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L’Église catholique condamne-t-elle la masturbation et pourquoi ?

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  1. Pelostome

    Bonsoir,

    j’ai l’impression diffuse que ma réponse du 14 février dernier n’a pas été prise en compte par le site ; entretemps, j’ai continué ma réflexion, aussi je vais tâcher d’affiner mon propos.

    Tout d’abord, je suis conscient que vous animez ce site bénévolement ; ce fonctionnement, incluant le laps de temps dans vos réponses, est pour moi une école de patience bénéfique qui m’invite à me décentrer ; c’est bien.

    Vous dites également que l’amour n’est pas linéaire vers le haut ou vers le bas ; j’en suis conscient aussi. C’est la raison pour laquelle j’ai indiqué que je force le trait, je schématise pour mieux me faire comprendre.

    Concernant votre réponse en trois points, le premier semble indiquer que je n’ai pas trop mal visé : à première vue, je suis d’accord avec l’Église sur un sujet essentiel. Toutefois, le second point nous invite à relativiser.

    Pour étayer mon point de vue, je m’appuierai sur un sujet malheureusement trop fréquent : les violences conjugales. En lisant votre premier point, on peut considérer que l’Église condamne sans équivoque ces crimes. Mais si on considère le second, affirmer avec force que dans toute relation maritale, il peut y avoir de la place pour le pardon, cela peut encourager des femmes en danger à pardonner à leur conjoint et à rester à ses côtés ; la plupart du temps, un mari violent va en effet demander pardon avec force et des accents qui semblent parfaitement sincères. Il n’empêche que statistiquement, il ne va pas changer d’attitude et recommencera à être violent. L’Église pourrait ainsi porter la responsabilité de féminicides.

    Si la femme victime de violences conjugales trouve la force de quitter son mari violent, et par chance, réussit à se reconstruire dans une nouvelle relation amoureuse auprès d’un compagnon qui la respecte, elle ne pourra jamais se marier puisque sa première union est indissoluble. En fait, aux yeux de l’Église, elle n’a qu’une alternative : retourner auprès de son mari violent ou renoncer éternellement à l’amour charnel.

    Voilà un exemple de ce que je souhaite exprimer quand je dis : « Entre un amour sans mariage et un mariage sans amour, l’Église choisira toujours le mariage ».

    Il s’agit bien sûr d’un cas extrême, mais vous conviendrez avec moi d’une part, qu’il ne s’agit pas d’une vue de l’esprit mais de situations malheureusement fréquentes ; d’autre part, que les dispositions de l’Église ne permettent pas de se soustraire à cette double peine : d’abord, la violence, puis l’interdiction de plaisir.

    Enfin, même si nous considérons que la proportion des unions où règne la violence n’est pas aussi élevée que celle des couples aimants, le troisième point de votre réponse reste particulièrement significatif. Vous dites bien que le mariage chrétien est une proposition et non une obligation, ce qui apparaît à première vue comme la preuve de la grandeur d’âme de l’Église. Vous insistez sur le fait que l’Église n’a aucun mépris pour les couples non mariés – dont nombre d’entre eux font baptiser leurs enfants, sont plus assidus à la messe que des couples mariés devant Dieu, s’engagent dans leur paroisse, au catéchisme… mais en même temps, vous énoncez qu’« ils ne choisissent pas le christianisme » ; ce qui revient à dire qu’ils ne sont pas dignes d’être appelés Chrétiens.

    Nous n’arrivons pas à en sortir : in fine, l’Église choisit toujours le mariage.

    • Cat-modératrice

      Bonjour Pelostome,

      Encore désolée pour les bugs du site qui ont empêché la publication de vos commentaire. Heureusement que vous m’avez contactée pour me le dire.

      Vous dites :

      Si vous le permettez, je regretterai surtout que les « élèves » de cette école de l’amour ne disposent que d’un bagage extrêmement mince. Certes, il y a la préparation au mariage et les Équipes Notre-Dame. Mais à mon sens, c’est au collège et au lycée que des cours de relations interpersonnelles devraient être institués. Là encore, il y a quelques heures d’éducation sexuelle, qui aborde bien heureusement les questions du respect et du consentement (il était temps) ; mais le décryptage des mécanismes de sentiments, de défense, de repli sur soi, d’ouverture à l’autre, Carl Rodgers, Roman Jakobson, John Gray… sont encore loin d’être au programme de l’école de la République. Le sont-ils seulement dans les établissements scolaires catholiques ?

