit être un bon signe, cela signifie probablement que je creuse mon désir de Dieu, ce qui est une bonne chose en temps de carême. Je suis quand même assez désorienté. Les propos que vous tenez vis-à-vis de la communion spirituelle semblent tellement cohérents et positifs que je ne comprends pas pourquoi l’Église ne parle quasiment jamais de cette réalité. Est-ce qu’elle n’en parle pas de peur que les chrétiens désertent encore un peu plus les églises ? Préfèrerait-elle les infantiliser pour les garder sous sa coupe plutôt que prendre le risque de les appeler à la vérité ?

            Comme vous le soulignez dans les deux derniers paragraphes, ceux-ci n’apportent pas grand-chose à nos échanges puisque notre confrontation n’avance pas sur ce sujet. J’avoue humblement que pour moi, croire en Jésus ressuscité et croire en la sacralisation exclusive du mariage ne me semblent pas exactement du même ordre ; je dois être trop présomptueux, trop orgueilleux ou trop stupide. J’espère cependant pouvoir vous témoigner par les points ci-dessus que vos efforts n’ont pas été totalement vains.

            J’ai beaucoup écrit, excusez-m’en encore. Je pense faire une pause avant de vous livrer mes inquiétudes quant à mon avenir de chrétien. A bientôt.

            • Cat-modératrice

              Bonjour Pelostome,

              D’abord je vous souhaite de très joyeuses Pâques !

              Pourquoi êtes-vous triste du fait que nos opinions soient, sur certains points, irréconciliables ? Moi au contraire je me réjouis de ce que, malgré nos différences d’opinions, nous puissions échanger dans le respect l’un de l’autre.

              Sur terre, personne ne peut posséder totalement Dieu ni la vérité. Nous ne pouvons que cheminer. Si nous avons des opinions irréconciliables, c’est que l’un de nous, ou les deux, se trompe(nt). Ce n’est pas un drame, même si c’est sur des sujets extrêmement importants. Dieu voit les intentions de chacun de nous, et si nous sommes dans une démarche d’ouverture à son amour, il va nous préparer petit à petit à l’accueil total de la vérité, même si cet accueil ne pourra être total qu’à la mort.

              Bien sûr, les erreurs de point de vue des uns et des autres peuvent entraîner des conséquences graves. Alors il faut prier pour les personnes qui, sans que nous le sachions, souffrent de nos erreurs, et faire confiance à Dieu. Que faire d’autre, si ces erreurs ne sont dues ni à de la méchanceté ni à de la mauvaise volonté ?

              Merci de partager avec moi les aspects positifs de nos échanges.

              Concernant le fait que la demande de ne pas se remarier est présente dans les Évangiles, moi-même il m’arrive de reprocher à Jésus le fait que cette exigence est trop dure dans certaines situations. J’ai parfois du mal à comprendre. Mais j’ai choisi de suivre Jésus, et si je le suis je ne peux pas choisir ce qui me plaît et laisser de côté ce qui me dérange dans son enseignement.

              Vous avez écrit :

              J’ai bien lu dans l’Évangile que Jésus professe « Vous avez entendu qu’il a été dit : tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi ». Mais Jésus dénonce également les traditions qui ne font pas partie de la loi et qui vont jusqu’à l’annuler. Or, il professe que ce passage qu’il cite a été « dit » ; il n’emploie pas le mot « écrit ». La phrase « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » fait bien partie de la Torah écrite. Mais la deuxième partie « Tu haïras ton ennemi » est-elle véritablement écrite dans la loi ou est-elle un ajout de la tradition ?

              Quand, dans les Évangiles, Jésus dit : « Vous avez entendu qu’il a été dit », il cite chaque fois ensuite des paroles de l’Ancien Testament. Pour : « Tu haïras ton ennemi », effectivement, c’est une exception, et cela ne figure pas dans la Bible. Peut-être que par cette phrase Jésus veut traduire les récits de l’Ancien Testament où les Juifs sont incités à combattre leurs ennemis sans pitié ?

              Vous avez écrit :

              J’ai l’impression diffuse que ce sens a évolué d’une alliance principalement sociale, l’amour y tenant une place anecdotique, vers un sens quasiment uniquement spirituel dans le christianisme, ne figurant que l’image de l’amour du Christ pour l’Église, en reléguant au second plan l’amour charnel et affectif. Mais je ne saurais l’affirmer avec certitude.

              Ce que vous dites est d’autant plus juste que l’Église, au moins institutionnelle, a toujours lutté pour les mariages libres, même si certains prêtres, peut-être même beaucoup à certaines époques, ont été complices de mariages forcés. C’est pour protéger la liberté de consentement que l’Église a imposé de publier les bans, et a imposé la présence de témoins pour attester que le « oui » a vraiment été prononcé, et sans contrainte – bien sûr, cela ne pouvait pas empêcher une contrainte morale. Pour la même raison, au XIIIe siècles les mariages consanguins ont été interdits jusqu’au 7e degré. C’est-à-dire qu’il ne fallait pas avoir d’arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-grand-parent en commun. Cela paraît énorme aujourd’hui, mais le but était d’éviter les mariages forcés visant à réunir des patrimoines familiaux.

              Je suis touchée par ce que vous me dites sur la communion spirituelle, et par ce que vous me dites de votre désir de Dieu. Il y a beaucoup de sujets importants dont les prêtres ne parlent jamais malheureusement. Je suppose que la raison en est différente selon les prêtres. Certains restent dans des hauteurs spirituelles qui ne rejoignent jamais notre vie concrète. Certains ont, je pense, effectivement peur de faire partir des chrétiens, peut-être que certains ne pensent tout simplement pas à aborder ces sujets car ils ont à l’esprit bien d’autres choses qui sont importantes aussi. Moi-même je déplore depuis longtemps que l’on parle si peu de la communion spirituelle, que l’on ne rappelle pas aux chrétiens qu’elle peut les concerner tous, et pas seulement les divorcés-remariés, et que l’on ne la dédramatise pas. Le fait que vous ayez eu peur d’être jugé montre que les chrétiens n’ont vraiment pas le réflexe de s’abstenir de communier quand ils ont commis un péché grave, ce qui arrive à presque tout le monde. Ce qui m’est arrivé plus d’une fois dans ma vie. Les péchés graves ne concernent pas seulement les questions sexuelles, le vol et le meurtre ! Cela devrait paraître normal de voir des personnes restant assis à la communion chaque dimanche.

              Vous évoquez la possibilité d’être stupide, je ne le pense vraiment pas en lisant vos commentaires.

              Je vais maintenant répondre à votre dernier commentaire dans un autre message.

  7. Pelostome

    Bonjour,

    excusez-moi de ce complément intempestif ; en continuant ma réflexion personnelle, j’en viens à me poser une nouvelle question.

    J’ai bien lu que l’Église s’appuie sur l’avis de Saint Paul selon lequel le mystère du mariage est comparable à celui du Christ et de l’Église.

    Saint Paul déclare également que la femme doit être soumise à son mari : « dans le Christ, c’est ce qui convient ».

    L’Église considère-t-elle que le mariage est la seule union possible pour des chrétiens ET la femme chrétienne doit être soumise à son mari ?

    Si ce n’est pas le cas, comment l’Église justifie-t-elle de s’appuyer sur la première parole de Saint Paul mais pas la deuxième ?

    • Cat-modératrice

      Re-bonjour Pelostome,

      Votre question est très pertinente.

      L’Église considère que le mari et la femme doivent être dans une soumission mutuelle (voir ce texte de Jean-Paul II).

      Le texte Biblique de référence est donc l’épitre aux Éphésiens :

      Soyez soumis les uns aux autres dans la crainte du Christ.

      Que les femmes le soient à leurs maris comme au Seigneur : en effet, le mari est chef de sa femme, comme le Christ est chef de l’Église, lui le sauveur du Corps ; or l’Église se soumet au Christ ; les femmes doivent donc, et de la même manière, se soumettre en tout à leurs maris.

      Maris, aimez vos femmes comme le Christ a aimé l’Église : il s’est livré pour elle, afin de la sanctifier en la purifiant par le bain d’eau qu’une parole accompagne ; car il voulait se la présenter à lui-même toute resplendissante, sans tache ni ride ni rien de tel, mais sainte et immaculée. De la même façon les maris doivent aimer leurs femmes comme leurs propres corps.

      Aimer sa femme, c’est s’aimer soi-même. Car nul n’a jamais haï sa propre chair; on la nourrit au contraire et on en prend bien soin. C’est justement ce que le Christ fait pour l’Église : ne sommes-nous pas les membres de son Corps ?

      Voici donc que l’homme quittera son père et sa mère pour s’attacher à sa femme, et les deux ne feront qu’une seule chair : ce mystère est de grande portée ; je veux dire qu’il s’applique au Christ et à l’Église.

      Bref, en ce qui vous concerne, que chacun aime sa femme comme soi-même, et que la femme révère son mari. (Éphésiens 5, 21-33)

      Le point essentiel, c’est qu’il y a écrit : « Soyez soumis les uns aux autres dans la crainte du Christ. Que les femmes le soient à leurs maris comme au Seigneur. »

      Il s’agit bien que l’homme et la femme mariés sont soumis l’un à l’autre. Le « le » que j’ai mis en gras montre bien que lorsque l’on parle de la soumission des femmes, c’est au sujet de cette soumission mutuelle. Il sont soumis l’un à l’autre. La façon de la femme d’être soumise est de l’être comme au Seigneur. Mais ils sont soumis l’un à l’autre.

      Je pense que Saint Paul, à titre personnel, n’avait pas une très bonne opinion des femmes, cela se sent à de nombreux endroits. Mais en transmettant la Parole de Dieu, il a donné de nombreux éléments aussi qui montrent que la femme est égale à l’homme et que dans le couple, ils doivent être soumis l’un à l’autre. Saint Jean-Paul II l’explique autrement dans le texte que je vous ai indiqué.

      • Pelostome

        Bonjour,

        c’est assez étrange. En fait, le passage qui m’était resté en tête ne venait pas de la lettre aux Ephésiens mais de celle aux Colossiens (3-18) : « Vous les femmes, soyez soumises à votre mari ; dans le Seigneur, c’est ce qui convient. »

        Il se trouve qu’un dimanche, le lecteur de la 2° lecture a fait une légère faute de ponctuation ; il a dit : « Vous les femmes, soyez soumises à votre mari dans le Seigneur ; c’est ce qui convient ». Mon père et moi l’avons tous les deux remarqué. Nous trouvions ce sens plus adapté à la réalité de l’amour. Nous avons vérifié : hélas, c’est bien la première version qui est indiquée dans les traductions officielles de la Bible. Le lecteur s’était bien trompé, nous avons eu un faux espoir.

        Pourtant, si je ne m’abuse, le grec comme le latin ignoraient la ponctuation. Et par ailleurs, la lettre aux Ephésiens et le commentaire de Jean-Paul II que vous citez semblent parfaitement en phase avec la faute de ponctuation du lecteur dominical : « L’auteur sait que cette attitude, si profondément enracinée dans les mœurs et la tradition religieuse du temps, doit être comprise et vécue d’une manière nouvelle, comme une « soumission mutuelle dans la crainte du Christ » ».

        J’en viens à me demander comment la position du point-virgule a été choisie.

        J’ai l’impression que l’Église déploie des trésors d’éloquence pour « déplacer des points-virgules » afin d’adapter le sens des textes bibliques à la lente prise de conscience de l’humanité sur des sujets de civilisation, tout en s’abstenant soigneusement de remettre en cause les auteurs des textes, et surtout ne jamais reconnaître qu’ils aient pu se tromper – voire qu’elle-même ait pu se tromper. Cela fait partie d’une réflexion plus large qui est encore en chantier dans ma tête. Je reviendrai probablement sur cela d’ici quelque temps.

        • Cat-modératrice

          Bonsoir,

          L’Église catholique a décidé de ne pas suivre plusieurs passages des épîtres de Saint Paul.

          Par exemple :

          Comme dans toutes les Églises des saints,
          que les femmes se taisent dans les assemblées, car il ne leur est pas permis de prendre la parole ; qu’elles se tiennent dans la soumission, selon que la Loi même le dit. Si elles veulent s’instruire sur quelque point, qu’elles interrogent leur mari à la maison ; car il est inconvenant pour une femme de parler dans une assemblée. (1Corinthiens 14, 33-35)

          Si internet avait existé à l’époque, il aurait sans doute interdit aux femmes de donner leur avis sur la foi sur internet…

          Autre exemple :

          Toute femme qui prie ou prophétise le chef découvert fait affront à son chef ; c’est exactement comme si elle était tondue. Si donc une femme ne met pas de voile, alors, qu’elle se coupe les cheveux ! Mais si c’est une honte pour une femme d’avoir les cheveux coupés ou tondus, qu’elle mette un voile.

          L’homme, lui, ne doit pas se couvrir la tête, parce qu’il est l’image et le reflet de Dieu ; quant à la femme, elle est le reflet de l’homme. Ce n’est pas l’homme en effet qui a été tiré de la femme, mais la femme de l’homme ; et ce n’est pas l’homme, bien sûr, qui a été créé pour la femme, mais la femme pour l’homme.

          Voilà pourquoi la femme doit avoir sur la tête un signe de sujétion, à cause des anges. Aussi bien, dans le Seigneur, ni la femme ne va sans l’homme, ni l’homme sans la femme ; car, de même que la femme a été tirée de l’homme, ainsi l’homme naît par la femme, et tout vient de Dieu.

          Jugez-en par vous-mêmes. Est-il convenable que la femme prie Dieu la tête découverte ? La nature elle-même ne vous enseigne-t-elle pas que c’est une honte pour l’homme de porter les cheveux longs, tandis que c’est une gloire pour la femme de les porter ainsi ? Car la chevelure lui a été donnée en guise de voile. Au reste, si quelqu’un se plaît à ergoter, tel n’est pas notre usage, ni celui des Églises de Dieu. (1Corinthiens 11, 16)

          Je trouve ce texte encore plus dur pour les femmes que ceux que nous avons cités précédemment.

          Dans les cas de ces deux textes, l’Église a décidé de permettre aux femmes de s’exprimer dans les assemblées et même d’enseigner, et elle a décidé de permettre aux femmes d’aller à l’église tête nue. L’argument est que les ordres de Paul sur ces questions étaient liés au contexte historique. Quand à l’affirmation : « L’homme est l’image et le reflet de Dieu ; quant à la femme, elle est le reflet de l’homme », je pense qu’elle n’a pas été retenue parce qu’elle est en contradiction avec tout ce qu’enseigne la Bible par ailleurs. Quand il y a des enseignements contradictoires dans la Bible, il faut discerner ce que Dieu veut vraiment nous enseigner.

          Il ne faut pas oublier que l’Église catholique n’est pas une « religion du livre », mais qu’elle considère que la révélation utilise deux canaux : les Écritures et la Tradition de l’Église, qui est l’interprétation de l’Écriture par l’Église, interprétation qui progresse avec le temps. Si parfois l’Église tranche sur des points qui ne semblent pas évidents dans la Bible, c’est parce qu’elle considère que l’Esprit Saint lui en donne le charisme. Parfois même elle proclame des dogmes qui sont une conséquences de ce que dit la Bible, mais qui ne sont pas directement dans la Bible, comme les dogmes de l’Immaculée Conception ou de l’Assomption.

          • Pelostome

            Bonjour,

            vous me stupéfierez toujours par votre culture biblique. Cela dit, les 2 exemples que vous citez renforcent encore plus mon interrogation initiale.

            J’entends bien que l’Église s’appuie à la fois sur la Bible et la tradition. Peut-être est-ce pour cela qu’elle n’a pas purement et simplement déclaré ces passages apocryphes, comme c’est le cas pour le jugement de Daniel dans l’affaire de Suzanne chez les protestants ?

            Au passage, j’ai entendu parler de jeunes filles adeptes du « voile chrétien » (entre autres sur Tiktok) qui se réfèrent explicitement à cette lettre aux Corinthiens. Serait-ce à dire que cette tendance, comme les communautés nouvelles dans les années 1970, vient des églises protestantes, qui ne reconnaissent que la Bible comme inspirée ? Quelle est la position de l’Église catholique sur ces pratiques puisqu’elle réfute la lettre de Saint Paul ?

            Au-delà, une triple question demeure :

            * d’accord, l’Église considère que ces prescriptions de Saint Paul sont liées au contexte historique ; mais ça n’explicite pas les raisons pour lesquelles elle les rejette : quelles sont ces raisons ?
            * à quelle époque l’Église a-t-elle décidé de permettre aux femmes de participer aux assemblées tête nue ? Plutôt au Moyen-Âge ou plutôt à Vatican II ? Autant que je sache, il y a un tout petit peu plus d’un siècle, les femmes occidentales étaient elles aussi tenues de se couvrir la tête, par un fichu pour les plus modestes, un chapeau pour les plus aisées. Quant à prendre la parole en assemblée, je n’ose même pas poser la question. Je ne parle pas des écrits mystiques de nombreuses saintes, pour la plupart religieuses. Le fait est qu’avant Vatican II, à moins que je me trompe encore une fois, le ministère de la Parole était exclusivement réservé aux prêtres, et ni les hommes, ni les femmes ne prenaient la parole en assemblée
            * enfin, quand vous écrivez « l’Église a décidé », quel est le texte officiel qui exprime clairement cette décision ?

            J’imagine que, si l’Église a décidé d’aller contre le texte de Saint Paul, elle s’est débrouillée pour le faire sans le désavouer ; c’était le sens de ma remarque précédente (« s’abstenant soigneusement de remettre en cause les auteurs des textes, et surtout ne jamais reconnaître qu’ils aient pu se tromper »). C’est pourquoi je suis attaché à ces points précis.

            • Cat-modératrice

              Bonjour Pelostome,

              Pardon pour le délai de ma réponse.

              Vous dites :

              J’entends bien que l’Église s’appuie à la fois sur la Bible et la tradition. Peut-être est-ce pour cela qu’elle n’a pas purement et simplement déclaré ces passages apocryphes, comme c’est le cas pour le jugement de Daniel dans l’affaire de Suzanne chez les protestants ?

              L’Église ne peut pas déclarer apocryphe un passage qui fait déjà partie de la Bible. C’est l’Église qui a décidé de quels textes feraient partie du Nouveau Testament. À l’époque où cela a été fait, les propos de Paul semblaient logiques à beaucoup de gens. Pas à tous, puisqu’il s’adresse à des personnes qui ne pensent pas comme lui. Dans ses lettres, Paul dit aussi que les esclaves chrétiens ne doivent pas chercher à quitter leur condition d’esclave – tout en exhortant Philémon à affranchir son esclave Onésime. Mais l’Église a cheminé et a compris que l’esclavage était absolument mauvais. Pour autant cela ne disqualifie pas les écrits de Paul dans leur ensemble. Il écrit des choses sublimes par ailleurs.

              Vous écrivez :

              Au passage, j’ai entendu parler de jeunes filles adeptes du « voile chrétien » (entre autres sur Tiktok) qui se réfèrent explicitement à cette lettre aux Corinthiens. Serait-ce à dire que cette tendance, comme les communautés nouvelles dans les années 1970, vient des églises protestantes, qui ne reconnaissent que la Bible comme inspirée ? Quelle est la position de l’Église catholique sur ces pratiques puisqu’elle réfute la lettre de Saint Paul ?

              Je n’ai pas entendu parler de ces jeunes filles. Cela semble une pratique plus protestante en effet, quoiqu’il y ait des fondamentalistes dans l’Église catholique aussi. L’Église catholique n’interdit pas aux femmes de porter un voile. Ce serait plutôt le rôle des accompagnateurs spirituels et des enseignants d’aider les jeunes à se sentir libres sur ce point.

