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Une femme tient son front entre ses mains : l'échec du chrétien

Rudyard Kipling disait dans son célèbre poème, « Tu seras un homme mon fils » :
« Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite et recevoir ces deux menteurs d’un même front. »

Les catégories « succès » et « échec » n’ont, comme souvent, pas le même sens pour Dieu et pour nous.

Quand les foules et les apôtres ont contemplé Jésus sur la croix, tous ont interprété cela comme un échec total, la preuve que celui qui était pendu au gibet était un imposteur, un raté.

Mais quand ses apôtres l’ont vu ressuscité et ont vu ses paroles s’accomplir à la Pentecôte, ils ont compris que la victoire était acquise définitivement. Même quand ils ont, plus tard, subi le martyr pour le nom de Jésus, ils ont compris qu’ils étaient les grands vainqueurs.


Jésus n’a jamais dit que les chrétiens réussiraient au sens où le monde parle de succès. Au contraire même, il dit ceci :
« Malheur, lorsque tous les hommes diront du bien de vous. C’est de cette manière, en effet, que leurs pères traitaient les faux prophètes. » (Luc 6, 26)
Et en même temps, Isaïe a écrit cette prophétie au sujet de Jésus :
« Voici que mon serviteur prospérera, il grandira, s’élèvera, sera placé très haut. » (Isaïe 52, 13)

Comment interpréter ces paroles ?

L’« échec » de Jésus n’en est un qu’aux yeux du monde. Aux yeux de Dieu, la croix est le triomphe définitif sur la souffrance et la mort, par la mort de Jésus.

Tolkien, l’auteur du Seigneur des anneaux, parle à ce sujet d’ « eucatastrophe ». Il accole au mot catastrophe la syllabe « eu » qui en grec veut dire « bon ». La fin du Seigneur des Anneaux est une illustration de ce concept.

De même, la venue de Jésus en ce monde, sa mort et sa résurrection, sont le pivot de l’histoire humaine, le moment où l’humanité, qui courait à sa perte est maintenant sauvée par le sang du Christ.

Qu’en est-il pour le chrétien ?

Jésus le dit : « Le serviteur n’est pas plus grand que son maître. S’ils m’ont persécuté,
vous aussi ils vous persécuteront. » (Jean 15, 20)

Donc il est normal que les chrétiens n’entrent pas toujours dans la catégorie du succès à vue humaine.

Bien sûr, quand saint François-Xavier baptise des milliers de personnes en Asie, on y voit immédiatement un succès. Mais que dire des milliers de missionnaires qui sont tout simplement morts en mer sur leur chemin vers le pays où ils devaient aller évangéliser ?
Que dire des parents croyants, priant, rayonnants de la joie du Seigneur, dont les adolescents lâchent toute pratique religieuse ?

Ces apparents échecs sont une épreuve pour la foi, mais ce sont des échecs qui conforment le chrétien à la croix du Seigneur.

Et Jésus nous invite clairement à ne pas imaginer que sur cette terre, les choses sont appelées à s’améliorer. Jésus n’a jamais dit : « Jusqu’à ma venue, malgré des échecs passagers, l’histoire va dans le sens d’un progrès continu. »
Il a dit : « Et il y aura des signes dans le soleil, la lune et les étoiles. Sur la terre, les nations seront dans l’angoisse, inquiètes du fracas de la mer et des flots ; des hommes défailliront de frayeur, dans l’attente de ce qui menace le monde habité, car les puissances des cieux seront ébranlées. Et alors on verra le Fils de l’homme venant dans une nuée avec puissance et grande gloire. Quand cela commencera d’arriver, redressez-vous et relevez la tête, parce que votre délivrance est proche. » (Matthieu 21, 25-28)

Nous savons qu’ultimement, la venue de Jésus dans la gloire signifiera la fin de toute mort et de toute douleur : « Dieu essuiera toute larme de leurs yeux : de mort, il n’y en aura plus ; de pleur, de cri et de peine, il n’y en aura plus, car l’ancien monde s’en est allé. » (Apocalypse 21, 4).

Mais entretemps, nous n’avons aucune idée de ce qui va se passer, car même si Dieu agit dans l’histoire, les hommes restent libres de suivre le bon ou le mauvais chemin. Ils restent libres d’écouter la voix de Dieu ou non. Ils restent libres de s’aimer ou de s’entretuer.

Donc, le chrétien est un veilleur. C’est sur Dieu qu’il doit fixer son regard, et non sur les apparents échecs ou succès. Les uns comme les autres sont passagers. Alors que Dieu ne change pas. Sa promesse est intacte. Sa venue en gloire est certaine.
Écoutons Jésus qui nous dit : « relevez la tête » et prions le pour nous éviter la peur de l’échec comme l’orgueil du succès, ces « deux menteurs ».

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