      C’est vrai, la plupart des gens, chrétiens ou non, sont très mal préparés à vivre les relations conjugales et à apprendre l’amour. Je ne sais pas de quelle manière il faudrait procéder. Normalement les parents ont un grand rôle à jouer, mais il peuvent eux-mêmes avoir des problèmes de couple, ou n’être pas à l’aise pour parler du sujet avec leurs enfants. Je pense qu’il faudrait beaucoup plus faire connaître le travail des conseillers conjugaux. Des cours sur la psychologie des relations au lycée, cela risque de passer au-dessus de leur tête (ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut pas en faire). Mais quand on est dans la crise et que l’on n’attend pas qu’il soit trop tard, un conseiller conjugal peut aider à comprendre les mécanismes que l’on est en train de vivre.

      Vous dites :

      De plus, nous apprenons beaucoup de nos erreurs ; or les erreurs d’un couple peuvent entraîner une séparation, un divorce qui, bien analysé, peut servir de base de réflexion solide pour se remettre en question et réussir une seconde union. Sauf que pour l’Église, dans ce domaine, le chrétien n’a pas droit à l’erreur puisqu’une nouvelle union est obligatoirement considérée adultère. Une école de laquelle on est exclu quand on échoue au premier examen est une bien piètre école.

      Idéalement, les erreurs d’un couple devraient servir de base de réflexion solide pour se remettre en question et apprendre à réussir le même couple… Mais c’est vrai, la réalité est très souvent différente.

      D’une part, il ne faut pas oublier que le mariage peut ne pas être valide. Par exemple, un mariage où l’un des membres du couple a l’intention, dès le départ, de faire des infidélités à son conjoint quand il en aura envie le jour venu, n’est pas un mariage valide aux yeux de Dieu (c’est-à-dire qu’il n’y a pas eu de mariage, en réalité), et peut être reconnu comme invalide par l’Église. L’Église n’annule jamais des mariages, mais elle reconnaît leur nullité. Le pape François a facilité les démarches pour la reconnaissance de nullité, et il a rendu la procédure entièrement gratuite. Un mariage avec une personne violente n’est pas valide non plus, car la personne violente n’était pas en état de s’engager dans le mariage, etc.

      D’autre part, le mariage qui est un échec peut être effectivement valide, et cela peut être extrêmement difficile de ne pas pouvoir se remarier dans l’Église. Attention, je ne veux pas dire que le catholique qui se remarie est désormais hors de l’Église. Je dis qu’il ne peut pas se remarier dans l’Église : son deuxième mariage civil n’est pas reconnu, et l’Église considère que les divorcés remariés dont le premier mariage était valide, vivent en couple sans être mariés. C’est vrai, cette loi peut être difficile à accepter. Les disciples de Jésus ont eux-mêmes eu une réaction de révolte quand il a donné cette loi :

      Jésus leur répond : « C’est en raison de la dureté de votre cœur que Moïse vous a permis de renvoyer vos femmes. Mais au commencement, il n’en était pas ainsi.

      Or je vous le dis : si quelqu’un renvoie sa femme – sauf en cas d’union illégitime – et qu’il en épouse une autre, il est adultère. »

      Ses disciples lui disent : « Si telle est la situation de l’homme par rapport à sa femme, mieux vaut ne pas se marier. »

      (Matthieu 19, 8-10)

      Dieu veut nous faire aller plus loin dans l’amour. Un amour absolument inconditionnel pour son conjoint est à la fois un signe de la fidélité de Dieu, et un vrai chemin d’amour. Si on permettait le divorce, les conjoints se sépareraient beaucoup plus facilement, même quand il aurait été possible de sauver le couple. Mais il est vrai qu’il est difficile de supporter la situation de personnes divorcées depuis des années, qui ne sont pas forcément responsables de l’échec de leur couple ou du départ de leur conjoint, et qui ne peuvent plus fonder un nouveau foyer en accord avec l’Église. Tout ce que je sais, c’est que Jésus lui-même a proclamé l’indissolubilité du mariage. Dans un autre passage, il dit bien que les femmes ne peuvent pas non plus renvoyer leur mari, et il dit que ceux qui ont été renvoyés par leur conjoints sont eux aussi coupables d’adultère quand ils se remarient.