              Vous écrivez :

              * d’accord, l’Église considère que ces prescriptions de Saint Paul sont liées au contexte historique ; mais ça n’explicite pas les raisons pour lesquelles elle les rejette : quelles sont ces raisons ?

              Je ne connais pas de texte officiel expliquant les raisons, mais je pense qu’il s’agit d’une prise de conscience du contexte historique et culturel de ces prescriptions, et la volonté d’avancer dans le sens de l’égalité entre homme et femme.

              Vous avez écrit :

              * à quelle époque l’Église a-t-elle décidé de permettre aux femmes de participer aux assemblées tête nue ? Plutôt au Moyen-Âge ou plutôt à Vatican II ? Autant que je sache, il y a un tout petit peu plus d’un siècle, les femmes occidentales étaient elles aussi tenues de se couvrir la tête, par un fichu pour les plus modestes, un chapeau pour les plus aisées. Quant à prendre la parole en assemblée, je n’ose même pas poser la question. Je ne parle pas des écrits mystiques de nombreuses saintes, pour la plupart religieuses. Le fait est qu’avant Vatican II, à moins que je me trompe encore une fois, le ministère de la Parole était exclusivement réservé aux prêtres, et ni les hommes, ni les femmes ne prenaient la parole en assemblée

              En ce qui concerne le port du voile à la messe, le code de droit canonique de 1917 le demande encore, au canon n°1262 : « Quand ils assistent aux fonctions sacrées, spécialement à la messe, soit à l’église, soit au dehors, les hommes doivent être découverts, à moins que les circonstances n’imposent le contraire, ou que les usages n’exigent qu’ils restent couverts ; quant aux femmes elles doivent avoir la tête couverte et être vêtues modestement, surtout quand elles s’approchent de la sainte table. »

              Dans le code de droit canonique suivant, en vigueur aujourd’hui, celui de 1983, cette obligation ne figure plus. Je pense que l’évolution s’est produite dans la mouvance de Vatican II et a été entérinée par le nouveau code de droit canonique.

              Quand à la question de parler dans les assemblée, si l’on entend par assemblée la messe, aujourd’hui cela est toujours réservé au prêtre. Ce passage de Saint Paul est parfois interprété ainsi, mais dans ce cas, pourquoi Saint Paul dit-il que les femmes ne doivent pas parler et non pas que les laïcs ne doivent pas parler ? Je n’ai pas trouvé les textes officiels concernant ce sujet, mais il est clair que l’Église considère aujourd’hui que les femmes peuvent enseigner et qu’elles n’ont pas forcément besoin que leur mari leur explique une fois rentrés à la maison.

              Vous écrivez :

              * enfin, quand vous écrivez « l’Église a décidé », quel est le texte officiel qui exprime clairement cette décision ?

              Pour le voile, comme je vous l’ai dit, je n’ai pas trouvé de texte officiel mais la disparition de son obligation dans le droit. Pour le fait de parler en assemblée, si on désigne la messe, l’interdiction existe toujours mais pas que pour les femmes puisque seuls les prêtres et les diacres peuvent prêcher. En ce qui concerne la fonction d’enseigner en général, il y a même aujourd’hui des femmes qui enseignent à des séminaristes. Il est visible que l’Église n’interdit pas à l’heure actuelle les enseignements par des femmes. Je n’ai pas de texte officiel.

              Vous écrivez :

              J’imagine que, si l’Église a décidé d’aller contre le texte de Saint Paul, elle s’est débrouillée pour le faire sans le désavouer ; c’était le sens de ma remarque précédente (« s’abstenant soigneusement de remettre en cause les auteurs des textes, et surtout ne jamais reconnaître qu’ils aient pu se tromper »). C’est pourquoi je suis attaché à ces points précis.

              L’Église distingue ce qui concerne la foi et les mœurs et ce qui concerne les décisions disciplinaires. Les décisions disciplinaires désignent les décisions prises dans le cadre du gouvernement de l’Église mais qui ne concernent pas la foi. Ces décisions ont été prises, mais aussi bien une autre aurait pu être prise. Contrairement à la question de l’indignité de l’esclavage, la question du voile à la messe est une question disciplinaire, donc il n’y a pas de problème pour faire autrement que ce que dit Saint Paul.

              • Pelostome

                Bonsoir,

                c’est incroyable comme les détails des prescriptions de l’Église sont complexes… Jusqu’à maintenant, j’ai principalement admiratif de votre culture, mais là, je me dis que vous devez passer un temps fou à chercher des réponses à mes questions ; merci.

                Hélas, ce que vous me dites me rend encore plus perplexe : vous soulignez la différence entre les décisions concernant la foi et les mœurs, en citant l’exemple de l’esclavage, et les décisions disciplinaires, en particulier concernant le fait de porter ou non un voile pour les femmes. Mais comment pouvons-nous distinguer les unes des autres ? Quand l’Église s’est-elle prononcée clairement contre l’esclavage, sachant que celui-ci a perduré jusqu’au XIX° siècle ? Et puisque vous me dites qu’il n’y a pas de problème à faire autrement que ce que dit St Paul sur le port ou non du voile, cela signifie donc qu’il y a un problème à faire autrement que ce qu’il dit sur l’esclavage ? Comment l’Église se remet-elle en question sur un tel problème ? C’est ça que j’aimerais comprendre.

                • Cat-modératrice

                  Bonjour Pelostome,

                  En effet, la limite entre une décision disciplinaire et une décision concernant la foi et les mœurs peut être parfois difficile à discerner. Dans l’Église catholique, l’un des rôles du magistère est de faire ce discernement, avec l’aide de l’Esprit Saint, et l’aide de tous les chercheurs qui sont invités à donner leur avis mais n’ont pas le dernier mot.

                  La question de l’esclavage n’est pas une question disciplinaire (heureusement), mais il n’y a pas de problème à dépasser le point de vue de Paul. Voici les textes où Paul s’exprime sur l’esclavage :

                  • Que chacun demeure dans l’état où l’a trouvé l’appel de Dieu. Étais-tu esclave, lors de ton appel ? Ne t’en soucie pas. Et même si tu peux devenir libre, mets plutôt à profit ta condition d’esclave. Car celui qui était esclave lors de son appel dans le Seigneur est un affranchi du Seigneur ; pareillement celui qui était libre lors de son appel est un esclave du Christ. Vous avez été bel et bien achetés ! Ne vous rendez pas esclaves des hommes. Que chacun, frères, demeure devant Dieu dans l’état où l’a trouvé son appel. 1Corinthiens 7, 20-24.
                  • Tous ceux qui sont sous le joug de l’esclavage doivent considérer leurs maîtres comme dignes d’un entier respect, afin que le nom de Dieu et la doctrine ne soient pas blasphémés. Quant à ceux qui ont pour maîtres des croyants, qu’ils n’aillent pas les mépriser sous prétexte que ce sont des frères; qu’au contraire ils les servent d’autant mieux que ce sont des croyants et des amis de Dieu qui bénéficient de leurs services. 1 Timothée 6, 1-2.
                  • Vous vous êtes dépouillés du vieil homme avec ses
                    agissements, et vous avez revêtu le nouveau, celui qui s’achemine vers la vraie connaissance en se renouvelant à l’image de son Créateur. Là, il n’est plus question de Grec ou de Juif, de circoncision ou d’incirconcision, de Barbare, de Scythe, d’esclave, d’homme libre; il n’y a que le Christ, qui est tout et en tout. Colossiens 3, 9-11
                  • Esclaves, obéissez en tout à vos maîtres d’ici-bas, non d’une obéissance tout extérieure qui cherche à plaire aux hommes, mais en simplicité de cœur, dans la crainte du Maître. Colossiens, 3, 22.
                  • Maîtres, accordez à vos esclaves le juste et l’équitable, sachant que, vous aussi, vous avez un Maître au ciel. Colossiens 4, 1
                  • Esclaves, obéissez à vos maîtres d’ici-bas avec crainte et tremblement, en simplicité de cœur, comme au Christ ; non d’une obéissance tout extérieure qui cherche à plaire aux hommes, mais comme des esclaves du Christ, qui font avec âme la volonté de Dieu. Que votre service empressé s’adresse au Seigneur et non aux hommes, dans l’assurance que chacun sera payé par le Seigneur selon ce qu’il aura fait de bien, qu’il soit esclave ou qu’il soit libre. Et vous, maîtres, agissez de même à leur égard ; laissez de côté les menaces, et dites-vous bien que, pour eux comme pour vous, le Maître est dans les cieux, et qu’il ne fait point acception des personnes. Éphésiens 6, 4-9.
                  • Vous tous en effet, baptisés dans le Christ, vous avez revêtu le Christ : il n’y a ni Juif ni Grec, il n’y a ni esclave ni homme libre, il n’y a ni homme ni femme ; car tous vous ne faites qu’un dans le Christ Jésus. Galates 3, 27-28
                  • Que les esclaves soient soumis en tout à leurs maîtres, cherchant à leur donner satisfaction, évitant de les contredire, ne commettant aucune indélicatesse, se montrant au contraire d’une parfaite fidélité : ainsi feront-ils honneur en tout à la doctrine de Dieu notre Sauveur. Tite 2, 9-10
                  • La courte lettre à Philémon est consacrée à ce sujet : Philémon et son esclave Onésime sont chrétiens. Onésime s’est enfui, et a rejoint Paul pour le soutenir. Paul renvoie Onésime à Philémon en demandant, d’une manière très appuyée à Philémon, de redonner sa liberté à Onésime. Paul dit que Philémon est libre d’accepter ou non, mais il est très pressant. Extrait :
                    Peut-être aussi Onésime ne t’a-t-il été retiré pour un temps qu’afin de t’être rendu pour l’éternité, non plus comme un esclave, mais bien mieux qu’un esclave, comme un frère très cher : il l’est grandement pour moi, combien plus va-t-il l’être pour toi, et selon le monde et selon le Seigneur ! Si donc tu as égard aux liens qui nous unissent, reçois-le comme si c’était moi. Et s’il t’a fait du tort ou te doit quelque chose, mets cela sur mon compte. Moi, Paul, je m’y engage de ma propre écriture : c’est moi qui réglerai… Pour ne rien dire de la dette qui t’oblige toujours à mon endroit, et qui est toi-même ! Allons, frère, j’attends de toi ce service dans le Seigneur ; soulage mon cœur dans le Christ. Je t’écris avec pleine confiance en ta docilité : je sais bien que tu feras plus encore que je ne demande. Philémon 1, 15-21.

                  Dans ces textes, Saint Paul ne donne pas d’enseignement doctrinal concernant l’esclavage. Il n’affirme pas que l’esclavage est juste. Il considère l’esclavage comme un fait, il semble penser que c’est un élément obligé de la société. Le fait qu’il ne dise pas de lutter contre l’esclavage, qu’il dise aux esclaves d’accepter leur condition, et qu’il dise à Philémon qu’il est libre de garder Onésime en esclavage même s’il préfèrerait qu’il l’affranchisse, est une façon d’affirmer la légitimité de l’esclavage, mais il ne théorise pas cette légitimité. Il donne plutôt des conseils spirituels aux esclaves, les invitant à accepter la condition dans laquelle ils sont et à s’acquitter de leur travail le mieux possible.

                  Saint Paul s’oriente tout de même dans le sens d’une libération de l’esclavage quand il dit que dans le Christ tous sont égaux (Col 3, 9-11 et Gal 3, 27-28), et quand il pousse Philémon à affranchir son esclave pour retrouver un frère. Ce ne sont que des prémices, visiblement Saint Paul a du mal à imaginer une société sans esclavage.

                  Avec ces éléments, on ne peut pas dire que l’évolution de l’Église vers la condamnation de l’esclavage soit une trahison des enseignements de Paul. Paul enseigne une spiritualité de l’acceptation de sa condition. On peut dire que son acceptation de l’esclavage, avec des recommandations de bonne conduite aux esclaves et aux maîtres, est un peu comme l’acceptation du divorce par Moïse : le peuple de Dieu et ses chefs ne sont pas encore capables d’y voir clair sur le sujet, mais il s’agit d’un premier pas dans le bon sens.

                  Ce n’est qu’au concile Vatican II que l’on trouve une condamnation universelle de l’esclavage, dans Gaudium et Spes, en 1965, et en 1992 le pape Jean-Paul II exprime une repentance officielle de l’Église pour ses complicités dans l’esclavage. Entre le IXe et le XXe siècle, il y a eu un certain nombre d’interventions de papes s’opposant à l’esclavage dans tel ou tel contexte précis, sans que cela devienne une condamnation globale de l’Église. Malheureusement, il y a eu aussi des approbations de pratiques d’esclavage par d’autres papes.

  8. Pelostome

    Bonsoir,

    Merci pour toutes ces précisions. Elles montrent bien, à la fois la sollicitude de Saint Paul pour tous les êtres humains, esclaves et maîtres, et son impuissance personnelle à remettre en question une loi qui semble, à l’époque, aussi naturelle que celle de la gravitation universelle.

    Cela me conforte dans l’analyse que je poursuis depuis plusieurs semaines. Si j’ai bien compris, le Concile de Trente a fait le tri dans les livres bibliques en rejetant (entre autres) les évangiles apocryphes et en gardant les canoniques, et elle n’a jamais remis en question telle ou telle partie de tel ou tel livre au motif qu’elle s’interdit de rejuger une nouvelle fois ce qu’elle a déjà énoncé.

    Cette stabilité a un prix à payer particulièrement important ; le fait que l’Église catholique ait attendu quasiment un siècle pour condamner officiellement l’esclavage montre à quel point elle est sensible à la pesanteur. Mais, sans aller jusqu’à ce point dans la dignité de la personne, j’ai bien l’impression qu’il existe des extravagances encore plus folles dans la manière dont l’Église traite certains sujets.

    J’ai essayé d’en savoir un peu plus sur trois autres points historiques qui me paraissent fondamentaux. Le premier concerne la Réforme. Il me semble impérieux de souligner que Luther n’a jamais voulu du schisme. Il souhaitait simplement réformer l’Église de l’intérieur tout comme Jésus n’a jamais voulu abolir le judaïsme mais l’accomplir. Au final, de la même manière que les juifs chrétiens ont été exclus de leur propre religion, Luther a été excommunié. Les protestants ont été massacrés. Aujourd’hui, des siècles ont passé. Catholiques et protestants se parlent. L’Église catholique, lorsqu’elle a lancé la « Contre-Réforme », n’a fait rien d’autre que se réformer, comme le souhaitait Luther.

    Est-ce à dire que l’Église catholique reconnaît que Luther avait raison ? Hélas, ça ne semble pas être le cas. En 1998, Jean-Paul II a écrit une lettre de repentance au nom de l’Église catholique, dans laquelle il reconnaît, regrette et demande pardon au peuple juif pour l’antisémitisme de certains (voire nombreux) catholiques. Cette lettre contient-elle le moindre soupçon de demande de pardon aux protestants, excommuniés et massacrés par l’Église en tant qu’institution ? Je n’en ai pas l’impression. Il aura fallu attendre une bonne quinzaine d’années de plus pour que François formule cette demande de pardon.

    L’un des reproches les plus virulents de Luther concernait le commerce des indulgences. Il semble que le rachat de ses fautes contre espèces sonnantes et trébuchantes ne soit plus monnaie courante, si j’ose dire. Mais pour autant que je sache, les indulgences n’ont jamais été abolies par l’Église catholique. Elle n’en parle simplement plus. Elle a fait en sorte de les faire oublier. Elle demande pardon pour ses actes, sans reconnaître de quelque manière que ce soit ses erreurs.

    Le second point à étudier concerne le procès intenté à Galilée. Je ne connaissais que très peu de choses sur cette affaire. Je ne savais pas que Galilée avait repris les thèses de Nicolas Copernic ; que des gens d’Église haut placés prêtaient une oreille bienveillante à ses propos, malgré la menace que ceux-ci faisaient peser sur l’inerrance biblique ; que si Galilée a été condamné, ce n’est pas officiellement pour avoir soutenu la révolution copernicienne, mais pour avoir présenté comme certitude ce qui ne pouvait matériellement être reconnu à l’époque que comme une hypothèse.

    Là encore, la lettre de repentance de Jean-Paul II reconnaît que l’Église l’a condamné à tort… mais il semble prendre un malin plaisir à souligner que Galilée, qui a été l’un des pères de l’expérimentation scientifique méthodique, n’a pas appliqué sa propre méthode à ses propres propos. On a l’impression qu’il « repêche » Galilée… en prenant bien soin de lui maintenir la tête sous l’eau.

    Au sens strict, il a raison. Moi, ce qui m’importe, c’est que l’Église a « résolu » la question de l’inerrance biblique en partant du principe que la Bible ne se trompe pas sur des questions de foi, et que les questions scientifiques ne font pas partie de son champ de compétences. Conséquence directe : autant que je sache, l’Église n’a jamais reconnu que Galilée avait raison d’un point de vue scientifique. Elle s’abstient soigneusement de prendre position scientifiquement parlant. En ce sens, dans les faits, elle n’a pas changé de position depuis Léon XIII.

    Le troisième cas que je souhaite évoquer, complète admirablement cette optique : il s’agit de l’évolution des espèces décrite par Charles Darwin. Ses travaux ont profondément ébranlé l’Église, à une époque où le formidable essor de l’archéologie a également largement remis en cause la lecture littérale des écrits bibliques. D’une certaine manière, c’est tant mieux : la qualité de la foi s’est, je pense, fortifiée, « éprouvée », pour reprendre le terme de St Pierre.

    Probablement échaudée par l’expérience de Galilée, l’Église reconnaît aujourd’hui que, je cite, « l’évolution des espèces est plus qu’une hypothèse ». « Plus qu’une hypothèse » ! C’est du grand art. Au moins, aucun pape n’aura besoin d’écrire une lettre de repentance concernant Darwin, avec une formule aussi prudente. Pour ménager la chèvre et le chou, on n’a pas trouvé plus éclatant.

    Car de manière implicite, le catéchisme de l’Église catholique est en contradiction flagrante avec cette apparente reconnaissance de la véracité de Darwin, puisqu’il déclare noir sur blanc, en $376, que le premier homme et la première femme, avant leur chute, ne pouvaient ni souffrir, ni mourir.

    Ainsi donc, la mort physiologique ne concernerait naturellement « que » 99,999999999 % des espèces vivantes ; la mort physiologique des humains n’aurait aucunement une cause naturelle mais uniquement spirituelle : le péché, énoncé clairement comme une désobéissance délibérée à des ordres divins dont ils auraient eu connaissance de manière sure, certaine et pleinement intelligible.

    Cela revient donc à dire qu’il existe une différence fondamentale entre l’espèce humaine et les autres primates, non seulement d’un point de vue spirituel, mais également physiologique, puisque le premier couple n’était pas soumis à la mort physique avant de « désobéir à Dieu ». Donc tous les primates – en fait : tous les êtres vivants – seraient le produit de l’évolution des espèces, sauf les hommes et les femmes, créés directement par Dieu. Sommes-nous si loin des enseignements fondamentalistes de certaines Églises aux Etats-Unis ?

    Excusez-moi, mais quand je lis ce genre d’affirmation, je pense sincèrement que l’Église a encore beaucoup de chemin à faire pour reconnaître humblement ses erreurs. Elle ne l’a pas vraiment fait concernant la Réforme, ni l’astronomie, ni la biologie. Or les questions de sexualité concernent un domaine encore plus neuf : les sciences humaines.

