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La communauté bénédictine Sainte Marie-Madeleine, installée au monastère de Ganagobie (Alpes de Haute Provence), fête ses 150 ans. Il y a environ quinze moines bénédictins présents dans ce monastère aujourd’hui.
J’ai eu la grâce d’y faire une retraite personnelle d’une semaine cet été, je partage quelques saveurs et inspirations reçues là-bas, et quelques réflexions générales sur la vie monastique.
Le site de Ganagobie est situé sur un plateau difficile d’accès, avec une superbe vue sur la vallée de la Durance et les sommets des Alpes. Le silence et la sérénité y sont impressionnants. Dès que l’on arrive là-haut, l’agitation du monde disparaît. On entre dans le dialogue avec Dieu seul. Enfin, je peux l’écouter, et il peut me parler sans interférence extérieure. Même si j’arrive plein de bruit intérieur, cela ne fait rien, Dieu me prend tel que je suis. Comme le dit saint Claude la Colombière, il ne se lasse jamais de m’écouter.
Dans la vie monastique, tout est organisé pour maintenir constamment ce dialogue avec Dieu. C’est une vie qui anticipe la vie éternelle, où nous serons dans ce dialogue, dans cette plénitude, dans cet embrassement ininterrompu. Les moines se sont mis en condition de vivre cette brûlure jour après jour. Cela n’empêche pas bien sûr qu’ils vivent comme nous de douloureux temps de désert intérieur, où la présence de Dieu se retire.
Les sept offices, ce chant des psaumes, accompagné de superbes hymnes, sont un rappel de notre vocation présente et éternelle : servir et louer Dieu en tout temps, à toute heure du jour et de la nuit.
Vivre avec les moines, ce fut pour moi à la fois une purification et un rassasiement au quotidien. Notre âme est faite pour Dieu. Nous n’avons souvent matériellement pas le temps de prier autant que nous le voudrions. D’autre part, il n’est pas facile de trouver des églises ouvertes pour y adorer Jésus dans le Saint-Sacrement. Au monastère, on peut boire à la source vive autant qu’on le souhaite, à toute heure du jour et de la nuit. On peut prier toute la journée et toute la nuit si on le souhaite, rien ne vient entraver notre volonté de nous tenir constamment en présence de Dieu, de vivre de lui seul.
Chez les moines, on se purifie du poison de l’utilitarisme, qui nous touche tous, souvent à notre insu, tant il est intense dans notre société. Selon les normes du monde, les moines ne servent à rien. Et d’ailleurs, pour nous chrétiens, il en est de même, et c’est très bien ainsi !
Certes, nous les regardons et cela nous est utile car ils nous aident à contempler l’unique nécessaire.
Mais ce n’est pas pour ça qu’ils existent, ce n’est qu’un heureux effet de leur appel.
Ils existent pour adorer et louer Dieu, tout simplement, et cela n’a absolument aucune utilité directe. L’aimer n’est pas utile. Il est impossible d’aimer quelqu’un pour son utilité, c’est une contradiction dans les termes. Les moines nous montrent cet amour gratuit.
Certes, nous laïcs sommes envoyés par Dieu pour sanctifier la création. Mais si nous oublions notre but ultime, si nous ne nous retrempons pas dans l’adoration et la louange, nous tombons dans l’agitation stérile. Les saints de la charité comme saint Vincent de Paul ou Mère Téresa sont faciles à « comprendre » pour notre monde. Au moins ils ont une utilité visible ! Rien de tout cela dans la vie monastique, et c’est pourquoi elle est si importante et si dérangeante, pour nous comme pour les non chrétiens.
Quelle grâce pour nous de contempler ces gens qui ne servent à rien ! Combien ils nous aident ! Combien il nous est bon de penser souvent à eux, de nous rappeler ces sentinelles silencieuses qui « prient dans le secret » comme nous le dit Jésus. Eux aussi ont un grand besoin de notre prière, car ils ont eux aussi de grands combats à mener, comme tous les chrétiens.
Combien il est nécessaire que les enfants chrétiens puissent rencontrer ces moines et moniales et ainsi avoir une image de la vie éternelle, découvrir la beauté de la vie contemplative, même s’ils ne sont pas appelés au monastère. C’est un très beau cadeau que d’emmener un enfant régulièrement chez les moines, et de demander à un moine de lui expliquer quelle est sa vie et pourquoi il est moine. Ainsi, l’enfant, entrant facilement en relation avec Dieu, voit une personne adulte qui a dédié sa vie à cette contemplation. Il peut percevoir naturellement le sérieux de l’adoration, de la prière, et s’en imprégner tout naturellement. Les moines nous aident à vouloir toujours plus devenir des saints, à vouloir toujours plus nous rapprocher de Dieu par la prière d’adoration et de louange.
Quel immense service nous rendent-ils à nous les laïcs !
Alors pourquoi ne pas prévoir dans notre année une retraite personnelle ? Si nous redoutons le silence complet, il existe toutes sortes de retraites prêchées. Il existe des dizaines de monastères de toutes obédiences en France. Rien n’empêche de les contacter pour leur demander s’ils accueillent des retraitants et de prendre date, même pour deux ou trois jours.
Quelle grâce nous avons en France de pouvoir bénéficier de cette présence monastique à quelques heures de voiture ! Tant de pays dans le monde en sont privés. Donc n’hésitons pas à aller puiser à la source, dans les racines chrétiennes de l’Europe, des racines extrêmement profondes. La présence monastique est attestée à Ganagobie depuis le Xème siècle !
Voir aussi :
– Retraite en Chartreuse
– Moines et moniales, des évangélisateurs ?
– Vivre dans la présence de Dieu
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