      Vous dites :

      Vous insistez sur le fait que l’Église n’a aucun mépris pour les couples non mariés – dont nombre d’entre eux font baptiser leurs enfants, sont plus assidus à la messe que des couples mariés devant Dieu, s’engagent dans leur paroisse, au catéchisme… tout en énonçant qu’« ils ne choisissent pas le christianisme » ; ce qui revient à dire qu’ils ne sont pas dignes d’être appelés Chrétiens.

      Pourquoi parlez-vous de dignité ? Jésus propose un chemin, certains l’acceptent, certains le refusent, ce n’est pas une question de dignité. De très grands pécheurs ont choisi de suivre Jésus, et ils étaient conscients d’être indignes.

      Le christianisme est la proposition d’une alliance avec Dieu, et l’une des façons dont se vit cette alliance est en vivant aussi une alliance indissoluble dans le mariage. Ceux qui ne veulent pas vivre ainsi refusent quelque chose qui est au cœur du christianisme. Ce n’est pas qu’il ne sont pas digne, c’est qu’il ne veulent pas vivre ce que propose le christianisme.

      Cependant, des personnes en couple sans être mariées peuvent être chrétiennes et aller à la messe – mais on leur demande de ne pas communier. Bien d’autres chrétiens ne sont pas sensés communier. Il m’est arrivé à moi-même de ne pas aller communier parce que j’avais commis un péché qui m’éloignait de Jésus, et que je ne m’étais pas encore confessée.

      Vous dites :

      C’est exactement ce que je voulais signifier. Pour être plus précis, nous pouvons considérer que l’Église a une idée très arrêtée de ce qu’est l’amour humain : elle se drape dans sa bienveillance en clamant à qui veut l’entendre que chacun est libre ; elle propose un chemin sans l’imposer, d’accord… mais elle ne veut pas entendre la voix de quelqu’un qui a choisi un autre chemin. Elle ne veut pas savoir si un amour humain cheminant hors de son sentier peut se révéler d’une qualité aussi élevée – voire plus – que celle du mariage chrétien. C’est principalement cela que je voulais pointer.

      Comme je vous l’ai dit, l’alliance dans le mariage est au cœur même du christianisme. Saint Paul dit que c’est un mystère semblable au mystère de l’alliance de Jésus avec l’Église. Alors quand vous dites « elle ne veut pas entendre la voix de quelqu’un qui a choisi un autre chemin », c’est comme si vous disiez « elle ne veut pas entendre la voix de celui qui lui dit que le sauveur ne s’appelle pas Jésus mais Jean-Jacques », vous lui demandez de renier ce qui est son cœur. Bien sûr qu’il peut y avoir des amours de grande qualité en dehors du mariage, mais Jésus propose le mariage à ceux qui le suivent. Et oui, l’Église considère qu’un mariage avec engagement d’un conjoint envers l’autre permet un amour plus vrai qu’une vie de couple sans engagement. Ce qui n’empêche pas le fait que certains mariages dans l’Église sont vécus avec moins d’amour que ce qui est vécu dans certains couples non mariés. Mais cela n’est pas une objection au fait que vivre l’amour dans le mariage aide à vivre un plus grand amour.

      Vous dites :

      Pour étayer mon point de vue, je m’appuierai sur un sujet malheureusement trop fréquent : les violences conjugales. En lisant votre premier point, on peut considérer que l’Église condamne sans équivoque ces crimes. Mais si on considère le second, affirmer avec force que dans toute relation maritale, il peut y avoir de la place pour le pardon, cela peut encourager des femmes en danger à pardonner à leur conjoint et à rester à ses côtés ; la plupart du temps, un mari violent va en effet demander pardon avec force et des accents qui semblent parfaitement sincères. Il n’empêche que statistiquement, il ne va pas changer d’attitude et recommencera à être violent. L’Église pourrait ainsi porter la responsabilité de féminicides.