    Sachant que Jésus prend position sur le remariage mais pas sur la sexualité hors mariage, et encore moins sur la masturbation – dont vous avez souligné vous-même qu’elle est totalement absente de la Bible – il ne reste que la tradition et le magistère pour tenter de légitimer les positions actuelles de l’Église à ce propos. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que les exemples ci-dessus, tout comme celui de l’esclavage, nous amènent à douter de la pertinence de ses réactions sur les sujets de société.

    Quand l’Église aura – entre autres – clarifié sa position sur les soi-disants « premier homme » et « première femme » vis-à-vis de l’évolution des espèces, elle sera peut-être en position d’être entendue sur ces sujets. En attendant ce jour, est-ce que tout un chacun ne devrait pas adopter par rapport à ses avis sur les questions affectives et sexuelles, le même doute prudent qu’elle s’accorde elle-même par rapport aux sciences ?

    • Cat-modératrice

      Bonjour Pelostome,

      Discuter avec vous est très intéressant, et vous m’obligez, ou plutôt me donnez l’occasion, presque à chaque fois, de faire des recherches !

      Vous écrivez :

      Merci pour toutes ces précisions. Elles montrent bien, à la fois la sollicitude de Saint Paul pour tous les êtres humains, esclaves et maîtres, et son impuissance personnelle à remettre en question une loi qui semble, à l’époque, aussi naturelle que celle de la gravitation universelle.

      C’est sûr que cet aveuglement, dû au contexte historique, invite à l’humilité dans la réflexion théologique.

      Vous écrivez :

      Cela me conforte dans l’analyse que je poursuis depuis plusieurs semaines. Si j’ai bien compris, le Concile de Trente a fait le tri dans les livres bibliques en rejetant (entre autres) les évangiles apocryphes et en gardant les canoniques, et elle n’a jamais remis en question telle ou telle partie de tel ou tel livre au motif qu’elle s’interdit de rejuger une nouvelle fois ce qu’elle a déjà énoncé.

      Si j’ai bien compris, le concile de Trente a seulement confirmé la liste des livres, suite au schisme protestant, les protestant ayant remis en cause la liste des livres. Le canon du Nouveau Testament a été fixé au concile de Rome de 382. Mais il est à noter que Saint Pierre considère déjà que les écrits de Paul font partie du canon des écritures : « Tenez la longanimité de notre Seigneur pour salutaire, comme notre cher frère Paul vous l’a aussi écrit selon la sagesse qui lui a été donnée. Il le fait d’ailleurs dans toutes les lettres où il parle de ces questions. Il s’y rencontre des points obscurs, que les gens sans instruction et sans fermeté détournent de leur sens – comme d’ailleurs les autres Écritures – pour leur propre perdition. » 2e Lettre de Pierre 3, 14-16.

      Pierre parle donc des écrits de Paul et des « autres Écritures », laissant entendre que les écrits de Paul font partie du canon des Écritures.

      Vous écrivez :

      Cette stabilité a un prix à payer particulièrement important ; le fait que l’Église catholique ait attendu quasiment un siècle pour condamner officiellement l’esclavage montre à quel point elle est sensible à la pesanteur.

      Il n’y aurait pas de Bible sans stabilité du canon. L’Église ne peut pas modifier la Bible au fur et à mesure de l’évolution de sa réflexion. Ou sinon l’a Bible n’est plus un livre inspiré sur lequel l’Église s’appuie dans sa recherche de la vérité.

      La lenteur à condamner l’esclavage n’est pas, je pense due aux écrits de Paul. Paul n’a pas écrit une doctrine justifiant l’esclavage. C’est le contexte historique qui a rendu difficile à l’Église, comme à tous les êtres humains de l’époque, de prendre conscience de la profonde injustice de cette institution. Cela nous paraît incroyable aujourd’hui, cela nous semble tellement évident que l’esclavage va à l’encontre de la dignité humaine. Mais il faut être capable de prendre en considération un univers mental qui était tellement différent.

      Vous écrivez :

      J’ai essayé d’en savoir un peu plus sur trois autres points historiques qui me paraissent fondamentaux. Le premier concerne la Réforme. Il me semble impérieux de souligner que Luther n’a jamais voulu du schisme. Il souhaitait simplement réformer l’Église de l’intérieur tout comme Jésus n’a jamais voulu abolir le judaïsme mais l’accomplir. Au final, de la même manière que les juifs chrétiens ont été exclus de leur propre religion, Luther a été excommunié.

      Luther a d’abord rompu avec l’Église avant d’être excommunié. Il a brûlé en public la bulle du pape Léon X où celui-ci lui demandait de revenir sur ses 95 thèses. Il a ainsi manifesté sa rupture avec l’Église en 1521. Il est excommunié un an plus tard. Contrairement à beaucoup de saints qui, devant les erreurs de la hiérarchie, sont restés dans l’Église et dans l’obéissance, et ont pu ensuite réellement transformé l’Église de l’intérieur, Luther a très vite préféré faire schisme. De fait, Luther a vécu à une époque où l’Église catholique était dans un état particulièrement lamentable, et même si je ne l’approuve pas, je ne peux pas affirmer que je n’aurais pas fait pareil à sa place. Par la suite, sa doctrine s’est beaucoup plus éloignée de la doctrine catholique que ce que l’on voit dans les 95 thèses.

      Vous écrivez :

      Les protestants ont été massacrés.

      C’est bien sûr absolument abominable. Des catholiques ont massacré des protestants par fanatisme religieux. Encore plus l’ont fait par calcul politique. Dans les pays devenus protestants, des catholiques ont été massacrés. Au XXe siècle des régimes athées ont massacré des croyants. Comme pour la pédophilie, c’est encore plus grave quand c’est un chrétien qui fait du mal à son prochain. Mais malheureusement c’est inhérent à l’humanité et non à la religion. Mais je suis d’accord, cela n’excuse pas les crimes de l’Église.

      Vous écrivez :

      Est-ce à dire que l’Église catholique reconnaît que Luther avait raison ?

      L’Église catholique ne peut pas reconnaître que Luther avait raison sur tout, car sa doctrine est radicalement incompatible avec la doctrine catholique. Il avait bien entendu raison au sujet de la vente d’indulgences, et l’Église a eu bien entendu tort d’encourager le meurtre de protestants.

      Vous écrivez :

      Hélas, ça ne semble pas être le cas. En 1998, Jean-Paul II a écrit une lettre de repentance au nom de l’Église catholique, dans laquelle il reconnaît, regrette et demande pardon au peuple juif pour l’antisémitisme de certains (voire nombreux) catholiques. Cette lettre contient-elle le moindre soupçon de demande de pardon aux protestants, excommuniés et massacrés par l’Église en tant qu’institution ? Je n’en ai pas l’impression. Il aura fallu attendre une bonne quinzaine d’années de plus pour que François formule cette demande de pardon.

      Le 12 mars 2000, Jean-Paul II a fait une cérémonie de demande de pardon très large, où étaient incluses les guerres de religion, les conversion forcées, etc. Cela fait de nombreuses décennies que les catholiques et les protestants ont commencé à discuter ensemble, et même il y a eu une déclaration commune de deux branches protestantes avec les catholiques concernant le point théologique du salut par la grâce de Dieu, en 1999. Si de tels progrès dans la communion ont pu se faire, il me semble que forcément, d’une manière ou d’une autre, les choses devaient être claires entre les partis concernant les crimes du passé.

      Vous écrivez :

      L’un des reproches les plus virulents de Luther concernait le commerce des indulgences. Il semble que le rachat de ses fautes contre espèces sonnantes et trébuchantes ne soit plus monnaie courante, si j’ose dire. Mais pour autant que je sache, les indulgences n’ont jamais été abolies par l’Église catholique. Elle n’en parle simplement plus. Elle a fait en sorte de les faire oublier. Elle demande pardon pour ses actes, sans reconnaître de quelque manière que ce soit ses erreurs.

      La vente d’indulgences était un acte de simonie. Les indulgences existent toujours. C’est une pratique spirituelle encouragée dans l’Église, mais cela n’a plus rien à voir avec ce qui se passait à l’époque de Luther. L’indulgence est une grâce spéciale de libération des conséquences de nos péchés, qui est accordée lors de certaines pratiques spirituelles : pèlerinage, soutien à un malade lors de la journée des malades, écouter la bénédiction Ubi et Orbi du pape à Pâques ou à Noël, etc. Pour en bénéficier il faut aussi se confesser, communier et prier aux intentions du pape. Cela n’a rien à voir avec acheter la libération d’un certain nombre de jours de purgatoire après la mort. C’est un encouragement à effectuer des démarches spirituelles, et la promesse que Dieu bénit de telles démarches.

      Vous écrivez :

      Le second point à étudier concerne le procès intenté à Galilée. Je ne connaissais que très peu de choses sur cette affaire. Je ne savais pas que Galilée avait repris les thèses de Nicolas Copernic ; que des gens d’Église haut placés prêtaient une oreille bienveillante à ses propos, malgré la menace que ceux-ci faisaient peser sur l’inerrance biblique ; que si Galilée a été condamné, ce n’est pas officiellement pour avoir soutenu la révolution copernicienne, mais pour avoir présenté comme certitude ce qui ne pouvait matériellement être reconnu à l’époque que comme une hypothèse.

      Là encore, la lettre de repentance de Jean-Paul II reconnaît que l’Église l’a condamné à tort… mais il semble prendre un malin plaisir à souligner que Galilée, qui a été l’un des pères de l’expérimentation scientifique méthodique, n’a pas appliqué sa propre méthode à ses propres propos. On a l’impression qu’il « repêche » Galilée… en prenant bien soin de lui maintenir la tête sous l’eau.

      Je pense que Jean-Paul II a voulu donner les différents éléments de l’affaire. Il ne cherchait certainement pas à minimiser les erreurs de l’Église par les erreurs de Galilée qu’il pointait. Je pense que l’on ne peut pas reprocher à Jean-Paul II d’avoir voulu donner les différents éléments du contexte. D’ailleurs, Jean-Paul II a précisé que ces erreurs de Galilée étaient celles de la plupart des scientifiques de l’époque.

      Vous écrivez :

      Au sens strict, il a raison. Moi, ce qui m’importe, c’est que l’Église a « résolu » la question de l’inerrance biblique en partant du principe que la Bible ne se trompe pas sur des questions de foi, et que les questions scientifiques ne font pas partie de son champ de compétences. Conséquence directe : autant que je sache, l’Église n’a jamais reconnu que Galilée avait raison d’un point de vue scientifique. Elle s’abstient soigneusement de prendre position scientifiquement parlant. En ce sens, dans les faits, elle n’a pas changé de position depuis Léon XIII.

      Le fait que l’Église ait compris que les auteurs bibliques n’avaient pas de prétention scientifique en relatant la création du monde est plutôt une bonne chose, non ? Ces auteurs bibliques n’avaient jamais imaginé que certains prendraient leurs textes au pied de la lettre. Que l’Église comprenne mieux l’intention des auteurs est une bonne chose.

      Dès 1981, Jean-Paul II a créé une commission pour étudier cette question de la condamnation des théories de Copernic et Galilée. Le 31 octobre 1992, la commission a remis ses conclusion et Jean-Paul II les a officiellement annoncées en réhabilitant Galilée.

      Vous écrivez :

      Le troisième cas que je souhaite évoquer, complète admirablement cette optique : il s’agit de l’évolution des espèces décrite par Charles Darwin. Ses travaux ont profondément ébranlé l’Église, à une époque où le formidable essor de l’archéologie a également largement remis en cause la lecture littérale des écrits bibliques. D’une certaine manière, c’est tant mieux : la qualité de la foi s’est, je pense, fortifiée, « éprouvée », pour reprendre le terme de St Pierre.

      Je suis d’accord avec vous.

      Vous écrivez :

      Probablement échaudée par l’expérience de Galilée, l’Église reconnaît aujourd’hui que, je cite, « l’évolution des espèces est plus qu’une hypothèse ». « Plus qu’une hypothèse » ! C’est du grand art. Au moins, aucun pape n’aura besoin d’écrire une lettre de repentance concernant Darwin, avec une formule aussi prudente. Pour ménager la chèvre et le chou, on n’a pas trouvé plus éclatant.

      Dire que la théorie de l’évolution est plus qu’une hypothèse, ce n’est quand même pas ménager la chèvre et le chou. Quand Jean-Paul II l’a dit, cela faisait longtemps que la vérité de cette théorie était admise par tout le monde dans l’Église catholique, sauf par de rares fondamentalistes. Jean-Paul II n’avait besoin de ménager personne en disant que l’Église reconnaissait cette théorie.

      Vous écrivez :

      Car de manière implicite, le catéchisme de l’Église catholique est en contradiction flagrante avec cette apparente reconnaissance de la véracité de Darwin, puisqu’il déclare noir sur blanc, en $376, que le premier homme et la première femme, avant leur chute, ne pouvaient ni souffrir, ni mourir.

      Ainsi donc, la mort physiologique ne concernerait naturellement « que » 99,999999999 % des espèces vivantes ; la mort physiologique des humains n’aurait aucunement une cause naturelle mais uniquement spirituelle : le péché, énoncé clairement comme une désobéissance délibérée à des ordres divins dont ils auraient eu connaissance de manière sure, certaine et pleinement intelligible.

      Cela revient donc à dire qu’il existe une différence fondamentale entre l’espèce humaine et les autres primates, non seulement d’un point de vue spirituel, mais également physiologique, puisque le premier couple n’était pas soumis à la mort physique avant de « désobéir à Dieu ». Donc tous les primates – en fait : tous les êtres vivants – seraient le produit de l’évolution des espèces, sauf les hommes et les femmes, créés directement par Dieu. Sommes-nous si loin des enseignements fondamentalistes de certaines Églises aux Etats-Unis ?

      Je vous avoue que j’avais déjà remarqué des bizarreries dans le Catéchisme de l’Église Catholique par rapport à la Genèse, des passages donnant l’impression que les événements vécus par Adam et Ève étaient historiques. Mais ce n’est pas clairement affirmé non plus. Je ne comprends pas, alors que l’Église reconnaît la théorie de l’évolution. Cela me dérange beaucoup.

      Ce qu’il y a d’historique dans la Genèse, c’est qu’il y a bien eu un premier humain et une première humaine. Qu’ils ont été créés par Dieu, mais à travers l’évolution. Qu’ils étaient en communion avec Dieu, mais qu’ils ont péché, ce qui a créé un éloignement avec Dieu.

      Vous écrivez :

      Excusez-moi, mais quand je lis ce genre d’affirmation, je pense sincèrement que l’Église a encore beaucoup de chemin à faire pour reconnaître humblement ses erreurs. Elle ne l’a pas vraiment fait concernant la Réforme, ni l’astronomie, ni la biologie. Or les questions de sexualité concernent un domaine encore plus neuf : les sciences humaines.

      Comme je l’ai dit plus haut, Jean-Paul II a tout de même fait une demande de pardon assez exhaustive en l’an 2000.

      Sachant que Jésus prend position sur le remariage mais pas sur la sexualité hors mariage, et encore moins sur la masturbation – dont vous avez souligné vous-même qu’elle est totalement absente de la Bible – il ne reste que la tradition et le magistère pour tenter de légitimer les positions actuelles de l’Église à ce propos. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que les exemples ci-dessus, tout comme celui de l’esclavage, nous amènent à douter de la pertinence de ses réactions sur les sujets de société.

      Il est vrai que Jésus ne parle pas du tout de la masturbation.

      Par contre, j’estime qu’il prend position sur la sexualité hors mariage :

      « N’avez-vous pas lu que le Créateur, dès l’origine, les fit homme et femme, et qu’il a dit : Ainsi donc l’homme quittera son père et sa mère pour s’attacher à sa femme, et les deux ne feront qu’une seule chair ? Ainsi ils ne sont plus deux, mais une seule chair. Eh bien ! ce que Dieu a uni, l’homme ne doit point le séparer »

      Le fait de ne faire qu’une seule chair est clairement la conséquence du fait de s’être marié et d’avoir quitté ses parents en s’attachant à sa femme. C’est le fait de ne faire qu’une seule chair qui fait que l’homme et la femme sont unis et qu’il ne faut pas les séparer par un divorce. Le mariage et la sexualité sont intimement liés aux yeux de Jésus.

      Quand l’Église aura – entre autres – clarifié sa position sur les soi-disants « premier homme » et « première femme » vis-à-vis de l’évolution des espèces, elle sera peut-être en position d’être entendue sur ces sujets. En attendant ce jour, est-ce que tout un chacun ne devrait pas adopter par rapport à ses avis sur les questions affectives et sexuelles, le même doute prudent qu’elle s’accorde elle-même par rapport aux sciences ?

      D’après la doctrine catholique, l’Église a autorité sur les questions de foi et de mœurs. C’est la doctrine catholique qui dit que l’on n’est pas obligés d’écouter l’Église quand elle parle de sciences, mais qu’en tant que catholiques, on doit la suivre en matière de foi et de mœurs. Pour ma part, je partage la plupart des avis de l’Église en matière de morale. Sur un certains points j’ai du mal à y voir clair, mais je choisis de rester dans l’obéissance.

      • Pelostome

        Bonsoir,

        il est rare que vous notiez que vous êtes d’accord avec moi, aussi je suis assez content que vous l’exprimiez dans votre réponse sur certains points, même si je ne peux que constater d’autres désaccords.

        Par ailleurs, je crois que c’est la première fois que vous prenez vos distances avec le Catéchisme de l’Église Catholique, en notant que cette lecture qui semble littérale des textes bibliques, et en plus n’est pas clairement assumée, vous « dérange beaucoup ». Vous semblez vouloir concilier l’évolution des espèces et la monogénèse, en professant, si j’ai bien compris, que parmi les milliers de primates sur Terre, Dieu aurait choisi arbitrairement un seul couple en lui insufflant son esprit de telle sorte qu’ils étaient en parfaite communion avec lui ; si on reprend ma remarque sur le CEC, à partir de ce moment, ils auraient donc été totalement soustraits à la souffrance et à la mort, jusqu’à leur « chute ». Il se trouve que c’est exactement l’inverse de ma réflexion.

        Je pense au plus profond de ma chair que la conscience humaine est un processus extrêmement lent, qui progresse de génération en génération, et absolument pas une révélation définitive et instantanée comme le professe l’Église. L’esclavage en est un exemple éloquent, puisqu’il constituait une évidence en Antiquité et un crime aujourd’hui, mais la pédocriminalité en est un encore plus frappant.

        J’ai entendu dire un jour – je suis désolé, je suis incapable de me souvenir où et quand – qu’une relation d’enseignant à élève, en Antiquité, se doublait le plus souvent d’une relation intime d’adulte à enfant sans que cela gêne quiconque. A l’inverse, j’ai entendu sur Radio Notre-Dame un chroniqueur commenter l’affirmation selon laquelle Karol Wojtyla, alors évêque, aurait couvert des agissements pédophiles, en soulignant, d’une part, bien sûr, que ce genre d’allégations devait être considéré avec prudence, mais surtout qu’à cette époque-là (milieu du 20° siècle, quand même), les êtres humains dans leur ensemble n’avaient pas une conscience aussi aigüe des ravages qu’entraînent les abus sexuels.

        Je crois que sa réaction démontre assez bien à quel point la conscience humaine est en perpétuel approfondissement. On peut même aller plus loin, en considérant que si l’Église a aujourd’hui pris la pleine mesure de l’horreur de ces actes, ce n’est pas spécialement par la révélation spontanée de l’Esprit-Saint, mais bien plutôt par les études scientifiques des psychologues sur le sujet. C’est pour cela que je pense que l’Église devrait considérer les sciences humaines non comme adversaires, mais comme support sur les questions morales, et ce, dans les deux sens.

