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Dieu veut nous donner le bonheur, et l’un des grands obstacles à ce bonheur est la jalousie. Je parle de la jalousie qui est dans nos cœurs, et non de la jalousie dont nous sommes victimes de la part des autres — qui peut aussi faire des dégâts dans nos vies, certes.

De quoi pouvons-nous être jaloux(ses) ? De tout et de rien… D’une amie qui sait mieux choisir ses vêtements, d’un frère qui bénéficie davantage de la confiance de nos parents, de celui/celle qui réussit mieux professionnellement, qui semble heureux(se) dans sa vie amoureuse, qui a le nombre d’enfants dont je rêve… De celui/celle qui a toujours les bonnes idées qui nous permettent de réussir nos activités, qui est plus à l’aise en société, qui est plus beau/belle, plus intelligent(e) ou de celui/celle qui semble plus proche de Dieu que moi…

La jalousie du frère aîné qui n'a pas compris combien il est aimé (Rembrandt, Retour du Fils Prodigue)

Quand je vois que ma vie n’est qu’une succession d’échecs, qu’elle est morne, vide, qu’elle est simplement ordinaire alors que je rêve d’une plénitude, ou qu’elle est un paradis perdu d’où j’ai été expulsé(e) depuis longtemps, comment ne pas attarder mes pensées sur tout ce qui manque pour que cette vie cesse d’être vide ou décevante ? Comment ne pas me comparer à ceux qui sont ce que je voudrais être, qui ont ce que je voudrais avoir, qui sont aimés et écoutés alors que je ne le suis pas ?

Et pourtant, c’est ce sentiment de jalousie et d’amertume qui, bien souvent, m’empêche de m’ouvrir au bonheur qui vient de Dieu.

Première chose qui doit être claire : si je manque de bonheur, ce n’est pas une punition, et Dieu ne m’en veut pas quand j’éprouve de la jalousie. Le Seigneur connaît mon cœur, Il connaît ma vie et ma souffrance. Il sait toutes les injustices que j’ai pu subir, la méchanceté, le manque d’amour, les pertes dramatiques. Il connaît aussi ma faiblesse et la mesquinerie que parfois je n’arrive pas à surmonter. Et Il ne me juge pas. Il ne me méprise pas. Dieu a compassion des êtres humains qui sont rongés par la jalousie.

La jalousie est une grande illusion, car elle nous fait envier le chemin de bonheur des autres, au lieu de prendre le chemin de notre propre bonheur qui est un chemin unique. Elle nous fait envier les qualités des autres, au lieu d’exercer nos dons propres, qui sont uniques. Elle nous fait donc désirer ce qui ne peut pas nous rendre heureux, car je ne peux être heureux(se) qu’en étant davantage moi-même, non en cessant d’être moi pour devenir quelqu’un d’autre.

C’est parce qu’Il a compassion de notre vide que Dieu souhaite nous libérer de la jalousie. C’est en cessant d’être jaloux(se) et en apprenant à aimer ce que je suis, que bien des évènements pourront se débloquer dans ma vie, et que mes yeux s’ouvriront pour comprendre le chemin sur lequel Jésus veut m’inviter, pour lequel Il m’a créé(e).

Il y a bien là de quoi être jaloux de ceux qui n’éprouvent pas de jalousie ! Comment pourrais-je m’aimer, avec ma vie minable, comment pourrais-je empêcher ce sentiment d’envie devant ceux qui possèdent ce dont je rêve, qui ont toutes les qualités pour attirer l’amour ou l’admiration ?

Si je me rends compte que je n’y arrive pas moi-même, en fait c’est une bonne nouvelle ! Jésus est venu pour aider les malades et non les bien-portants, Il est venu donner sa vie pour les pécheurs et non pour les justes. Si je me tourne vers Lui avec mon cœur malade et envieux, non seulement mon cœur sera peu à peu libéré, mais en plus j’aurai là l’occasion de devenir beaucoup plus proche de Jésus que si j’avais été parfait(e) !

Par exemple, si je suis célibataire et que je vois autour de moi des couples se former, que je suis invité(e) à bien des mariages qui chaque fois attisent ma souffrance et ma frustration — surtout si l’époux(se) ressemble à l’homme ou la femme de mes rêves — comment éviter de souhaiter la place de l’autre ? Comment penser que la place qui est la mienne est celle qui me conduira à la plénitude du bonheur ?

Pour que Jésus me libère de ce qui obscurcit mon cœur et me conduise sur le chemin de Vie, Il a surtout besoin de ma confiance. D’ailleurs, si je n’y arrive pas, mon seul désir de lui faire confiance suffit. Mon désir d’être sauvé par lui.

Nous pouvons essayer de prédisposer nos cœurs à cette transformation, à accueillir la capacité à nous aimer nous-mêmes, qui nous permettra d’aimer aussi les autres. Mais c’est Jésus qui fera la transformation. Il nous l’a dit : « Hors de moi vous ne pouvez rien faire » (Jn 15, 5).

Essayons alors de nous réjouir du bonheur des autres, et de leur souhaiter plus de bonheur encore ! Cette très belle femme, je vais essayer de me réjouir de sa beauté, je vais essayer me réjouir pour elle et pour son mari qui la voit chaque jour ! Cette personne qui assume des responsabilités que je ne pourrais pas porter, je vais essayer de me réjouir pour tout ce qu’elle accomplit et qui contribue au bien de la société, ou de son entreprise, ou de ma communauté ! En cessant de leur en vouloir, mes yeux pourront aussi s’ouvrir sur les épreuves et les souffrances que portent ceux dont j’envie la place. En plus d’éprouver de la joie pour leur bonheur, je pourrai aussi éprouver de la compassion.

Je vais essayer, en tous cas, de disposer mon cœur ainsi. J’y parviendrai peut-être parfois, avec l’aide de Jésus. Mais c’est lui seul qui, peu à peu, va transformer et libérer mon cœur.

Cela prendra peut-être beaucoup de temps, mais c’est un chemin de vie et de bonheur sur lequel je vais ainsi m’engager. Et Jésus va tressaillir de joie en voyant que je lui ouvre la porte pour qu’Il puisse me faire connaître l’amour dont Il m’aime, et qu’Il puisse à travers moi faire découvrir au monde les facettes uniques de sa beauté et de sa bonté qu’Il a déposées en moi.

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