      L’Église n’encourage absolument pas les victimes de violence (femmes ou hommes) à rester avec leur conjoint. L’Église ne permet pas le remariage, mais elle permet la séparation. Et, très souvent, les mariages avec un conjoint violent ne sont pas des mariages valides, car le conjoint n’avait pas la santé psychique ou la maturité nécessaire pour vivre un tel engagement. Une femme battue qui demande conseil à un prêtre sera incitée à quitter son mari, et si le prêtre ne lui donnait pas ce conseil, c’est qu’il ne serait pas équilibré lui-même. Je crois que dans un message précédent, j’avais parlé des cas où il y a un grave manque de respect dans le couple. On ne doit pas laisser notre conjoint nous détruire.

      Vous dites :

      Si la femme victime de violences conjugales trouve la force de quitter son mari violent, et par chance, réussit à se reconstruire dans une nouvelle relation amoureuse auprès d’un compagnon qui la respecte, elle ne pourra jamais se marier puisque sa première union est indissoluble. En fait, aux yeux de l’Église, elle n’a qu’une alternative : retourner auprès de son mari violent ou renoncer éternellement à l’amour charnel.

      Comme je viens de l’écrire, il est rare qu’un mariage où il y a une situation de violence soit un mariage valide. Mais cela pourrait arriver, par exemple si le conjoint violent l’était devenu bien après le mariage, suite à des événements traumatisants qui l’auraient brisés. Dans ce cas, en effet, l’Église demande à la personne séparée de renoncer à une nouvelle union. D’être fidèle à son conjoint sans vivre avec lui. Si cette personne se remarie quand même, elle n’est pas exclue de l’Église pour autant.

      Vous dites :

      Nous n’arrivons pas à en sortir : in fine, l’Église choisit toujours le mariage.

      Pourquoi dites-vous « in fine » ? l’Église demande de vivre l’amour entre homme et femme dans le mariage. Nous sommes d’accord là-dessus depuis le début. Ce n’est pas « in fine », c’est un élément qui est au cœur de l’Église, de la Bible et du christianisme. Vous dites que nous n’arrivons pas à en sortir, mais il n’est pas question d’en sortir.

      • Pelostome

        Bonsoir,

        c’est décidément très difficile d’arriver à nous comprendre. Lorsque j’écris « In fine, l’Église choisit toujours le mariage », c’est pour éviter une répétition qui me semblait trop lourde : « Entre un amour sans mariage et un mariage sans amour, l’Église choisira toujours le mariage ».

        Concernant votre profession et l’aide qu’elle apporte aux couples, je suis bien d’accord ; je rêve qu’un jour tous les couples fassent naturellement un bilan par an avec un conseiller conjugal, complété par un week-end prolongé pour se retrouver en amoureux sans famille ni enfants, le tout remboursé par les allocations familiales, car ça pourrait économiser bien des divorces… Bon, je reviens à des choses plus terre-à-terre.

        Vers la fin de votre réponse, vous évoquez l’échange que nous avons eu il y a quelque temps au sujet des situations où un conjoint ne respecte pas son conjoint ; vous avez convenu qu’il s’agit d’un péché grave, mais sans remettre en cause le mariage lui-même. J’ai alors forcé le trait en évoquant les violences conjugales, et en mettant en avant la notion de pardon qui peut pousser une victime de violences à se mettre en danger en refusant de quitter son conjoint violent. Le fait que vous m’indiquiez qu’un prêtre ne peut qu’encourager une victime à quitter un conjoint violent, et que l’inverse dénoterait un sérieux problème, est un signe encourageant, d’autant plus lorsque vous soulignez que dans la majorité des cas, le mariage peut être déclaré nul, et que les procédures concernant la reconnaissance en nullité ont été simplifiées et sont maintenant gratuites. Le chemin sera certainement encore très long jusqu’à ce que ces démarches deviennent relativement courantes, mais le mouvement est initié.