        Pour vous expliciter ma pensée, refaisons un crochet par le sujet de l’esclavage : je note avec intérêt que vous déclarez que l’Église ne peut pas modifier la Bible au fur et à mesure de sa réflexion. Donc, l’Église reconnaît que tout n’est pas exact dans la Bible, non seulement d’un point de vue scientifique, voire historique, mais également du point de vue de la morale (puisque l’esclavage était acceptable du temps de Saint Paul et ne l’est plus aujourd’hui) ; toutefois, elle part du principe que les écrits de la Bible, avec leur part d’approximation, sont globalement inspirés par Dieu, au travers de l’histoire humaine. Je suis d’accord avec cela.

        Vous notez également : « C’est sûr que cet aveuglement, dû au contexte historique, invite à l’humilité dans la réflexion théologique. »

        Or, j’ai lu dans un autre fil, un chrétien reconnaître qu’il ne se sent plus « en communication avec le Christ » quand il se masturbe. Cela me pose question. Je me demande si l’Église s’est jamais interrogée sur le fait que certains chrétiens peuvent se sentir en pleine harmonie avec Dieu lorsqu’ils le font ; si elle s’est vraiment interrogée sur le fait que si certains chrétiens peuvent se sentir coupés de Dieu, coupables, pécheurs, profondément dégoûtés d’eux-mêmes, cela pourrait venir de siècles et de millénaires de criminalisation de la masturbation, qui peut-être, préexistait largement au christianisme, voire au judaïsme, de la même manière qu’il est aujourd’hui avéré que l’excision préexistait largement à l’apparition de l’islam.

        Si nous sommes invités « à l’humilité dans la réflexion théologique » sur des sujets qui sont évoqués dans la Bible, à combien plus forte raison devrions-nous y être invités sur des sujets qui n’y apparaissent jamais et ne sont tranchés que par le magistère ! Cela vous semble-t-il un délit de désobéissance ?

        • Cat-modératrice

          Bonjour Pelostome,

          Vous écrivez :

          Par ailleurs, je crois que c’est la première fois que vous prenez vos distances avec le Catéchisme de l’Église Catholique, en notant que cette lecture qui semble littérale des textes bibliques, et en plus n’est pas clairement assumée, vous « dérange beaucoup ».

          Je ne dis pas que la lecture littérale n’est pas assumée, mais que le propos n’est pas clair. Je ne pense pas que ce soit l’intention des auteurs de manquer de clarté parce qu’ils n’assumeraient pas leur position. Le Catéchisme de l’Église Catholique est plein de propos dérangeants que les auteurs assument sans hésiter. Mais effectivement, ce propos me dérange beaucoup.

          Vous semblez vouloir concilier l’évolution des espèces et la monogénèse, en professant, si j’ai bien compris, que parmi les milliers de primates sur Terre, Dieu aurait choisi arbitrairement un seul couple en lui insufflant son esprit de telle sorte qu’ils étaient en parfaite communion avec lui ; si on reprend ma remarque sur le CEC, à partir de ce moment, ils auraient donc été totalement soustraits à la souffrance et à la mort, jusqu’à leur « chute ». Il se trouve que c’est exactement l’inverse de ma réflexion.

          Non, je ne pense pas que Dieu aurait choisi un couple parmi les couples d’animaux pour lui insuffler son esprit, mais qu’il a conduit l’évolution de l’espèce jusqu’à ce qu’un ou plusieurs primates donnent naissance aux premiers êtres humains, et qu’au moment de la conception de ces humains Dieu leur a insufflé une âme humaine. Il y a bien eu un premier être humain, et un premier couple, les deux premiers êtres humains à s’être unis pour donner naissance à d’autres êtres humains.

          J’ai vraiment du mal à imaginer qu’ils aient été soustraits à la souffrance et à la mort. Pour moi cela fait partie du récit symbolique de la Genèse. Ce qui est sûr, c’est qu’il y a eu un premier péché humain. Les premiers humains sont nés sans péché, et il y a un moment où ils ont choisi de poser un acte contre le bien. En tant qu’humain, ils avaient la possibilité de poser un tel acte. J’imagine que, pour accompagner ces premiers êtres humains, Dieu se manifestait à eux d’une manière particulièrement tangible, et que le premier péché a mis une distance avec lui.

          Le CEC écrit :

          « L’Église, en interprétant de manière authentique le symbolisme du langage biblique à la lumière du Nouveau Testament et de la Tradition, enseigne que nos premiers parents Adam et Eve ont été constitué dans un état “de sainteté et de justice originelle” (Cc. Trente: DS 1511). Cette grâce de la sainteté originelle était une “participation à la vie divine” (LG 2).

          Par le rayonnement de cette grâce toutes les dimensions de la vie de l’homme étaient confortées. Tant qu’il demeurait dans l’intimité divine, l’homme ne devait ni mourir (cf. Gn 2,17 3,19), ni souffrir (cf. Gn 3,16). L’harmonie intérieure de la personne humaine, l’harmonie entre l’homme et la femme (cf. Gn 2,25), enfin l’harmonie entre le premier couple et toute la création constituait l’état appelé “justice originelle”. » (n°375-376)

          Donc le CEC affirme que le récit de la Genèse est symbolique. En fait on ne sait pas trop, quand il parle d’absence de mort et de souffrance dans l’état originel, s’il parle du récit symbolique ou de la réalité. Mais s’il ne parle pas de la réalité, c’est vraiment mal exprimé. L’homme et la femme sont arrivés dans un monde chaotique, comment auraient-ils pu échapper à la souffrance ? À moins de parler seulement de la souffrance qui est conséquence du péché, mais ce n’est pas ce qui est dit dans le texte.

          Au numéro 396, le CEC précise bien que l’arbre de la connaissance du bien et du mal est symbolique : « “L’arbre de la connaissance du bien et du mal” (Gn 2,17) évoque symboliquement la limite infranchissable que l’homme, en tant que créature, doit librement reconnaître et respecter avec confiance. »

          Mais au numéro 400, il redit que ce premier péché est ce qui a introduit la mort chez les hommes, et il indique aussi que la création, qui était en harmonie, est devenue étrangère et hostile. Or, on connaît la violence qui régnait dans la création avant l’apparition des hommes. Le film Jurassic Parc nous en donne une idée… :

          « L’harmonie avec la création est rompue : la création visible est devenue pour l’homme étrangère et hostile (cf. Gn 3,17 3,19). À cause de l’homme, la création est soumise “à la servitude de la corruption” (Rm 8,20). Enfin, la conséquence explicitement annoncée pour le cas de la désobéissance (cf. Gn 2,17) se réalisera: l’homme “retournera à la poussière de laquelle il est formé” (Gn 3,19). La mort fait son entrée dans l’histoire de l’humanité (cf. Rm 5,12). »

          Voilà, je ne comprends pas ce propos, sachant que l’Église par ailleurs adhère aux découvertes de la science concernant les origines du monde et l’évolution des espèces.

          Je pense au plus profond de ma chair que la conscience humaine est un processus extrêmement lent, qui progresse de génération en génération, et absolument pas une révélation définitive et instantanée comme le professe l’Église. L’esclavage en est un exemple éloquent, puisqu’il constituait une évidence en Antiquité et un crime aujourd’hui, mais la pédocriminalité en est un encore plus frappant.

          L’Église ne dit pas que la conscience humaine était une révélation définitive et instantanée. Même dans le récit symbolique, Adam et Ève avaient beaucoup à apprendre, sinon ils ne se seraient pas laissé avoir si facilement par le serpent. Ève ne sait pas quoi répondre aux objections du serpent. L’homme et la femme étaient dans la communion avec Dieu et celui-ci leur demandait avant tout la confiance en lui. Ils ne savaient pas tout. Mais c’est la confiance qui a été rompue et le choix de s’éloigner de la guidance de Dieu a fait que les êtres humains ont évolué d’une manière catastrophique. Et leur conscience a été dans une difficulté encore plus grande de découvrir la vérité et le vrai bien que s’ils ne s’étaient pas éloignés de Dieu.

          J’ai entendu dire un jour – je suis désolé, je suis incapable de me souvenir où et quand – qu’une relation d’enseignant à élève, en Antiquité, se doublait le plus souvent d’une relation intime d’adulte à enfant sans que cela gêne quiconque. A l’inverse, j’ai entendu sur Radio Notre-Dame un chroniqueur commenter l’affirmation selon laquelle Karol Wojtyla, alors évêque, aurait couvert des agissements pédophiles, en soulignant, d’une part, bien sûr, que ce genre d’allégations devait être considéré avec prudence, mais surtout qu’à cette époque-là (milieu du 20° siècle, quand même), les êtres humains dans leur ensemble n’avaient pas une conscience aussi aigüe des ravages qu’entraînent les abus sexuels.

          On ne peut pas discuter au sujet d’une rumeur, d’allégation hypothétiques comme quoi Karol Wojtyla aurait agi ainsi.

          Ce qui est sûr, c’est qu’effectivement on n’avait pas conscience autrefois de la gravité des abus sexuels (que ce soit envers les enfants ou envers les adultes). Il me semble évident que les abus sexuels envers des enfants existent depuis le commencement de l’Église, comme ils ont existé dans les famille, dans l’enseignement, et partout où ils pouvaient exister. Pendant longtemps, il n’était même pas envisageable que les victimes en parlent, la honte était sur eux. Au XXe siècle, la réponse aux abus a souvent été la mutation du coupable, que ce soit dans l’Église ou dans l’Éducation Nationale. Mieux valait que le professeur ou le prêtre aille abuser ailleurs… Aujourd’hui cela paraît incompréhensible. La conscience des responsables était vraiment aveuglée, à une époque pourtant si proche de la nôtre. La prise de conscience actuelle est une bénédiction, la seule conséquence négative étant que certains en profitent pour accuser mensongèrement leurs ennemis. Le monde et l’Église ont mis si longtemps à prendre conscience de ce drame. Dans certains domaines, l’Église a eu historiquement un rôle de précurseur, a contribué à changer la société d’une manière positive, mais malheureusement pas dans le domaine des abus.

          Je crois que sa réaction démontre assez bien à quel point la conscience humaine est en perpétuel approfondissement. On peut même aller plus loin, en considérant que si l’Église a aujourd’hui pris la pleine mesure de l’horreur de ces actes, ce n’est pas spécialement par la révélation spontanée de l’Esprit-Saint, mais bien plutôt par les études scientifiques des psychologues sur le sujet. C’est pour cela que je pense que l’Église devrait considérer les sciences humaines non comme adversaires, mais comme support sur les questions morales, et ce, dans les deux sens.

          L’Église ne considère pas les sciences humaines comme des adversaires, au contraire. Mais elle ne peut pas être d’accord avec toute affirmation des sciences humaines. D’autant plus que les sciences humaines ne sont pas des sciences exactes, et elles sont en perpétuelle évolution.

          Pour vous expliciter ma pensée, refaisons un crochet par le sujet de l’esclavage : je note avec intérêt que vous déclarez que l’Église ne peut pas modifier la Bible au fur et à mesure de sa réflexion. Donc, l’Église reconnaît que tout n’est pas exact dans la Bible, non seulement d’un point de vue scientifique, voire historique, mais également du point de vue de la morale (puisque l’esclavage était acceptable du temps de Saint Paul et ne l’est plus aujourd’hui) ; toutefois, elle part du principe que les écrits de la Bible, avec leur part d’approximation, sont globalement inspirés par Dieu, au travers de l’histoire humaine. Je suis d’accord avec cela.

          D’un point de vue scientifique et historique, je ne dirais pas que ce qui est dans la Bible n’est pas « exact », puisque la Bible n’a aucune prétention scientifique. Et seuls certains livres ont une prétention historique. De nombreux récits de l’Ancien Testament ne prétendent aucunement raconter l’histoire réelle du peuple juif ou de l’humanité. Par exemple, la création du monde en six jours n’a aucune prétention historique. Ce n’est donc pas inexact mais symbolique.

          Sur le plan moral, Jésus lui-même souligne l’évolution. Mais il dit que la nouvelle morale n’est pas l’abolition, mais l’accomplissement de ce qui existait avant.

          Vous notez également : « C’est sûr que cet aveuglement, dû au contexte historique, invite à l’humilité dans la réflexion théologique. »

          Or, j’ai lu dans un autre fil, un chrétien reconnaître qu’il ne se sent plus « en communication avec le Christ » quand il se masturbe. Cela me pose question. Je me demande si l’Église s’est jamais interrogée sur le fait que certains chrétiens peuvent se sentir en pleine harmonie avec Dieu lorsqu’ils le font ; si elle s’est vraiment interrogée sur le fait que si certains chrétiens peuvent se sentir coupés de Dieu, coupables, pécheurs, profondément dégoûtés d’eux-mêmes, cela pourrait venir de siècles et de millénaires de criminalisation de la masturbation, qui peut-être, préexistait largement au christianisme, voire au judaïsme, de la même manière qu’il est aujourd’hui avéré que l’excision préexistait largement à l’apparition de l’islam.

          Le fait de se « sentir » ou « ne pas se sentir » en communion avec Dieu n’est absolument pas un critère pour savoir si l’on est réellement en communion avec Dieu, c’est ce qu’a toujours enseigné l’Église et les maîtres de spiritualité. Cela peut effectivement être provoqué par des conditionnements culturels. Des terroristes massacrent des gens en se sentant en pleine communion avec Dieu. De nombreuses personnes sont rongées de culpabilité et se sentent coupées de Dieu alors qu’elle ne le sont pas. Sainte Thérèse d’Avila a écrit qu’elle-même se trompait lourdement quand elle renonçait à prier Dieu dans les périodes où elle péchait, parce qu’elle pensait ne plus être en communion avec Dieu.

          Si nous sommes invités « à l’humilité dans la réflexion théologique » sur des sujets qui sont évoqués dans la Bible, à combien plus forte raison devrions-nous y être invités sur des sujets qui n’y apparaissent jamais et ne sont tranchés que par le magistère ! Cela vous semble-t-il un délit de désobéissance ?

          Rien ne permet d’affirmer que les théologiens des premiers siècles qui ont condamné la masturbation, et ceux qui ont maintenu cette interdiction, aient manqué d’humilité dans leur réflexion théologique. Je connais de nombreux prêtres humbles qui sont convaincus du bien fondé de cette règle morale. Est-ce que vous pensez que l’Église ne devrait prendre aucune décision, et n’affirmer aucune vérité de foi, de peur de se tromper ?

          • Pelostome

            Bonjour,

            le problème de la monogénèse, c’est que si un seul couple d’êtres humains est à l’origine des 8 milliards que nous sommes aujourd’hui, cela n’a physiquement pas pu se faire sans fouler aux pieds le tabou de l’inceste pendant des dizaines de générations. Que peut répondre l’Église à cela ?

            De plus, il faudrait considérer que
            • en pleine communion avec Dieu, le premier couple humain a reçu et respecté l’ordre qui lui était donné de « croître et se multiplier »
            • or Jésus répond aux Saducéens que dans le Royaume des Cieux, on ne prend pas mari et femme, car on est comme des anges
            • l’Église abonde dans ce sens en considérant que la procréation est une réponse temporelle à la mort physique, et que lorsque celle-ci sera abolie, la procréation n’aura plus lieu d’être
            • alors pourquoi Dieu aurait-il prescrit au premier couple 8 milliards de descendants s’ils n’étaient pas assujettis à la mort ?

            D’après votre réponse, vous-même semblez d’accord avec moi sur ce dernier point (pas le premier, toutefois) puisque vous considérez ce récit comme sympolique, et le CEC comme manquant singulièrement de clarté (j’ai quand même du mal à croire que l’Église n’a pas au moins un peu intérêt à entretenir soigneusement ce flou). Je vais expliciter un peu plus ma pensée sur le « péché originel » ; peut-être cela permettra-t-il de nourrir notre réflexion.

            Paradoxalement, j’aime beaucoup votre appréciation : « J’imagine que, pour accompagner ces premiers êtres humains, Dieu se manifestait à eux d’une manière particulièrement tangible, et que le premier péché a mis une distance avec lui ». Je trouve cela très beau, très touchant, d’une grande fraîcheur. J’en suis gêné de penser exactement l’inverse.

            Pour moi, il n’y a jamais eu de Paradis perdu : le paradis est devant nous, il est futur et non pas passé, nous sommes en cheminement vers ce paradis ; dans notre monde où la peur du politiquement incorrect est omniprésente, on ne dit pas à quelqu’un « Tu es mauvais », mais « Tu as une réelle marge de progression ». Je pense que ce n’est pas qu’une litote, c’est une expression juste, et que c’est le lot de l’humanité dans son ensemble.

            On a coutume de dire que la spécificité absolue de l’être humain, c’est d’être « conscient de sa conscience ». Ca mérite qu’on s’y attarde.

            De quoi l’être humain est-il conscient ?
            • d’exister ; si l’on considère le point ci-dessus, alors les autres êtres vivants ont également plus ou moins conscience d’exister, mais n’ont pas conscience d’en être conscients
            • qu’il peut y avoir une possibilité de ne pas exister ; au sens strictement physique, on peut même dire que nous sommes sûrs qu’un jour nous n’existerons plus, c’est-à-dire que nous mourrons (bien sûr, au sens spirituel, c’est différent)
            • du temps qui passe
            • de l’amour ; plus précisément, que l’amour le plus naturel : l’amour de nous-mêmes, ouvre sur tout un arc-en-ciel aux nuances infinies, dont l’effet le plus surprenant est de trouver notre joie dans ce qui fait la joie de l’autre, même – et surtout – si nous renonçons à quelque chose pour l’offrir de grand cœur
            • des difficultés d’aimer, des tensions entre amour de soi et amour de l’autre, ainsi que des conséquences futures de nos actions passées et présentes qui peuvent faire du mal à ceux qu’on aime

            Pour moi, l’humanité dans son ensemble est semblable à un enfant qui arrive à l’âge de raison (processus initié depuis plusieurs dizaines de milliers d’années et loin d’être achevé). Tant qu’il n’a pas l’âge de raison, l’enfant n’est pas responsable. Il peut se montrer cruel, arracher les pattes des insectes ou tuer sa petite sœur avec un revolver à balles réelles ou une carabine à plombs : il n’a pas conscience de la gravité de ses actes.

            Prendre conscience de la gravité de nos actes, peut nous conduire à nous prendre nous-mêmes en horreur. Pour nous aider à échapper à cette horreur, les humains ont édicté des lois pour baliser notre chemin. Mais celles-ci peut être dévoyées, si elles sont respectées dans leur lettre mais pas leur esprit. N’est-ce pas pour nous révéler cet esprit que Jésus a prếché durant sa vie terrestre ?

            Ce qui est important à considérer, c’est que nous faisons d’abord le mal (le bien aussi, d’ailleurs) sans en avoir conscience, et nous ne pouvons pas être accusés de pécher pour cela. Au fur et à mesure que notre conscience se développe, nous devenons responsables : ainsi, « le serviteur qui, connaissant la volonté de son maître, ne la suit pas, recevra un plus grand nombre de coups que celui qui ne l’a pas suivie car il ne la connaissait pas ».

            Cela revient à dire que
            • il n’y a pas de péché originel au sens de la Genèse, il y a une nostalgie de l’état d’innocence où nous n’étions pas conscients du bien et du mal, et une confusion entre innocence et bonté
            • le mal que nous avons fait, nous apparaît d’abord rétroactivement, au fur et à mesure de notre « prise de conscience »
            • une fois conscients, il nous arrive cependant de faire le mal en connaissance de cause, par envie, jalousie, colère, rancœur, lâcheté, paresse… et il nous arrive aussi de vouloir minimiser nos actes, ou leur portée, parfois – voire souvent – au motif que tout le monde le fait et que, si ce n’est pas nous qui le faisons, un autre le fera
            • à ce moment, nous pouvons parler d’une rupture avec Dieu

            Si l’on considère tout cela, alors il me semble que l’enseignement de l’Église pourrait être en phase avec les sciences humaines. On peut même établir un lien entre le « péché originel » et la violence de la création puisque, faisant partie du règne animal, nous sommes forcément marqués par une nature où la première des lois est d’une grande cruauté, vu qu’il s’agit de la loi de la chaîne alimentaire : se nourrir, c’est tuer pour vivre. Il faut pour cela que l’Église accepte de faire son deuil d’une prétendue « justice originelle ».

            Si l’on s’arcboute sur une notion dépassée du péché originel, on ne tire pas profit de la tension qui existe entre sciences humaines et religion. En effet, vous dites que les sciences humaines ne sont pas exactes, mais je crois que nous avons suffisamment confronté nos points de vue pour admettre que les préceptes religieux ne sont pas toujours exacts non plus, loin s’en faut. Par ailleurs, vous dites que les sciences humaines évoluent sans cesse : on peut regretter qu’elles évoluent trop et ne soient pas assez stables ; mais également que les préceptes moraux n’évoluent pas assez, qu’ils se complaisent dans l’immobilisme. C’est donc la confrontation bénéfique entre les deux qui nous permettra d’avancer. A défaut, notre Église se retrouvera dans la position des pharisiens et ne pourra que décliner face à d’autres femmes et hommes suffisamment cohérent-e-s dans leur vie pour ouvrir un espace de fraîcheur et de liberté, comme l’a fait Jésus.

            En résumé, on peut dire que l’acquisition de la conscience a pour corrolaire la perte de l’innocence, et c’est de ce dilemme que naît la notion de péché (étymologiquement : « manquer sa cible »).

            Concernant le fait d’être ou non en communion avec Dieu, et pour l’Église, de prendre ou non position de peur de se tromper, je vais laisser passer quelques jours ; je vous reviens bientôt.

            • Pelostome

              Bonjour,

              pour ajouter quelque peu à mon message précédent : je suis fasciné par l’évocation des cultures aborigènes, australiennes ou amazoniennes, qui n’ont pas développé de civilisation hautement technologique et entretiennent un lien étroit avec une nature qui peut paraître objectivement hostile mais qu’ils ont su apprivoiser. Peut-être Dieu leur parle-t-il d’une manière plus tangible, peut-être leur lien avec lui est-il moins rompu que pour nous… Je suis conscient que je projette ma vision de l’innocence sur ces peuples et c’est probablement à tort, mais je suis effaré que leur mode de vie ne soit pas sérieusement étudié pour déceler une alternative possible au système occidental qui arrive clairement à ses limites.

              Un petit mot encore sur le fait que la Bible n’a aucune prétention scientifique ni même historique : vous citez bien entendu la création du monde dans le livre de la Genèse, mais l’Église considère-t-elle oui ou non l’Exode comme un évènement historique ? Je me souviens d’une remarque d’historien pointant que le déplacement d’une population aussi nombreuse que celle évoquée par la Bible n’aurait jamais pu passer inaperçue, ne laisser aucune trace dans les traités d’histoire des autres peuples. Pour autant, je ne me souviens pas avoir jamais entendu le moindre commencement de remise en perspective historique de l’Exode par les prêtres lors des prêches dominicaux…

              En ce qui concerne vos autres réponses, vous avez raison de souligner que nous pouvons nous égarer nous-mêmes en justifiant nos mauvaises actions, même les plus inqualifiables. La plasticité de l’esprit humain est à cet égard effrayante. Mais vous n’avez pas répondu à l’autre partie de la remarque : nous sommes également façonnés mentalement par des millénaires d’histoire dont nous n’avons pas conscience.

              Pour prendre un autre exemple, le fait de ne pas faire l’amour pendant les règles de la femme n’a aucun fondement médical. Ce n’est pas non plus une exigence religieuse mais une intériorisation par la religion d’un interdit antérieur de plusieurs siècles. Je souhaite insister sur le parallèle avec l’excision, un principe totalement incompréhensible pour les esprits occidentaux, faussement attribué à l’Islam, en réalité antérieur à cette religion. Je suis persuadé que bien des exigences morales ont été reprises telles quelles par la religion catholique sans même qu’elle s’en rende compte, et que celle-ci préfère jouer de la plasticité de l’esprit humain pour les justifier a posteriori par des injonctions tirées plus ou moins de la Bible ou du magistère sans prendre le temps de les analyser à la lumière de l’histoire. Et les théologiens des premiers siècles, même s’ils ont légiféré en toute humilité, n’avaient certes pas la même vision de l’histoire que nous. C’est plus en pensant à l’Église de notre temps que je parlais d’humilité.

              Un des exemples les plus frappants dans la confrontation entre foi et sciences humaines est donné par les deux livres d’entretiens de Françoise Dolto et Gérard Sévérin : « L’Évangile au risque de la psychanalyse ». Parmi les récits analysés, je retiens particulièrement celui concernant la fille de Jaïre, père tellement surprotecteur qu’il l’appelle « ma petite fille » alors qu’elle a douze ans, l’âge où elle devient femme : d’après Dolto, c’est cette surprotection qui entraîne la mort apparente de la jeune fille ; Jésus la réveille en lui parlant dans sa langue maternelle (« Talitha koum »), la langue de son inconscient, et en ouvrant les yeux, elle voit à ses côtés Pierre, Jacques, Jean, images d’hommes accomplis et chastes lui ouvrant la voie de la puberté. Ce serait extrêmement étonnant que Saint Luc ait construit son récit en pensant à tout cela, mais le travail d’interprétation de Françoise Dolto n’en reste pas moins exemplaire – après tout, Freud a bâti son œuvre à partir du mythe d’Œdipe sans que les auteurs de celui-ci aient pu imaginer une seconde qu’il serait ainsi disséqué des millénaires plus tard.

              Ainsi, passer les préceptes religieux au crible des sciences humaines renforce la foi. L’Église devrait admettre clairement que la religion chrétienne n’est pas seulement imprégnée du judaïsme mais de croyances largement antérieures, et chercher à repérer ces préceptes afin de se demander honnêtement si ceux-ci sont vraiment en rapport avec le fondement du christianisme.

              Ce qui nous amène à la question finale : l’Église devrait-elle s’abstenir de parler de peur de se tromper ? Il me semble que le cœur de son enseignement, c’est l’arc-en-ciel de l’amour : philautia (amour de soi), éros (désir), philein (sentiments), agâpé (charité, humanité)… et certainement des infinités de nuances à détailler. « Aimer son prochain comme soi-même » et condamner quasi unaniment l’amour de soi (égoïsme, bouh), c’est un coup à vous fabriquer des générations de schizophrènes. Admettre l’éros à condition de le rendre esclave de l’agâpé et en ne laissant aucune liberté à cette composante essentielle de la vie dans la nature, c’est refuser tout dialogue avec la majorité de la société qui finit par déserter les églises. Mettre en avant systématiquement l’agâpé sans même évoquer la philein, c’est s’amputer d’une part irréductible d’humanité.

              Le champ de l’amour est immense. Sa problématique est essentielle. Il n’est jamais enseigné à l’école. Se focaliser inlassablement et concrètement sur son champ d’application : le consentement, le respect, le dialogue, la tendresse, sans oublier les signaux non-verbaux, l’attitude d’écoute, la gestion des conflits, le devoir de s’asseoir, le voyage de noces annuel… ne devrait-il pas être une priorité bien plus urgente et constante pour l’Église que de légiférer sur telle ou telle pratique sexuelle entre adultes consentants et aimants ?

              • Cat-modératrice

                Bonjour Pelostome,

                J’ai lu avec attention vos deux derniers commentaires. Je ne vais pas pouvoir y répondre dans l’immédiat, non par manque d’intérêt pour cet échange, mais parce que je pars après-demain matin pour 3 semaines à l’étranger. Je n’emporterai pas mon ordinateur. Je pense que je pourrai valider les commentaires postés, avec mon téléphone, mais quant à écrire moi-même, je préfère vraiment le faire sur mon ordinateur.

                À bientôt !

              • Cat-modératrice

                Bonjour Pelostome, me voilà revenue en France.

                Vous écrivez : « le problème de la monogénèse, c’est que si un seul couple d’êtres humains est à l’origine des 8 milliards que nous sommes aujourd’hui, cela n’a physiquement pas pu se faire sans fouler aux pieds le tabou de l’inceste pendant des dizaines de générations. Que peut répondre l’Église à cela ? »

                Je précise que, lorsque je dis qu’il y a forcément un premier couple humain, je ne me prononce pas sur la question de savoir si c’est ce seul couple qui est l’ancêtre de tous les humains. J’ai juste dit qu’il y en avait forcément un premier. Cela n’empêche pas qu’il y ait pu y en avoir d’autres nés d’autres animaux. Je pense que la question est à poser aux scientifiques : quand une nouvelle espèce apparaît sur terre, est-ce que des membres de cette espèce naissent dans une même période de plusieurs mères de l’espèce ancêtre ? Ou est-ce qu’une seule et même mère donne naissance à deux ou plusieurs premiers membres de cette nouvelle espèce, qui sont les ancêtres de tous les membres de la nouvelle espèce, en se reproduisant entre frère(s) et sœur(s) ? D’un point de vue scientifique, il me paraît peu probable qu’une mutation produisant une nouvelle espèce advienne chez plusieurs animaux différents dans une même période, que plusieurs mères différentes de l’espèce ancêtre donnent naissance à des enfants ayant la même mutation, permettant ainsi d’éviter l’inceste. Mais je n’ai absolument pas les connaissance scientifiques nécessaires pour me prononcer sur la question.

                Si les premiers êtres humains se sont multipliés en pratiquant l’inceste, parce qu’ils étaient obligés de le faire puisqu’aucun autre être humain n’existait, je ne vois pas en quoi ça poserait problème à l’Église. Je suppose que cela se passe ainsi pour toute nouvelle espèce. Mais en tout cas, il ne me semble pas que ce soit une nécessité théologique que les êtres humains soient tous les descendant d’un seul et même couple.

                Vous écrivez :

                « De plus, il faudrait considérer que
                • en pleine communion avec Dieu, le premier couple humain a reçu et respecté l’ordre qui lui était donné de « croître et se multiplier »
                • or Jésus répond aux Saducéens que dans le Royaume des Cieux, on ne prend pas mari et femme, car on est comme des anges
                • l’Église abonde dans ce sens en considérant que la procréation est une réponse temporelle à la mort physique, et que lorsque celle-ci sera abolie, la procréation n’aura plus lieu d’être
                • alors pourquoi Dieu aurait-il prescrit au premier couple 8 milliards de descendants s’ils n’étaient pas assujettis à la mort ? »

                Mais d’après le texte de la Genèse, Dieu a en effet prescrit aux premiers humains de croître et multiplier avant qu’ils soient assujettis à la mort. Dans le corps même de l’homme et de la femme étaient inscrits la procréation, que Dieu a voulue avant qu’il y ait un premier péché. Dieu veut que les humains se multiplient indépendamment du fait qu’ils meurent. Il veut créer d’autres êtres humains pour la même raison qu’il a voulu créer le premier être humain : par amour pour eux, et non pour remplacer les morts. Dans quel texte trouvez-vous que l’Église considère la procréation uniquement comme une réponse temporelle à la mort physique ?

                Vous écrivez :
                « • il n’y a pas de péché originel au sens de la Genèse, il y a une nostalgie de l’état d’innocence où nous n’étions pas conscients du bien et du mal, et une confusion entre innocence et bonté.
                • le mal que nous avons fait, nous apparaît d’abord rétroactivement, au fur et à mesure de notre « prise de conscience »
                • une fois conscients, il nous arrive cependant de faire le mal en connaissance de cause, par envie, jalousie, colère, rancœur, lâcheté, paresse… et il nous arrive aussi de vouloir minimiser nos actes, ou leur portée, parfois – voire souvent – au motif que tout le monde le fait et que, si ce n’est pas nous qui le faisons, un autre le fera
                • à ce moment, nous pouvons parler d’une rupture avec Dieu »

                Je pense que parfois nous pouvons aussi commettre de vrais péchés sans en être conscients, parce que nous cachons à nous-mêmes nos propres tendances mauvaises. Combien de personnes commettent des actes malveillants en voulant inconsciemment que ces actes nuisent, et en se persuadant elles-mêmes qu’elles font ces actes pour le bien de quelqu’un.

                En ce qui concerne la confusion entre innocence et bonté, je pense que l’innocence décrite dans la Genèse n’est pas bonté. Si la femme et l’homme avaient été bons, ils n’auraient pas convoité la place de Dieu. Quand on parle de la justice originelle, il ne s’agit pas de bonté mais d’esprit d’enfance, de confiance en Dieu, de remettre notre vie dans sa main.

                Vous écrivez : « Par ailleurs, vous dites que les sciences humaines évoluent sans cesse : on peut regretter qu’elles évoluent trop et ne soient pas assez stables ; mais également que les préceptes moraux n’évoluent pas assez, qu’ils se complaisent dans l’immobilisme. » Faut-il donc que les préceptes moraux changent sans cesse au rythme des changements de vision des choses des sociétés ? S’il y avait un retournement dans nos sociétés et que les sciences humaines se mettaient à prôner l’enfermement des personnes homosexuelles, faudrait-il que les préceptes moraux de l’Église catholique suivent et encouragent les fidèles à dénoncer les personnes homosexuelles ? Les préceptes moraux de l’Église ne peuvent pas s’appuyer sur les sciences humaines, même s’il est important qu’elle les écoute, ce qu’elle fait.

                Vous écrivez : « C’est donc la confrontation bénéfique entre les deux qui nous permettra d’avancer. A défaut, notre Église se retrouvera dans la position des pharisiens et ne pourra que décliner face à d’autres femmes et hommes suffisamment cohérent-e-s dans leur vie pour ouvrir un espace de fraîcheur et de liberté, comme l’a fait Jésus. »

                Jésus a dit aux premiers chrétiens : « Sur la chaire de Moïse se sont assis les scribes et les Pharisiens : faites donc et observez tout ce qu’ils pourront vous dire, mais ne vous réglez pas sur leurs actes : car ils disent et ne font pas. » (Matthieu 23, 2-3). Ce ne sont pas les valeurs morales prêchées par les Pharisiens qui posent problème, mais leur hypocrisie, ainsi que leur manque de miséricorde. Jésus lui-même a enseigné des préceptes moraux très strictes, comme par exemple sur le divorce. Et il a choqué ceux qui l’ont entendu.

                Vous écrivez :

                « Un petit mot encore sur le fait que la Bible n’a aucune prétention scientifique ni même historique : vous citez bien entendu la création du monde dans le livre de la Genèse, mais l’Église considère-t-elle oui ou non l’Exode comme un évènement historique ? Je me souviens d’une remarque d’historien pointant que le déplacement d’une population aussi nombreuse que celle évoquée par la Bible n’aurait jamais pu passer inaperçue, ne laisser aucune trace dans les traités d’histoire des autres peuples. Pour autant, je ne me souviens pas avoir jamais entendu le moindre commencement de remise en perspective historique de l’Exode par les prêtres lors des prêches dominicaux… »

                L’Église ne se prononce pas sur la réalité historique de l’Exode.

                Vous écrivez :

                « Pour prendre un autre exemple, le fait de ne pas faire l’amour pendant les règles de la femme n’a aucun fondement médical. Ce n’est pas non plus une exigence religieuse mais une intériorisation par la religion d’un interdit antérieur de plusieurs siècles. Je souhaite insister sur le parallèle avec l’excision, un principe totalement incompréhensible pour les esprits occidentaux, faussement attribué à l’Islam, en réalité antérieur à cette religion. Je suis persuadé que bien des exigences morales ont été reprises telles quelles par la religion catholique sans même qu’elle s’en rende compte, et que celle-ci préfère jouer de la plasticité de l’esprit humain pour les justifier a posteriori par des injonctions tirées plus ou moins de la Bible ou du magistère sans prendre le temps de les analyser à la lumière de l’histoire. Et les théologiens des premiers siècles, même s’ils ont légiféré en toute humilité, n’avaient certes pas la même vision de l’histoire que nous. C’est plus en pensant à l’Église de notre temps que je parlais d’humilité. »

                Pour ce qui est de l’interdit des relations sexuelles pendant les règles, il était en effet antérieur à la loi d’Israël, mais c’était dès le départ un interdit d’ordre religieux. Contrairement à l’excision, je pense que l’interdit des rapports sexuels pendant les règles était une bonne choses pour les femmes, à une époque où elles n’avaient pas trop leur mot à dire si leur moitié voulait coucher avec elles mais qu’elles n’en avaient pas envie. Je pense que beaucoup de femmes n’ont aucune envie d’avoir des rapports sexuels au moment des règles. Mais ce n’est pas le sujet dont vous voulez parler ici.

                La loi juive a clairement intégré de très nombreuses règles qui existaient dans les religions d’autres peuples. Jésus a justement libéré la religion de nombreuses règles inutiles, comme par exemple les interdits alimentaires. La plupart des règles morales de l’Église catholique sont issues des écrits du Nouveau Testament. Mais pas toute, justement notre échange a démarré sur le fait que l’interdit de la masturbation n’est pas mentionné explicitement dans la Bible. L’Église catholique se base sur le fait que l’ouverture à la procréation et la sexualité ne doivent pas être séparées. Est-ce que cette doctrine existait déjà à l’époque des débuts du christianisme dans d’autres peuples ? Je n’en sais rien.

                Vous écrivez :

                « Un des exemples les plus frappants dans la confrontation entre foi et sciences humaines est donné par les deux livres d’entretiens de Françoise Dolto et Gérard Sévérin : « L’Évangile au risque de la psychanalyse ». Parmi les récits analysés, je retiens particulièrement celui concernant la fille de Jaïre, père tellement surprotecteur qu’il l’appelle « ma petite fille » alors qu’elle a douze ans, l’âge où elle devient femme : d’après Dolto, c’est cette surprotection qui entraîne la mort apparente de la jeune fille ; Jésus la réveille en lui parlant dans sa langue maternelle (« Talitha koum »), la langue de son inconscient, et en ouvrant les yeux, elle voit à ses côtés Pierre, Jacques, Jean, images d’hommes accomplis et chastes lui ouvrant la voie de la puberté. Ce serait extrêmement étonnant que Saint Luc ait construit son récit en pensant à tout cela, mais le travail d’interprétation de Françoise Dolto n’en reste pas moins exemplaire – après tout, Freud a bâti son œuvre à partir du mythe d’Œdipe sans que les auteurs de celui-ci aient pu imaginer une seconde qu’il serait ainsi disséqué des millénaires plus tard. »

                C’est une remarque accessoire, mais je suis maman d’une fille de 12 ans, et je pense que si elle était en train de mourir, je l’appellerais peut-être « ma petite fille » sans pour autant vouloir la surprotéger.

                Vous écrivez :

                « Ainsi, passer les préceptes religieux au crible des sciences humaines renforce la foi. L’Église devrait admettre clairement que la religion chrétienne n’est pas seulement imprégnée du judaïsme mais de croyances largement antérieures, et chercher à repérer ces préceptes afin de se demander honnêtement si ceux-ci sont vraiment en rapport avec le fondement du christianisme. »

                Mais l’Église a toujours reconnu qu’un certain nombre de préceptes existaient avant le judaïsme et le christianisme. Ce n’est pas parce qu’ils ont été pris à d’autres religions qu’ils sont forcément mauvais. J’ai toujours entendu enseigner cela dans l’Église, cette reprise d’éléments d’autres cultures et d’autres religions.