        Notons cependant que pour en arriver à cette conclusion, il a fallu que j’invoque un cas extrême avec mise en danger de la personne. Lorsqu’il n’y a pas violence au sens strict mais non-respect du conjoint, il est vrai que c’est plus compliqué puisque vous notez que l’amour n’est pas linéaire et qu’une situation peut se détériorer ou s’améliorer au fil du temps ; mais cela signifie quand même qu’il peut y avoir une vraie souffrance, et que l’Église va quasiment systématiquement conseiller de supporter cette souffrance, voire de la sublimer en l’« offrant à Dieu ». Drôle d’offrande.

        Alors oui, la réaction épidermique des amis de Jésus : « À ce compte-là, mieux vaut ne pas se marier ! » résonne particulièrement à nos oreilles, cela d’autant plus que Jésus, qui affirme par ailleurs que pas un iota de la loi de Moïse ne sera aboli, prend ses distances avec cette même loi en lui opposant le texte de la Genèse qui est un poème d’amour ! Est-ce qu’on imaginerait qu’un homme politique s’oppose au Code Civil en s’appuyant sur Victor Hugo ?

        J’ai eu la chance de connaître un prêtre qui disait : « L’amour est comme une toile de maître, dont le mariage est le cadre. L’important, c’est la toile ; mais quand on possède une toile de maître, on a envie de la mettre en valeur avec un beau cadre ».

        Je trouve cela très juste, et ça s’approche de ce que vous exprimez sur le mariage ; il est vrai que par l’engagement, il peut faire grandir l’amour vers quelque chose de très beau (même s’il faudrait toujours garder à l’esprit que l’ensemble des contraintes posées par l’Église peut produire l’effet inverse). Mais ça ne me satisfait pas pleinement.

        D’après ce que j’ai compris de l’enseignement de l’Église, parmi les sept sacrements, ce n’est pas le baptême mais l’Eucharistie qui est central ; cela dit, on ne communie pas si on n’est pas baptisé.

        A bien y réfléchir, un enfant chrétien baptisé peut progresser dans la foi jusqu’à faire sa première communion, et communier ensuite tous les dimanches… jusqu’à ce que, adolescent, il découvre l’orgasme, qui est une sensation absolument incroyable de bien-être. L’intensité de cette expérience est telle qu’il semble tout à fait naturel de la rechercher à nouveau, soit par la masturbation, comme largement répandu dans la nature, soit par une relation de couple qui peut ouvrir sur un amour sincère. Mais dans les deux cas, le chrétien se voit tenu de régresser en se cantonnant à la communion spirituelle et non sacramentelle ; cette dernière constituant le centre de la vie chrétienne, la découverte de l’amour charnel replace le chrétien dans la position d’un bébé non baptisé – jusqu’à ce qu’il soit marié.

        Votre discours est en cela très intéressant car il reflète fidèlement la position de l’Église : le mariage nous est présenté comme un très beau cadre qui apporte une valeur ajoutée à la toile de l’amour. Et bien sûr, il s’agit d’une proposition, en toute liberté, il n’y a absolument rien d’imposé… sauf que vous exprimez que ceux qui ne choisissent pas le mariage ne choisissent pas le christianisme.

        Je n’ai sans doute pas été assez précis en écrivant que les couples non mariés n’étaient, aux yeux de l’Église, « pas dignes d’être chrétiens ». En fait, lorsque vous écrivez : « les couples non mariés ne choisissent pas le christianisme », ça signifie ni plus ni moins qu’ils ne sont PAS chrétiens.

        Je ne sais pas si vous avez pris conscience de cela en me répondant, toujours est-il que vous avez reformulé d’une manière plus subtile : ils « refusent quelque chose qui est au cœur du christianisme ». De fait, les couples chrétiens non mariés sont accueillis avec bienveillance, mais pour se conformer à la règle de l’Église, celle-ci attend d’eux qu’ils s’abstiennent d’eux-mêmes de communier sacramentellement. Et pour accéder à la communion sacramentelle selon les règles de l’Église, la confession ne suffit pas : il faut expressément qu’ils soient mariés. Alors, excusez-moi, mais la proposition du mariage absolument pas imposée, elle me reste un peu en travers de la gorge.