                Vous écrivez :

                « Ce qui nous amène à la question finale : l’Église devrait-elle s’abstenir de parler de peur de se tromper ? Il me semble que le cœur de son enseignement, c’est l’arc-en-ciel de l’amour : philautia (amour de soi), éros (désir), philein (sentiments), agâpé (charité, humanité)… et certainement des infinités de nuances à détailler. « Aimer son prochain comme soi-même » et condamner quasi unaniment l’amour de soi (égoïsme, bouh), c’est un coup à vous fabriquer des générations de schizophrènes. »

                Le christianisme ne condamne pas l’amour de soi. Jésus a dit d’aimer son prochain comme soi-même, si on ne s’aime pas on n’aime donc pas son prochain. J’ai toujours entendu enseigner que le premier commandement de Jésus nous enseignait l’amour de soi, l’amour du prochain et l’amour de Dieu.

                Il est vrai que certains textes spirituels anciens ont dérapé dans un véritable de rejet de soi-même, mais cela n’a jamais été l’enseignement de l’Église. Jésus dit qu’il faut renoncer à soi-même pour le suivre, ce qui ne veut pas dire du tout ne pas s’aimer.

                Vous écrivez :

                « Admettre l’éros à condition de le rendre esclave de l’agâpé et en ne laissant aucune liberté à cette composante essentielle de la vie dans la nature, c’est refuser tout dialogue avec la majorité de la société qui finit par déserter les églises. Mettre en avant systématiquement l’agâpé sans même évoquer la philein, c’est s’amputer d’une part irréductible d’humanité. »

                Vos propos sont un peu trop allusifs pour pouvoir tout comprendre. Si vous dites une fois de plus que l’Église ne devrait pas exiger que l’on réserve les rapports sexuels au mariage, je vous ai déjà expliqué pourquoi je n’étais pas d’accord. Et dans ses textes, l’Église parle de l’importance de l’agape, mais aussi de l’eros et du philia.

                Vous écrivez :

                « Le champ de l’amour est immense. Sa problématique est essentielle. Il n’est jamais enseigné à l’école. Se focaliser inlassablement et concrètement sur son champ d’application : le consentement, le respect, le dialogue, la tendresse, sans oublier les signaux non-verbaux, l’attitude d’écoute, la gestion des conflits, le devoir de s’asseoir, le voyage de noces annuel… ne devrait-il pas être une priorité bien plus urgente et constante pour l’Église que de légiférer sur telle ou telle pratique sexuelle entre adultes consentants et aimants ? »

                Les deux sont nécessaires. La réflexion théologique, y compris en théologie morale, reste indispensable pour vivre sa foi et pour faire le bien.

                • Pelostome

                  Bonjour,

                  merci pour vos précisions. En cherchant quelques informations supplémentaires, je m’aperçois entre autres

                  * que j’ai employé « monogénèse » de manière impropre au lieu de « monogénisme »
                  * que la théorie selon laquelle tous les homo sapiens descendent, sinon d’un même couple, du moins d’un même groupe ethnique, semble aujourd’hui quasi universellement admise au nom des thèses de Darwin

                  En admettant que la conscience humaine s’est développée au sein de ce même groupe, il est assez improbable, mais pas impossible, qu’elle ait été révélée tout d’abord à un seul mâle et une seule femelle de ce groupe, aux autres, ensuite. Faire porter par la suite le « péché » des milliards d’individus sur ce seul et unique premier couple, ça me semble hasardeux. Statistiquement parlant, la conscience aurait pu être révélée au premier couple, puis à d’autres du même groupe, et n’importe lequel de ceux-ci aurait pu « chuter » à un moment ou un autre.

                  Sans compter que – excusez-moi de me répéter – je suis intimement persuadé que le processus de la conscience s’est imposé de manière extrêmement lente et progressive chez l’espèce humaine, et qu’ainsi, la notion de péché ne nous apparaît qu’a posteriori. Bien sûr, nous pouvons ergoter sur le fait de commettre un vrai péché sans en avoir vraiment conscience. Il me semble plus significatif de noter que, si je ne m’abuse, vous avez soigneusement évité de commenter le fait que la loi fondamentale du règne animal : tuer pour vivre, est d’une cruauté absolue, et qu’aucun être humain n’est censé pécher quand il tue un animal ou un végétal pour se nourrir. D’ailleurs, la loi de Moïse : « Tu ne tueras point » est totalement contredite par l’injonction faite par Dieu à Saül, d’exterminer tous les Amalécites, injonction dont le refus entraîne la chute du premier roi d’Israël ; c’est dire à quel point l’appréciation du péché fluctue de manière abyssale selon les âges – avec certaines régressions, puisque la loi de Moïse est antérieure à la royauté.

                  L’Église évite également soigneusement d’effleurer ne serait-ce que du bout des lèvres les autres espèces humaines telles que l’Homme de Néanderthal. Nous savons qu’il était civilisé, artiste et entretenait le culte des morts, mais aussi qu’il était d’une autre race génétique qu’Homo Sapiens. Etait-il fils de Dieu ? Si non, pour quelle raison objective ? Le monogénisme en prend un sacré coup dans l’aile.

                  Concernant le second point, j’ai beaucoup apprécié votre réponse qui me convainc d’erreur sur la volonté de procréation par l’homme et la femme. Je pense que mon avis initial est pétri de raison humaine : à partir du moment où nous sommes conscients du caractère inéluctable de la mort, que nous sommes certains de ne pouvoir y échapper, enfanter une nombreuse famille peut être raisonnablement considéré comme la seule tentative possible de mettre la mort en échec relatif. Proclamer qu’indépendamment de la mort, la procréation permet de multiplier les personnes à chérir, à aimer, est révélateur d’une autre sagesse, complémentaire en quelque sorte, propre au sens religieux, et qui est une vraie révélation. Merci pour votre éclairage sur ce point.

                  Il n’est pas déraisonnable toutefois de noter que nous avons déjà du mal à nous en sortir avec huit milliards d’humains sur terre, et que selon le CEC, s’il n’y avait pas eu « péché originel », tous les êtres humains depuis la nuit des temps seraient toujours vivants sur la Terre. Je n’ose imaginer le degré d’inconfort extrême de cette situation ; à ce niveau de réflexion, j’en viens à me dire que si la procréation a un sens indépendamment de la mort, la mort individuelle a probablement un sens indépendamment du péché.

                  Paradoxalement, cette thèse de la procréation en tant que multiplicateur d’amour est propre à renforcer mon idée sur le « Paradis », puisque Jésus lui-même affirme que, dans le Paradis, on ne prend pas mari et femme. S’il y avait eu un « Paradis terrestre », l’homme et la femme n’y auraient donc pas enfanté, alors que vous m’avez convaincu que la procréation fait partie intégrante du projet d’amour de Dieu. Puisque la procréation est voulue par Dieu indépendamment du péché, et qu’il n’y a pas de procréation en Paradis, celui-ci est bien devant nous, dans le futur ; nous sommes en route vers cet état de grâce, nous ne l’avons jamais perdu ; nous l’acquérons peu à peu, à minuscules pas. Comme je l’écrivais, l’humanité dans son ensemble sort à peine de l’enfance et entre en adolescence, avec ce que cela comporte de remise en cause et de rébellion.

                  Concernant le changement « incessant » des préceptes moraux, il est assez cocasse que vous ayez choisi l’hypothèse d’un rejet de l’homosexualité allant jusqu’à l’enfermement physique des homosexuels, quand on connaît la violence dont font preuve certains chrétiens vis-à-vis des homosexuels, en particulier par les soi-disant « thérapies de conversion » condamnées par le droit français. En fait, de manière générale, l’Église en tant qu’institution fait de son mieux pour accueillir le plus authentiquement possible les personnes homosexuelles, mais continue dans le même temps de rejeter leur homosexualité, alors que celle-ci fait partie intégrante de leur être. C’est une position pour le moins ambiguë et, j’imagine, une sorte de torture pour les homosexuels chrétiens. De manière plus large, l’Église, quand elle parle des personnes homosexuelles, parle très rarement de leur amour ; si un couple homosexuel vit un amour manifestement éclatant et signe éclairant du Royaume, pouvez-vous, en toute honnêteté, me jurer que cet amour sera loué et cité en exemple par l’Église ? D’ailleurs, il y a fort à parier que si l’Église, tout en continuant d’ostraciser l’homosexualité, accueille mieux les personnes homosexuelles, c’est très probablement grâce à la confrontation avec la morale laïque et les sciences humaines. C’est justement cela que je voulais souligner lorsque je parlais d’une confrontation positive, sans chercher à demander que l’Église suive aveuglément toutes les modes du moment.

                  De même, lorsque vous pensez « que l’interdit des rapports sexuels pendant les règles était une bonne chose pour les femmes, à une époque où elles n’avaient pas trop leur mot à dire si leur moitié voulait coucher avec elles mais qu’elles n’en avaient pas envie… (car) beaucoup de femmes n’ont aucune envie d’avoir des rapports sexuels au moment des règles », cela semble à première vue très juste, mais dans ce cas, pourquoi la religion considère-t-elle la femme impure au moment des règles ? Encore une fois, l’impureté est une manière de vilipender la femme alors que, selon votre remarque, elle aurait plutôt dû être sacralisée à ce moment particulier. J’ai lu ici ou là des témoignages de familles qui organisent une fête lors des premières règles d’une jeune fille. Cette idée me semble très forte et évocatrice, mais je n’ai pas l’impression qu’elle soit très répandue.

                  Si je puis me permettre une petite parenthèse, il semble que depuis ces temps immémoriaux, tout ce qui a trait au sexe est frappé d’infamie pour une femme, à l’exception de l’enfantement ; et même, ce qui est proprement incroyable, c’est qu’une femme est systématiquement encensée d’avoir enfanté, mais pas d’avoir accouché. Sinon, comment peut-on interpréter cette incongruité selon laquelle Marie est restée « toujours vierge » ? L’accouchement aura forcément déchiré son hymen. Affirmer le contraire revient à sacraliser, comme l’a fait l’Église catholique, la tradition populaire décrite dans le Protévangile de Jacques selon laquelle son enfant se sera téléporté hors de son ventre – et le placenta se sera probablement auto-résorbé sous on ne sait quelle action purificatrice du Saint-Esprit.

                  Vous me dites ensuite que « Jésus a justement libéré la religion de nombreuses règles inutiles, comme par exemple les interdits alimentaires ». Je crois que nous ne nous rendons pas compte, nous Chrétiens, des déchirements inouïs qu’a impliqués cette révolution pour les Juifs pieux – la Bible regorge d’exemples de Juifs morts avec un courage exemplaire pour avoir refusé d’abandonner ces interdits. Imaginons une seconde que nous soyons – par un enchaînement de spéculations et concentrations dans l’industrie agro-alimentaire – nourris par des entreprises asiatiques, et que ce régime alimentaire intègre de la viande de chien. N’allons-nous pas hurler ? Et pourtant, absolument aucune règle ne nous l’interdit, ni dans la religion juive, ni dans la religion chrétienne !

                  Je suis également extrêmement frappé de votre inversion totale du précepte évangélique : « J’ai toujours entendu enseigner que le premier commandement de Jésus nous enseignait l’amour de soi, l’amour du prochain et l’amour de Dieu. »

                  De fait, le premier commandement que cite Jésus est avant tout l’amour de Dieu, et même dans sa forme élaborée et emphatique du Deutéronome : « de tout ton cœur, de toute ton âme, de toutes tes forces » ; Jésus cite ensuite le commandement du Lévitique : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même ». Donc, au sens strict, aucun commandement, ni judaïque ni chrétien, ne nous invite explicitement à nous aimer nous-mêmes ; la seule référence est totalement implicite : « comme toi-même ». C’est vraiment très étrange de votre part d’opérer cette inversion. Puisque vous me dites que vous avez toujours entendu enseigner cela, je vous crois volontiers – cela a sans doute joué sur votre vocation, et tant mieux. Je peux par contre vous affirmer que pour ma part, je n’ai jamais entendu ce passage de l’Évangile mentionné dans l’ordre que vous m’indiquez, même en homélie. D’ailleurs, si je me réfère au CEC

                  * l’expression « s’aimer soi-même » n’apparaît nulle part dans les 345 pages du texte
                  * le verbe « s’aimer » apparaît trois fois, à chaque fois dans un sens d’amour mutuel et réciproque entre époux
                  * « amour-propre » n’apparaît nulle part, pas plus que « philautia »
                  * l’expression « amour de soi » apparaît deux fois, à chaque fois de manière négative : une fois pour fustiger le péché, une autre pour s’opposer au suicide !

                  Concernant le fait que l’Éros soit systématiquement sous la coupe de l’Agapê, je ne pensais pas spécialement aux relations sexuelles hors mariage lorsque j’écrivais cela. Si je reprends le CEC

                  * sur environ 125 occurrences du nom « désir », du verbe « désirer » et de l’adjectif « désireux », il n’y en a que 5 qui concernent le désir charnel : 2 uniquement pour louer le désir du couple, 3 pour condamner la masturbation et l’adultère
                  * si l’on passe au nom « plaisir », il n’y a plus que 20 occurrences, dont 4 s’appliquent au spirituel (le « bon plaisir du Père / de Jésus »), 4 expriment qu’il s’agit d’une bonne chose pour le couple, 12 fustigent tout ce que l’Église considère comme des déviances
                  * l’expression « faire l’amour », sommet de poésie et de vérité, n’apparaît nulle part
                  * l’expression « acte sexuel » n’apparaît que trois fois : une fois pour fustiger l’homosexualité, une fois pour fustiger la procréation « non naturelle », une fois pour fustiger l’union libre
                  * « harmonie charnelle » et « communion charnelle » n’apparaissent nulle part
                  * « union charnelle » apparaît deux fois : une fois pour fustiger la fornication, une fois pour condamner la vie commune hors mariage

                  Il est vrai que j’ai exprimé et j’exprime que le plaisir donné et reçu par deux êtres humains, dans la liberté, le respect mutuel, la tendresse, la complicité, constitue déjà, même s’ils n’en pas conscience, une formidable louange à la gloire de l’amour créateur. Effectivement, nous en avons déjà parlé.

                  Mais dans mon dernier message je pensais plutôt à une vision plus pessimiste de la sexualité, dans le mariage même ; si la fantaisie sexuelle – entre autres : la masturbation mutuelle, la fellation, le cunnilingus – n’est tolérée que du bout des lèvres, uniquement en tant que préliminaire à une pénétration vaginale par le sexe masculin, et ce même dans le cas où le couple n’est pas ou plus en mesure d’enfanter, il n’est pas étonnant que la routine ou la disette charnelle précipite l’immense majorité des couples dans le divorce.

                  En quelque sorte, je considère que les chrétiens mariés n’ont pas un besoin essentiel de prier lorsqu’ils font l’amour ; il leur est peut-être plus utile de chercher comment pimenter leur vie de couple en continuant à se respecter l’un l’autre.

                  Pour l’exprimer autrement : à mon sens, les aspects charnel, intellectuel, affectif, spirituel de la personne devraient se considérer à égalité, pas dans une surreprésentation morale du spirituel.

                  Ainsi, je veux bien vous suivre quand vous concluez que « les deux sont nécessaires. La réflexion théologique, y compris en théologie morale, reste indispensable pour vivre sa foi et faire le bien ».

                  Le souci, c’est qu’en lisant le CEC, on voit bien que la théologie, la morale, le spirituel y sont surreprésentés par rapport au charnel, à l’affectif, à l’amour dans sa plus simple acception.

                  Ce sont les hommes et les femmes charnels qui parlent d’amour ; ce sont les célibataires consacrés qui parlent de sainteté et de péché.

                  Je reconnais qu’il existe certains prêtres qui ont des intuitions fulgurantes sur l’amour humain et une réelle connaissance des problématiques de couples. Ils agissent et parlent le plus souvent à l’échelle locale ; l’Église en tant qu’institution n’a pas sur l’amour humain, dans toute sa complexité et son vécu basique, le même sentiment d’urgence qu’elle a eu sur le salut des âmes, puis la justice sociale, et aujourd’hui, sous l’impulsion de François, la Création.

                  Nous pouvons donc noter qu’aujourd’hui, si nous n’avons plus vraiment d’interdits alimentaires, le poids phénoménal sur la sexualité reste extrêmement fort. Et de la même manière que Jésus a, selon vos propres termes, libéré la religion de ces interdits alimentaires qui étaient pourtant fondamentaux pour son peuple, je pense qu’un jour ou l’autre, les hommes et femmes chrétiens qui s’aiment seront libérés de plusieurs, voire de nombreux interdits sexuels qui ne sont peut-être pas aussi absolument nécessaires que l’Église institutionnelle peut le penser actuellement, en regard de l’infinie richesse de l’amour positif, pour peu qu’il soit chéri et non pas sur-sacralisé : dans toute sa fragilité, avec un soin minutieux et des techniques humaines propres à le protéger et le faire grandir.

                • Cat-modératrice

                  Bonjour Pelostome,

                  Vous écrivez :

                  En admettant que la conscience humaine s’est développée au sein de ce même groupe, il est assez improbable, mais pas impossible, qu’elle ait été révélée tout d’abord à un seul mâle et une seule femelle de ce groupe, aux autres, ensuite. Faire porter par la suite le « péché » des milliards d’individus sur ce seul et unique premier couple, ça me semble hasardeux. Statistiquement parlant, la conscience aurait pu être révélée au premier couple, puis à d’autres du même groupe, et n’importe lequel de ceux-ci aurait pu « chuter » à un moment ou un autre.

                  Ce que je voulais dire, c’est qu’il y a forcément eu une première personne possédant cette conscience humaine, ou un premier couple. Cette première personne capable de pécher a péché et s’est ainsi coupée de la communion totale avec Dieu, et a entraîné les autres humains dans une fragilité par rapport au péché. Que les autres humains soient des descendants directs ou non, pour moi ce n’est pas un problème. Jésus a bien racheté l’humanité par son amour, en obéissant à Dieu en tant qu’être humain, sans pour autant être l’ancêtre des êtres humains qui ont été sauvés par son acte.

                  Vous écrivez :

                  Sans compter que – excusez-moi de me répéter – je suis intimement persuadé que le processus de la conscience s’est imposé de manière extrêmement lente et progressive chez l’espèce humaine, et qu’ainsi, la notion de péché ne nous apparaît qu’a posteriori.

                  Je ne sais pas si la conscience est venue progressivement, ou miraculeusement d’un seul coup, mais je ne vois pas ce que cela change. Il y a bien eu un stade où l’être humain était capable, consciemment, en connaissance de cause, de s’opposer à Dieu. C’est à partir de ce stade qu’il est humain, je pense.

                  Vous écrivez :

                  Bien sûr, nous pouvons ergoter sur le fait de commettre un vrai péché sans en avoir vraiment conscience. Il me semble plus significatif de noter que, si je ne m’abuse, vous avez soigneusement évité de commenter le fait que la loi fondamentale du règne animal : tuer pour vivre, est d’une cruauté absolue, et qu’aucun être humain n’est censé pécher quand il tue un animal ou un végétal pour se nourrir.

                  Je suis assez déçue que vous écriviez que j’ai « soigneusement évité » de répondre à l’un de vos propos. Après tous les échanges que nous avons eu, je pensais que vous aviez remarqué que je n’évitais pas les questions délicates, même quand elles m’obligent à dire que je ne suis pas en adéquation avec le Catéchisme de l’Église Catholique. Vos messages sont tellement longs qu’il est difficile de répondre à tout à chaque fois. Si j’avais su que ce point était essentiel pour vous, j’y aurais répondu en priorité. Vous devriez vous méfier de votre propre tendance à voir de mauvaises intentions chez tout le monde. Oui, les animaux tuaient déjà pour vivre avant le péché originel. Je n’appelle pas cela de la cruauté, puisque la cruauté consiste à faire du mal volontairement. Oui, la violence existait déjà dans la création avant le péché originel. Oui, le Jardin d’Eden est un lieu symbolique qui n’a jamais existé. Le péché originel n’a pas introduit la violence, mais il a introduit le mal.

                  Vous écrivez :

                  D’ailleurs, la loi de Moïse : « Tu ne tueras point » est totalement contredite par l’injonction faite par Dieu à Saül, d’exterminer tous les Amalécites, injonction dont le refus entraîne la chute du premier roi d’Israël ; c’est dire à quel point l’appréciation du péché fluctue de manière abyssale selon les âges – avec certaines régressions, puisque la loi de Moïse est antérieure à la royauté.

                  Ce texte est certes très choquant. Ce ne peut pas être un texte historique, Dieu ne peut pas avoir demandé une telle chose. Et cela ne m’intéresserait pas de m’approcher d’un Dieu aussi incohérent et inhumain. Je pense que lorsque l’auteur a rédigé ce texte, tout le monde savait que les choses ne s’étaient pas passées ainsi, mais qu’il a voulu rédiger un texte symbolique pour insister sur le devoir d’obéissance envers Dieu.

                  L’Église évite également soigneusement d’effleurer ne serait-ce que du bout des lèvres les autres espèces humaines telles que l’Homme de Néanderthal. Nous savons qu’il était civilisé, artiste et entretenait le culte des morts, mais aussi qu’il était d’une autre race génétique qu’Homo Sapiens. Etait-il fils de Dieu ? Si non, pour quelle raison objective ? Le monogénisme en prend un sacré coup dans l’aile.

                  Je ne sais pas si l’homme de Néanderthal a une origine totalement différente de la nôtre ou non. D’après Wikipedia, il a un ancêtre commun avec Sapiens. Les êtres humains d’aujourd’hui porte une part d’ADN d’origine de Néanderthal. Comme je l’ai dit plus haut, il n’est pas indispensable que le premier humain ou le premier couple ayant péché soient des ancêtres directs de tous les hommes. Mais je ne connais pas l’avis des théologiens spécialistes de la question.

                  Vous écrivez :

                  Il n’est pas déraisonnable toutefois de noter que nous avons déjà du mal à nous en sortir avec huit milliards d’humains sur terre, et que selon le CEC, s’il n’y avait pas eu « péché originel », tous les êtres humains depuis la nuit des temps seraient toujours vivants sur la Terre. Je n’ose imaginer le degré d’inconfort extrême de cette situation ; à ce niveau de réflexion, j’en viens à me dire que si la procréation a un sens indépendamment de la mort, la mort individuelle a probablement un sens indépendamment du péché.

                  Nous avons déjà parlé du fait que le CEC dit que la mort humaine a été introduite par le péché originel, et du fait que je ne suis pas d’accord avec eux, notamment parce que c’est en contradiction avec la reconnaissance de la théorie de l’évolution par l’Église catholique. Oui la mort individuelle a un sens indépendamment du péché. Pour les chrétiens, la mort n’est qu’un passage.

                  Vous écrivez :

                  Paradoxalement, cette thèse de la procréation en tant que multiplicateur d’amour est propre à renforcer mon idée sur le « Paradis », puisque Jésus lui-même affirme que, dans le Paradis, on ne prend pas mari et femme. S’il y avait eu un « Paradis terrestre », l’homme et la femme n’y auraient donc pas enfanté, alors que vous m’avez convaincu que la procréation fait partie intégrante du projet d’amour de Dieu. Puisque la procréation est voulue par Dieu indépendamment du péché, et qu’il n’y a pas de procréation en Paradis, celui-ci est bien devant nous, dans le futur ; nous sommes en route vers cet état de grâce, nous ne l’avons jamais perdu ; nous l’acquérons peu à peu, à minuscules pas.

                  Encore une fois, nous sommes d’accord sur le fait qu’il n’y a pas eu de Paradis terrestre tel que décrit dans la Genèse. Mais même dans le récit de la Genèse, le Paradis terrestre n’est pas équivalent au Paradis céleste. L’homme et la femme ne sont pas des saints, ils sont là pour apprendre à grandir dans l’amour pour devenir un jour capables de vivre dans le Paradis céleste. S’ils étaient saints, ils ne se seraient pas méfiés de Dieu.

                  L’état de grâce n’est pas un état de perfection. Les petits enfants sont en état de grâce, mais ils évolueront peut-être vers le pire. L’état de grâce c’est de ne pas être coupé de la communion avec Dieu. Le Paradis céleste, c’est voir Dieu face à face et être semblable à lui, dans le respect de notre identité propre. Effectivement, cet état de perfection s’acquiert avec le temps.

                  Vous écrivez :

                  Concernant le changement « incessant » des préceptes moraux, il est assez cocasse que vous ayez choisi l’hypothèse d’un rejet de l’homosexualité allant jusqu’à l’enfermement physique des homosexuels, quand on connaît la violence dont font preuve certains chrétiens vis-à-vis des homosexuels, en particulier par les soi-disant « thérapies de conversion » condamnées par le droit français.

                  Vous trouvez cocasse mon exemple, mais vous ne répondez pas à ce que je vous dis par cet exemple. J’ai fait exprès de parler de l’homosexualité, parce qu’aujourd’hui, vous pensez que l’Église devrait écouter les sciences humaines sur la question de l’homosexualité, parce que vous êtes d’accord avec ce qu’elles disent, mais si les sciences humaines changeaient radicalement de point de vue, est-ce qu’il faudrait toujours les suivre ? Étant donné ce que nous enseignent l’histoire et la géographie des peuples, je ne vois pas comment on pourrait être absolument sûrs qu’aucune science humaine ne prônera jamais l’enfermement des personnes homosexuelles ?

                  En ce qui concerne les « thérapies de conversion », je ne suis pas assez informée pour en parler.

                  Vous écrivez :

                  En fait, de manière générale, l’Église en tant qu’institution fait de son mieux pour accueillir le plus authentiquement possible les personnes homosexuelles, mais continue dans le même temps de rejeter leur homosexualité, alors que celle-ci fait partie intégrante de leur être. C’est une position pour le moins ambiguë et, j’imagine, une sorte de torture pour les homosexuels chrétiens.

                  L’Église considère que les êtres humains sont faits pour l’amour hétérosexuel, elle ne peut donc pas considérer que l’homosexualité fait partie de l’être des personnes homosexuelles, même si elle reconnaît qu’ils ne sont pas responsables de leurs attirances. L’Église enseigne à aimer et accueillir chaque être humain, et enseigne à éviter le péché. Oui bien sûr, quand un chrétien se découvre homosexuel ou qu’une personne homosexuelle devient chrétienne, c’est très éprouvant pour elle. C’est la même chose pour toutes les personnes habitées par de très fortes pulsions mauvaises, quelles qu’elles soient.

                  Vous écrivez :

                  De manière plus large, l’Église, quand elle parle des personnes homosexuelles, parle très rarement de leur amour ; si un couple homosexuel vit un amour manifestement éclatant et signe éclairant du Royaume, pouvez-vous, en toute honnêteté, me jurer que cet amour sera loué et cité en exemple par l’Église ?

                  Non, l’Église ne donnera pas en exemple l’amour d’un couple homosexuel, même si elle peut donner en exemple leurs actes bons. Si un frère et une sœurs vivaient en couple en se donnant beaucoup d’amour, est-ce que vous pensez aussi que l’Église devrait donner leur amour en exemple ? L’Église enseigne qu’un mal reste un mal même s’il en ressort un bien.

                  Vous écrivez :

                  D’ailleurs, il y a fort à parier que si l’Église, tout en continuant d’ostraciser l’homosexualité, accueille mieux les personnes homosexuelles, c’est très probablement grâce à la confrontation avec la morale laïque et les sciences humaines. C’est justement cela que je voulais souligner lorsque je parlais d’une confrontation positive, sans chercher à demander que l’Église suive aveuglément toutes les modes du moment.

                  Je ne sais pas dans quelle mesure les sciences humaines ont conduit ou non l’Église vers plus d’amour envers les personnes homosexuels. Mais je suis d’accord avec votre dernière phrase : une confrontation positive entre l’Église et les sciences humaines, sans suivre aveuglément les modes du moment.

                  Vous écrivez :

                  De même, lorsque vous pensez « que l’interdit des rapports sexuels pendant les règles était une bonne chose pour les femmes, à une époque où elles n’avaient pas trop leur mot à dire si leur moitié voulait coucher avec elles mais qu’elles n’en avaient pas envie… (car) beaucoup de femmes n’ont aucune envie d’avoir des rapports sexuels au moment des règles », cela semble à première vue très juste, mais dans ce cas, pourquoi la religion considère-t-elle la femme impure au moment des règles ? Encore une fois, l’impureté est une manière de vilipender la femme alors que, selon votre remarque, elle aurait plutôt dû être sacralisée à ce moment particulier. J’ai lu ici ou là des témoignages de familles qui organisent une fête lors des premières règles d’une jeune fille. Cette idée me semble très forte et évocatrice, mais je n’ai pas l’impression qu’elle soit très répandue.

                  Ce n’est pas « la religion » en général qui considère la femme impure pendant les règles, mais la religion juive. La religion juive reconnaissait de nombreuses sources d’impureté, qui frappaient les hommes comme les femmes. Comme le sang était l’une de ces sources d’impureté, forcément les femmes étaient plus touchée. Cette question de l’impureté était probablement un héritage d’autres religions avec lesquels les juifs avaient été en contact. Je ne comprends pas pourquoi il fallait qu’elle fasse partie de la loi juive.

                  Vous écrivez :

                  Si je puis me permettre une petite parenthèse, il semble que depuis ces temps immémoriaux, tout ce qui a trait au sexe est frappé d’infamie pour une femme, à l’exception de l’enfantement ; et même, ce qui est proprement incroyable, c’est qu’une femme est systématiquement encensée d’avoir enfanté, mais pas d’avoir accouché.

                  Pour ma part, j’ai souvent entendu les gens admirer les femmes de supporter l’accouchement. Je n’ai pas l’impression que le sexe ait été considéré comme une infamie pour les femmes, mais par contre l’adultère des femmes a toujours et partout été plus condamné que celui des hommes, puisque les hommes étaient les dominateurs, et que l’adultère des femmes pouvait remettre en cause la paternité de leurs enfants. Cette condamnation unilatérale est bien sûre hypocrite, puisque pour que des hommes trompent leur femme, sauf relations homosexuelles, il faut que des femmes soient disponibles pour avoir des relations sexuelles hors mariage.

                  Vous écrivez :

                  Sinon, comment peut-on interpréter cette incongruité selon laquelle Marie est restée « toujours vierge » ? L’accouchement aura forcément déchiré son hymen. Affirmer le contraire revient à sacraliser, comme l’a fait l’Église catholique, la tradition populaire décrite dans le Protévangile de Jacques selon laquelle son enfant se sera téléporté hors de son ventre – et le placenta se sera probablement auto-résorbé sous on ne sait quelle action purificatrice du Saint-Esprit.

                  Je suis vraiment très étonnée que vous assimiliez virginité et intégrité de l’hymen. Pour vous, toutes les adolescentes dont l’hymen a été déchiré, soit par l’utilisation de tampons pour les règles, soit par des exercices de gymnastique, soit parce que l’hymen n’était pas intègre dès l’origine, toutes ont perdu leur virginité ? Le dictionnaire Larousse donne comme définition de virginité : « État d’une personne qui n’a jamais eu de rapports sexuels. » Il n’est pas question d’hymen. J’espère que vous ne considérez pas que la naissance d’un enfant est un rapport sexuel 😉

                  Quand à la téléportation de Jésus hors du ventre de Marie, je ne vois pas comment vous pouvez dire que l’Église catholique prône cette idée ridicule ?

                  À titre personnel, je n’arrive pas à m’intéresser à la virginité de Marie, et quand je parle d’elle je dis « Marie » et jamais « la Vierge ».

                  Vous écrivez :

                  Vous me dites ensuite que « Jésus a justement libéré la religion de nombreuses règles inutiles, comme par exemple les interdits alimentaires ». Je crois que nous ne nous rendons pas compte, nous Chrétiens, des déchirements inouïs qu’a impliqués cette révolution pour les Juifs pieux – la Bible regorge d’exemples de Juifs morts avec un courage exemplaire pour avoir refusé d’abandonner ces interdits. Imaginons une seconde que nous soyons – par un enchaînement de spéculations et concentrations dans l’industrie agro-alimentaire – nourris par des entreprises asiatiques, et que ce régime alimentaire intègre de la viande de chien. N’allons-nous pas hurler ? Et pourtant, absolument aucune règle ne nous l’interdit, ni dans la religion juive, ni dans la religion chrétienne !

                  Les Actes des Apôtres et les lettres de Saint Paul montrent comment certains de ces éléments ont été difficiles à accepter par les chrétiens venus du judaïsme.

                  Vous écrivez :

                  Je suis également extrêmement frappé de votre inversion totale du précepte évangélique : « J’ai toujours entendu enseigner que le premier commandement de Jésus nous enseignait l’amour de soi, l’amour du prochain et l’amour de Dieu. »

                  De fait, le premier commandement que cite Jésus est avant tout l’amour de Dieu, et même dans sa forme élaborée et emphatique du Deutéronome : « de tout ton cœur, de toute ton âme, de toutes tes forces » ; Jésus cite ensuite le commandement du Lévitique : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même ». Donc, au sens strict, aucun commandement, ni judaïque ni chrétien, ne nous invite explicitement à nous aimer nous-mêmes ; la seule référence est totalement implicite : « comme toi-même ». C’est vraiment très étrange de votre part d’opérer cette inversion. Puisque vous me dites que vous avez toujours entendu enseigner cela, je vous crois volontiers – cela a sans doute joué sur votre vocation, et tant mieux. Je peux par contre vous affirmer que pour ma part, je n’ai jamais entendu ce passage de l’Évangile mentionné dans l’ordre que vous m’indiquez, même en homélie. D’ailleurs, si je me réfère au CEC

                  Je suis désolée pour ce malentendu, je n’ai pas voulu écrire les éléments par ordre d’importance. Jésus est très clair sur le fait que l’amour de Dieu est le « premier commandement », et que l’amour du prochain est le « second commandement, qui lui est semblable ». Mais ce second commandement, semblable au premier, donne une très grande importance à l’amour de soi. Si Jésus me dit d’aimer mon prochain comme moi-même, cela veut dire que je dois vraiment m’aimer beaucoup moi-même, sinon je n’aimerai pas beaucoup mon prochain. L’amour de Dieu est premier car Dieu est la source de tout amour, c’est en l’aimant que je deviendrai capable de m’aimer en vérité et d’aimer mon prochain.

                  Vous écrivez :

                  Concernant le fait que l’Éros soit systématiquement sous la coupe de l’Agapê, je ne pensais pas spécialement aux relations sexuelles hors mariage lorsque j’écrivais cela. Si je reprends le CEC

                  * sur environ 125 occurrences du nom « désir », du verbe « désirer » et de l’adjectif « désireux », il n’y en a que 5 qui concernent le désir charnel : 2 uniquement pour louer le désir du couple, 3 pour condamner la masturbation et l’adultère

                  * si l’on passe au nom « plaisir », il n’y a plus que 20 occurrences, dont 4 s’appliquent au spirituel (le « bon plaisir du Père / de Jésus »), 4 expriment qu’il s’agit d’une bonne chose pour le couple, 12 fustigent tout ce que l’Église considère comme des déviances

                  * l’expression « faire l’amour », sommet de poésie et de vérité, n’apparaît nulle part

                  * l’expression « acte sexuel » n’apparaît que trois fois : une fois pour fustiger l’homosexualité, une fois pour fustiger la procréation « non naturelle », une fois pour fustiger l’union libre

                  * « harmonie charnelle » et « communion charnelle » n’apparaissent nulle part

                  * « union charnelle » apparaît deux fois : une fois pour fustiger la fornication, une fois pour condamner la vie commune hors mariage

                  Je ne suis pas d’accord avec vous sur l’expression « faire l’amour », car pour moi ce n’est pas de l’ordre du « faire ».

                  Ne demandez pas au Catéchisme de l’Église Catholique d’être autre chose qu’un catéchisme. Il existe de nombreux ouvrages catholiques sur la sexualité qui abordent la question d’une manière plus complète.

                  En ce qui concerne le fait que Eros soit sous la coupe d’Agape, je vous renvoie à l’encyclique de Benoît XVI, Deus caritas est. Il dit que même Dieu ressent de l’eros vis-à-vis de l’homme, c’est-à-dire que Dieu ne cherche pas uniquement par altruisme à nous faire du bien, mais qu’il a aussi le désir d’être uni à nous. Il valorise donc aussi l’eros entre homme et femme. Il écrit :

                  « En réalité, eros et agapè – amour ascendant et amour descendant – ne se laissent jamais séparer complètement l’un de l’autre. Plus ces deux formes d’amour, même dans des dimensions différentes, trouvent leur juste unité dans l’unique réalité de l’amour, plus se réalise la véritable nature de l’amour en général. Même si, initialement, l’eros est surtout sensuel, ascendant – fascination pour la grande promesse de bonheur –, lorsqu’il s’approche ensuite de l’autre, il se posera toujours moins de questions sur lui-même, il cherchera toujours plus le bonheur de l’autre, il se préoccupera toujours plus de l’autre, il se donnera et il désirera ‘‘être pour’’ l’autre. C’est ainsi que le moment de l’agapè s’insère en lui ; sinon l’eros déchoit et perd aussi sa nature même. D’autre part, l’homme ne peut pas non plus vivre exclusivement dans l’amour oblatif, descendant. Il ne peut pas toujours seulement donner, il doit aussi recevoir. Celui qui veut donner de l’amour doit lui aussi le recevoir comme un don. » (2005 Deus Caritas est 7)

                  Vous écrivez :

                  Mais dans mon dernier message je pensais plutôt à une vision plus pessimiste de la sexualité, dans le mariage même ; si la fantaisie sexuelle – entre autres : la masturbation mutuelle, la fellation, le cunnilingus – n’est tolérée que du bout des lèvres, uniquement en tant que préliminaire à une pénétration vaginale par le sexe masculin, et ce même dans le cas où le couple n’est pas ou plus en mesure d’enfanter, il n’est pas étonnant que la routine ou la disette charnelle précipite l’immense majorité des couples dans le divorce.

                  46 % des mariages en France se terminent par un divorce, ce n’est pas l’immense majorité des couples qui divorcent, même si ce chiffre reste énorme. Vous pensez vraiment que ces 46 % de couples mariés qui divorcent le font parce que l’Église n’encourage pas assez la variété des pratiques sexuelles ?

                  Vous écrivez :

                  En quelque sorte, je considère que les chrétiens mariés n’ont pas un besoin essentiel de prier lorsqu’ils font l’amour ; il leur est peut-être plus utile de chercher comment pimenter leur vie de couple en continuant à se respecter l’un l’autre.

                  Pour l’exprimer autrement : à mon sens, les aspects charnel, intellectuel, affectif, spirituel de la personne devraient se considérer à égalité, pas dans une surreprésentation morale du spirituel.

                  Ainsi, je veux bien vous suivre quand vous concluez que « les deux sont nécessaires. La réflexion théologique, y compris en théologie morale, reste indispensable pour vivre sa foi et faire le bien ».