        Et pourtant, la toile de maître, c’est l’amour, pas le mariage. C’est l’amour qui est au cœur de la chrétienté, pas le mariage. Si l’on prend un peu de recul au regard de l’histoire, on voit bien que le mariage est, au départ, une disposition contractuelle sous-tendant le patriarcat et antérieur au christianisme comme au judaïsme. Il est vrai que son cadre peut renforcer l’amour – tout comme il peut contribuer à l’éroder. A mon sens, il constitue un moyen parmi d’autres de faire grandir l’amour. En le choisissant comme moyen exclusif sans chercher à écouter le témoignage des amoureux qui peuvent avoir choisi d’autres voies pour cultiver leur amour, l’Église, il me semble, manque d’humilité.

        • Cat-modératrice

          Bonjour Pelostome,

          Vous avez voulu reparler de : « Entre un amour sans mariage et un mariage sans amour, l’Église choisira toujours le mariage »

          Pour l’Église, le mariage est au service de l’amour. À condition que l’on parle du vrai amour, celui qui respecte l’autre, qui a un regard positif sur l’autre, qui désire être proche de l’autre et qui veut toujours rester aux côté de l’autre. À ceux qui sont en couple sans être mariés et qui s’aiment (dans le cas où c’est un vrai amour respectueux de l’autre), l’Église dirait : « Votre amour est quelque chose de merveilleux, mais si vous voulez suivre le chemin de Jésus, mariez-vous. Votre amour l’un pour l’autre sera plus vrai et plus grand si vous vous engagez l’un envers l’autre pour toujours. » À ceux qui sont mariés mais qui ne s’aiment pas, l’Église dirait : votre mariage doit être au service de votre amour. Si vous voulez suivre le chemin de Jésus, apprenez à vous aimer et à vous respecter. Et si l’amour est absent depuis le début de votre mariage, vous feriez bien de vérifier si votre mariage est valide. »

          Vous écrivez : « Lorsqu’il n’y a pas violence au sens strict mais non-respect du conjoint, il est vrai que c’est plus compliqué puisque vous notez que l’amour n’est pas linéaire et qu’une situation peut se détériorer ou s’améliorer au fil du temps ; mais cela signifie quand même qu’il peut y avoir une vraie souffrance, et que l’Église va quasiment systématiquement conseiller de supporter cette souffrance, voire de la sublimer en l’« offrant à Dieu ». Drôle d’offrande. »

          Ce que vous écrivez peut correspondre à de nombreuses situations différentes. Il existe de nombreux mariages invalides sans violence. Par ailleurs, une personne qui souffre trop dans son couple peut se séparer, même s’il n’y a pas de violence. Mais si le mariage est valide, l’enseignement de Jésus demande de ne pas se remarier. Il peut y avoir une vraie souffrance aussi dans un couple qui traverse une crise. La souffrance n’est pas le signal immédiat qu’un couple est mauvais pour les membres du couples ou pour l’un des deux. Des couples qui ont traversé des crises, qui les ont dépassées, qui s’aiment vraiment, et qui sont heureux, il y en a beaucoup.

          Vous écrivez : « Alors oui, la réaction épidermique des amis de Jésus : « À ce compte-là, mieux vaut ne pas se marier ! » résonne particulièrement à nos oreilles, cela d’autant plus que Jésus, qui affirme par ailleurs que pas un iota de la loi de Moïse ne sera aboli, prend ses distances avec cette même loi en lui opposant le texte de la Genèse qui est un poème d’amour ! Est-ce qu’on imaginerait qu’un homme politique s’oppose au Code Civil en s’appuyant sur Victor Hugo ? »

          Jésus a dit : « Je ne suis pas venu abolir la loi, mais l’accomplir. » Dans cette optique, il a modifié de nombreux points de la loi pour la faire arriver à son but. Par exemple : « Vous avez entendu qu’il a été dit : Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi. Eh bien ! moi je vous dis : Aimez vos ennemis, et priez pour vos persécuteurs. » (Mt 5, 43-44).

          Le texte de la Genèse est bien plus qu’un poème, c’est un texte théologique, d’où découle par exemple l’interdiction du travail le jour du Sabbat qui est fondamentale dans le judaïsme – l’interdiction, plus légère, du travail le dimanche étant très importante aussi. C’est là qu’il est écrit aussi que l’être humain a été créé à l’image de Dieu, élément fondamental des théologies juives et chrétiennes.