                  Le souci, c’est qu’en lisant le CEC, on voit bien que la théologie, la morale, le spirituel y sont surreprésentés par rapport au charnel, à l’affectif, à l’amour dans sa plus simple acception.

                  Comme plus haut, vous reprochez au CEC d’être un catéchisme. Il existe de nombreux ouvrages catholiques sur la sexualité. Le CEC n’est pas le tout de l’Église.

                  Vous écrivez :

                  Nous pouvons donc noter qu’aujourd’hui, si nous n’avons plus vraiment d’interdits alimentaires, le poids phénoménal sur la sexualité reste extrêmement fort. Et de la même manière que Jésus a, selon vos propres termes, libéré la religion de ces interdits alimentaires qui étaient pourtant fondamentaux pour son peuple, je pense qu’un jour ou l’autre, les hommes et femmes chrétiens qui s’aiment seront libérés de plusieurs, voire de nombreux interdits sexuels qui ne sont peut-être pas aussi absolument nécessaires que l’Église institutionnelle peut le penser actuellement, en regard de l’infinie richesse de l’amour positif, pour peu qu’il soit chéri et non pas sur-sacralisé : dans toute sa fragilité, avec un soin minutieux et des techniques humaines propres à le protéger et le faire grandir.

                  Je ne sais pas si à l’avenir l’Église reviendra sur certains interdits en lien avec la sexualité. Peut-être. Je ne suis pas compétente pour le prévoir. Savez-vous pourquoi la masturbation est de loin le sujet numéro 1 abordé dans les questions sur ce site ? Parce que Google en a décidé ainsi. Quand les gens tapent sur Google « masturbation catholique », nous sommes dans les tout premiers résultats. Sur d’autres sujets qui m’intéressent plus, non. Je m’intéresse à la sexualité, j’ai vécu un an dans la ville de Pattaya en Thaïlande, pour soutenir des femmes prostituées. Mais la question des interdits dans la sexualité n’est pas mon centre d’intérêt premier. À ceux qui m’interrogent, sur le site ou par le formulaire de contact, je dis quel est le point de vue de l’Église catholique sur la question, mais ma compétence s’arrête là.

  9. Pelostome

    Bonsoir,

    les textes du jour ont un arrière-goût amer aujourd’hui.

    Le calendrier de la poste, en date du 9 août, célèbre la St Amour. Ce saint est supposé légendaire ; l’est-il plus que Véronique ou Christophe, entre autres exemples ?

    L’Église catholique lui préfère Édith Stein, juive convertie au catholicisme, philosophe et militante féministe.

    La première lecture du jour est celle d’Osée : « Mon épouse infidèle, je vais l’entraîner jusqu’au désert, et je lui parlerai cœur à cœur… » Comment ne pas penser au Peuple Élu, « peuple à la nuque raide », qui, à l’exemple d’Édith Stein, pourrait se refaire une virginité grâce au catholicisme ?

    L’Évangile choisi, celui des « Vierges sages et vierges folles » est encore plus surprenant : dix jeunes filles (entendez : non mariées, donc forcément vierges) sont invitées à des noces et s’endorment toutes les dix en attendant le marié qui n’arrive qu’au milieu de la nuit. Les « vierges folles » demandent aux « vierges sages » de partager leurs réserves d’huile afin de rallumer leurs lampes, car ces dernières en ont emporté plus que nécessaire. Les « vierges sages » leur répondent avec raison qu’il n’y en aura jamais assez pour tout le monde et les enjoignent d’aller en acheter ; bien sûr, le temps que celles-ci trouvent l’huile nécessaire, la salle de bal est fermée et elles restent éclairées certes, mais rejetées.

    Quel est donc cet époux malotru qui pousse l’indélicatesse jusqu’à arriver à la noce à 2 heures du matin ?

    De quel droit nous dit-on que cinq vierges étaient « insensées » pour n’avoir pas anticipé un comportement aussi désinvolte, malpoli et improbable ?

    Quelles sont ces soi-disant « vierges sages » qui vont à la fête en robe de princesse avec un jerrican d’huile à la main ?

    Quel est ce rabbi qui multiplie les pains à foison et refuse de renouveler le miracle bien connu d’Hanoucca ?

    Quel est ce conseil stupide d’aller acheter quoi que ce soit en pleine nuit ?

    Et quelle est cette maxime finale : « Veillez donc, car vous ne savez ni le jour, ni l’heure » alors que veiller ou dormir n’apporte absolument aucun changement au problème des provisions d’huile ?

    J’ai vraiment du mal avec ce texte. Il pourrait, par contre, prendre un sens particulièrement aiguisé pour les couples : l’énergie du désir dont tous les êtres humains – voire même tous les animaux – sont pourvus, n’est pas forcément suffisante pour alimenter la lampe de l’amour jusqu’à « ce que la mort nous sépare » ; la réserve d’énergie procurée par l’empathie et l’analyse des sentiments est la bienvenue pour arriver à cet idéal.

    Au lieu de cela, je ne sais pas si je dois considérer que l’Église l’a choisi sciemment en tant qu’hommage à Édith Stein pour signifier que la flamme du judaïsme n’est rien si elle ne bénéficie pas du secours du catholicisme, ou pour marteler que les sciences humaines, le féminisme et la philosophie ne seront jamais suffisants s’ils ne sont pas soutenus par la spiritualité chrétienne.

    Toujours l’humain sous la coupe du spirituel.

    • Cat-modératrice

      Re-bonjour Pelostome,

      La prochaine fois que vous voudrez parler d’un nouveau sujet, publiez plutôt une nouvelle question. Là nous sommes très loin du sujet de la masturbation.

      Je ne vais pas répondre dans le détail, mais vous critiquez la parabole comme si elle était à prendre au pied de la lettre, alors que tout est symbolique. Jésus ne s’embarrasse pas de vraisemblance dans ses paraboles.

      Quand à vos suppositions sur le motif pour lequel l’Église a choisi cet évangile pour Edith Stein, elle m’étonnent beaucoup. Si l’Église voulait signifier cela, ce serait un moyen bien peu efficace pour le dire, car je pense que les personnes qui l’interprètent comme vous seront bien peu nombreuses. L’Église n’hésite pas à dire ce qu’elle pense, même quand ce sont des sujets qui fâche. Vous reprochez déjà bien assez à l’Église ce qu’elle dit ouvertement. Pourquoi dirait-elle les choses par des moyens que personne ne comprendrait ?

    • Cat-modératrice

      Je répondrai tout de même à ce que vous dites au sujet de « se refaire une virginité grâce au catholicisme ». L’Église catholique ne considère pas le peuple juif comme un peuple impure. Les Juifs adorent le vrai Dieu. Saint Paul dit bien quelle est la grandeur du peuple juif dans le dessein de Dieu.

      Seulement l’Église catholique considère que les Juifs se trompent en ne reconnaissant pas Jésus comme le Messie. Vous n’allez pas reprocher aux chrétiens de considérer que Jésus est vraiment le Messie ?

      • Maurice

        Bonsoir Cat,
        Juste un mot pour vous dire mon admiration, pour vos réponses à des questions fleuves.

        • Cat-modératrice

          Merci pour votre encouragement !

          • Pelostome

            Bonsoir,

            je partage l’admiration de Maurice. J’ai écrit ces deux messages dans un état de grande détresse et vos mots patients m’ont procuré une certaine forme d’apaisement ce soir.

            Votre manière calme et posée de répondre n’est peut-être pas étrangère aux résultats de Google 😉

            Ca ne règle rien pour moi, et il reste quelques points qui me hérissent ou sur lesquels j’ai l’impression de ne m’être pas bien fait comprendre. Il faudra probablement que je prenne le temps d’y réfléchir.

            Mais surtout, je me sens emprisonné car le pardon suppose au moins la volonté de conversion et je ne vois pas comment me résoudre à chercher à me convertir sur quelque chose qui ne me semble en rien mal. Je suis donc condamné à ne plus jamais communier sacramentellement et surtout, j’ai la sensation confuse que cette épine m’empêche de réfléchir à d’autres sujets plus importants.

            J’ai peur. J’ai peur de mettre Dieu au défi en questionnant son Église, en osant remettre en doute les certitudes millénaires qu’elle inculque.

            J’ai beaucoup aimé l’extrait de « Deus caritas est ». Je ne sais pas si j’aurai le courage de le lire en entier, mais ces mots m’ont fait du bien.

            • Cat-modératrice

              Merci Pelostome.

              N’ayez pas peur de Dieu. Vous agissez selon votre conscience en questionnant l’Église. Dieu préfère cela de loin à ce que vous vous désintéressiez de lui !

              • Pelostome

                J’ai moins peur de Dieu que de moi-même.

                Si l’état de grâce ou de justice originelle se rapporte à l’attitude d’un enfant qui voue une confiance absolue, totale et aveugle à ceux qui sont chargés de lui inculquer les bonnes mœurs, alors chaque questionnement m’éloigne de cet état.

                Si Dieu m’aime gratuitement et infiniment, mon plus grand malheur sera de ne pas répondre assez à cet amour.

                Si l’Église, sur certains points qui me heurtent, possède une infaillibilité directement reçue de l’Esprit-Saint, la questionner avec une certaine violence offense ce Dieu qui m’aime tant.

                Si, comme sur d’autres points comme l’esclavage ou le voile des femmes, elle infléchit un jour son discours, je ne le verrai jamais de mon vivant, et ma souffrance peut faire de moi un compagnon désagréable.

                J’ai un mal énorme à me montrer sociable. Chérir de tout mon être une femme en tentant de m’améliorer jour après jour, je peux essayer. M’exercer à cultiver un regard bienveillant sur les gens que je rencontre, c’est un beau challenge. Aimer l’Église même lorsque je souffre, ça me semble une évidence : l’Église, ce sont les gens que j’aime et moi-même autant qu’une institution que j’ai souvent du mal à comprendre.

                Prendre pour modèle absolu l’obéissance de Don Helder Camara dont toute l’œuvre de libération a été méthodiquement démolie par son successeur sans qu’il laisse échapper une plainte, j’ai peur de ne pas y arriver.

                • Cat-modératrice

                  Bonjour Pelostome,

                  La confiance absolue que nous sommes appelés à avoir est la confiance en Dieu, non la confiance en l’Église, même si nous sommes appelés à considérer l’Église comme notre mère.

                  L’impression que j’ai en vous connaissant un peu, c’est que vous cherchez passionnément la vérité. Jésus EST la vérité, donc c’est lui que vous cherchez passionnément.

                  Je ne joue pas sur les mots en disant cela, je pense que vous êtes vraiment dans une recherche, inquiète certes, de Jésus. Et Blaise Pascal écrit : « Tu ne me chercherais pas, si tu ne m’avais trouvé ». Votre désir d’être uni à Dieu, le fait que vous soyez tourmenté à l’idée d’être en désaccord avec l’Église, le fait de questionner les enseignements de l’Église plutôt que de vous en désintéresser, le fait que vous cherchiez la vérité, montre que vous êtes déjà en communion avec Dieu.

                  Vous me dites maintenant que vous aimez l’Église et les gens qui la composent : c’est une preuve de plus que vous n’êtes pas coupé de Dieu, même si vous êtes, dites-vous, un « compagnon désagréable ». Beaucoup de saints ont été des compagnons désagréables : Saint Jérôme, Saint Damien de Molokaï… Être un compagnon désagréable est souvent plus une épreuve pour celui qui est désagréable que pour les autres.

                  Si vous cessiez de questionner les enseignements de l’Église, vous iriez à l’encontre de votre conscience. Vous avez raison de chercher et vous devez chercher encore. Si vous vous faites lobotomiser pour cesser de vous questionner, vous rendrez vraiment moins gloire à Dieu que par votre désir de vérité.

                  De nombreux saints ont obéi même quand on leur demandait des choses qui allaient contre la volonté de Dieu. Jésus avait dit à un saint : « Si je te dis de faire quelque chose et que ton supérieur te demande de faire le contraire, obéis à ton supérieur. » Vous avez peur de ne pas y arriver ? Le chemin de la sainteté passe d’abord par la patience envers soi-même. Le premier pas pour grandir dans l’union avec Dieu est de ne pas douter de son amour, de son pardon, et donc de notre union avec lui, même quand nous ne nous comportons pas comme des saints. Votre objectif ne doit pas être de vous comporter comme les grands saints, mais d’être uni à Jésus. En avançant sur ce chemin spirituel, vous êtes déjà uni avec Jésus, et vous pouvez rester uni à lui pas à pas, quand vous tombez et quand vous vous relevez. Donc si votre désir est vraiment d’être uni à lui, alors en marchant sur ce chemin vous êtes déjà arrivé.

  10. Pelostome

    Bonsoir,

    j’ai lu avec attention « Deus caritas est » de Benoît XVI ; il y a des choses intéressantes mais pas tellement de choses sur les défis du couple lui-même. Au lieu de cela, Benoît XVI switche dans la 2° partie de son encyclique sur la supériorité de l’Église par rapport à la politique et à la lutte des classes. J’en ai été assez déçu, avant de me dire que je m’étais probablement trompé de lecture puisque le titre parle clairement de « Caritas » qui transpose en latin le mot grec « Agapê » désignant pratiquement l’amour spirituel et désincarné que l’Église oppose à l’autre mot grec « Eros », le désir et plaisir charnels.

    Je me suis donc tout naturellement tourné vers « Amoris laetitia » de François, puisque le terme latin « Amor » traduit exactement « Eros ». Mais j’ai été encore plus déçu. Les seuls passages qui ont retenu l’attention de la majorité des lecteurs concernent les divorcés remariés et les couples hors mariage, François insistant sur la nécessité de leur réserver toute leur place dans l’Église, sans jamais remettre en cause l’exclusion de principe dont ils font l’objet – bien sûr, il ne le peut pas, tant sont vivaces les traditions séculaires. Pour le reste, l’essentiel du message ne concerne pas vraiment le couple mais plutôt la famille ; l’Église, même lorsqu’elle veut se renouveler, reste prisonière du carcan patriarcal dans lequel elle est enracinée depuis ses origines – qui était déjà celui du judaïsme.

    Arrivé à ce point-là, j’ai été honteux de ne pas avoir commencé par la Théologie du Corps de Jean-Paul II. Mais après avoir parcouru quelques pages, j’a jeté l’éponge. La somme constituée par de longues catéchèses, chaque mercredi, pendant des années, me semble hors de portée de lecture. Je préfère revenir à deux pépites de « Deus caritas est ».

    Vous m’avez fourni vous-même la première, propre à nous saisir de vertige : Dieu « aime, et son amour peut être qualifié sans aucun doute comme Eros… »

    Bigre. Ainsi, Dieu est un être de désir. Il se meurt d’amour pour nous, il pleure de ne pas être aimé, il se consume dans les flammes de la passion. Voilà un message incroyable pour les bêtes charnelles que nous sommes accusés d’être : dans notre animalité la plus primitive, nous sommes déjà à l’image de Dieu. Comment pouvons-nous être à ce point convaincus de honte par cette Église dont la tâche première est de nous apporter le bonheur ?

    La réponse se trouve dans la deuxième réflexion de Benoît XVI : il est vain d’opposer Eros et Agapê car l’Eros lui-même débouche naturellement sur l’Agapê. La démonstration est magistrale : l’Eros est désir, et ce désir s’assouvit dans un immense bien-être de plaisir ; or, il apparaît très vite que ce plaisir n’est jamais aussi puissant que lorsqu’il est partagé avec ma partenaire. Partager ce plaisir avec elle m’entraîne quasi mathématiquement à vouloir son plaisir, et donc, à m’engager dans le don de moi qui est très précisément la définition de l’Agapê. A ce point de la réflexion, la félicité est parfaite.

    Toutefois, Benoît XVI nous avertit formellement sur un point qui pose effectivement un problème essentiel, mais dont la réponse qui lui est apporté va tout gâcher : « L’homme ne peut pas non plus vivre exclusivement dans l’amour oblatif, descendant. Il ne peut pas toujours donner, il doit aussi recevoir ». Certes ; mais comment m’en sortir lorsque celle que j’aime ne répond pas suffisamment à mes attentes ? La réponse de Benoît VXI est particulièrement abasourdissante en ce sens qu’elle répond d’emblée totalement à côté de la question : « L’homme peut assurément, comme nous dit le Seigneur, devenir source d’où sortent des fleuves d’eau vive. Mais pour devenir une telle source, il doit lui-même boire toujours à nouveau à la source première et originaire qui est Jésus-Christ, du coeur transpercé duquel jaillit l’amour de Dieu ».

    Les bras m’en tombent. Les mots me manquent. Il m’est arrivé de ressentir des choses immenses dans la prière, mais jamais d’orgasme. J’ai l’impression d’être encouragé à distribuer allègrement et absolument toute la nourriture dont mon corps a besoin, contre la promesse certaine d’être rassasié de livres qui nourriront mon esprit. Super ; j’adore réfléchir, mais je crève la dalle.

    Il ne reste plus qu’à boucler la boucle en complétant la phrase que j’ai volontairement laissée ci-dessus en suspens : « son amour peut être qualifié sans aucun doute comme Eros… qui toutefois est en même temps et totalement Agapê ».

    Je pense sincèrement que le nœud du problème est là. L’Église catholique romaine a mis deux mille ans avant de célébrer l’amour charnel, à proclamer qu’il est bon, voulu par Dieu, et que lui-même est éperdu de désir. Mais cet Eros n’a qu’un seul but : l’Agapê. En vérité, cela éclaire d’une lumière singulière tous les interdits de l’Église : interdits de la masturbation, de la sexualité d’un soir, du couple non marié, du mariage civil non religieux, de l’infidélité, de l’homosexualité, de l’avortement, de la contraception mécanique et chimique… même en restant pleinement conscients que la modification du cycle de la femme par des moyens non naturels n’est pas forcément sans conséquence, comme a pu le rappeler le scandale du Médiator, il ne faut jamais oublier que la pilule contraceptive a constitué un formidable élan de liberté pour des milliards de femmes justement parce qu’elle leur permet d’accéder au plaisir en-dehors de la crainte du carcan patriarcal qui les voue immanquablement à leur rôle de mère.

    L’Église catholique romaine encense le plaisir, mais toujours dans l’optique du don de soi ; l’Eros, dans la direction de l’Agapê ; la satisfaction, uniquement en vue de la sainteté. Elle refusera toujours et systématiquement le plaisir pour le plaisir. Je peux comprendre sa logique, mais je ne pense pas pouvoir jamais y souscrire. Et comme je suis chrétien, je reste et serai condamné pour l’éternité à cette souffrance indicible dans mon corps et mon coeur.

    • Cat-modératrice

      Bonjour Pelostome,

      Je ne suis pas sûre de comprendre tout ce que vous écrivez. En tout cas, je ne suis pas d’accord sur le fait que, pour Benoît XVI, le but de l’Eros est de devenir Agape. Il dit au contraire que les deux sont nécessaires et indissociables.

      Je suis étonnée de ce que vous dites du pape François concernant l’enfermement dans la tradition, car dans Amoris Laetitia, il dit clairement, dans une note, que la communion peut être donnée dans certains cas aux divorcés-remariés, et il vient aussi d’autoriser la bénédiction de couples en situation irrégulière, y compris homosexuels. Cela fait suffisamment scandale dans l’Église pour que l’on ne puisse pas taxer cela de traditionnel.

      Pour beaucoup des points que vous abordez, nous en avons déjà parlé, mais s’il y a un autre point sur lequel vous souhaitez que je réponde, dites-le moi.

      • Maurice Van Malleghem

        D’accord avec vous Cat, petite précision le Mediator était un antidiabétique, et mal utilisé aussi comme amaigrissant

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