          Vous écrivez : « J’ai eu la chance de connaître un prêtre qui disait : « L’amour est comme une toile de maître, dont le mariage est le cadre. L’important, c’est la toile ; mais quand on possède une toile de maître, on a envie de la mettre en valeur avec un beau cadre ». »

          Le mariage est plus qu’un cadre. C’est à travers le mariage que le don de soi à son conjoint peut-être total. Et le mariage est un sacrement à travers lequel Dieu se donne au couple d’une manière spéciale, d’autant plus que l’union de l’homme et de la femme dans le mariage est semblable à l’union entre Jésus et l’Église, et à l’union des trois personnes divines au sein de la Trinité.

          Vous écrivez : « Mais dans les deux cas, le chrétien se voit tenu de régresser en se cantonnant à la communion spirituelle et non sacramentelle ; cette dernière constituant le centre de la vie chrétienne, la découverte de l’amour charnel replace le chrétien dans la position d’un bébé non baptisé – jusqu’à ce qu’il soit marié. »

          La communion spirituelle est une communion aussi vraie que la communion matérielle. Celui qui est uni à Jésus communiera à lui aussi profondément spirituellement ou matériellement. Celui qui est coupé de Jésus ne communiera à lui ni spirituellement ni en mangeant l’hostie. L’Église demande aux personnes qui sont dans des situations qui les coupent de Jésus de ne pas communier matériellement. La possibilité de la communion spirituelle existe parce que l’Église sait que son jugement ne peut être extérieur, elle ne peut pas vraiment savoir quelle est la relation des personnes avec Jésus. Cette interdiction de communier pour les personnes qui ont choisi d’être dans une situation en opposition à la volonté de Jésus dans un domaine grave est à la fois un attitude de respect vis-à-vis de Jésus dans le sacrement, et une nécessité pour la personne elle-même. Saint Paul met en garde contre le fait de communier quand on n’est pas en état spirituel de le faire, il estime qu’il y a un grand danger spirituel.

          Cette raison de s’abstenir de communier n’a rien à voir avec la raison pour laquelle un enfant s’abstient de communier. D’ailleurs, les personnes s’abstenant de communier devraient être beaucoup plus nombreuses, beaucoup de personnes communient alors qu’elle ont commis un péché grave, qui peut n’avoir aucun rapport avec la sexualité. Par exemple, quelqu’un qui a calomnié quelqu’un d’autre devrait s’abstenir de communier tant qu’il n’a pas regretté sincèrement ce qu’il a fait et ne s’est pas confessé – et son confesseur lui demandera de réparer, dans la mesure du possible, le mal qu’il a fait.

          Vous écrivez : « De fait, les couples chrétiens non mariés sont accueillis avec bienveillance, mais pour se conformer à la règle de l’Église, celle-ci attend d’eux qu’ils s’abstiennent d’eux-mêmes de communier sacramentellement. Et pour accéder à la communion sacramentelle selon les règles de l’Église, la confession ne suffit pas : il faut expressément qu’ils soient mariés. Alors, excusez-moi, mais la proposition du mariage absolument pas imposée, elle me reste un peu en travers de la gorge. »

          Si je vous disais : « Personne n’est obligé de croire en Jésus, mais pour être chrétien il faut croire en Jésus. », est-que vous trouveriez aussi mon exigence inacceptable ? Oui, même en vivant en couple sans être mariés il est possible d’être membre de l’Église, mais sans communier. Pour un chrétien, avoir des relations sexuelles en dehors du mariage est un péché grave, car cela s’oppose à la volonté de Jésus sur un point fondamental. Si l’Église cessait de le considérer comme fondamental, il s’agirait d’une autre religion. Je crois que nous avons déjà l’un et l’autre répété plusieurs fois notre point de vue sur ce point.

          Vous dites : « En choisissant le mariage comme moyen exclusif sans chercher à écouter le témoignage des amoureux qui peuvent avoir choisi d’autres voies pour cultiver leur amour, l’Église, il me semble, manque d’humilité. »

          J’ai l’impression que nous répétons les mêmes arguments. Je vous renvoie à mes réponses précédentes.

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