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« De toutes les nations faites des disciples » : le défi de l’évangélisation mondiale

Temps de lecture estimé : 8 min

Alors que les JMJ de Rio sont maintenant terminées, nous constatons que le pape François marche résolument dans les pas de ses prédécesseurs, dans un effort constant pour remettre l’Église dans une dynamique missionnaire.

En cela, il suit la parole de Jésus, parole finale de l’Évangile selon Matthieu, parole retenue par le pape Benoît XVI comme thème de ces JMJ. Cette parole donne l’ordre à ses apôtres de faire des disciples dans TOUTES les nations, et non seulement dans celles qui présentent un terrain favorable.

Un prêtre missionnaire et un évêque africain

L’évangélisation est, selon le pape Paul VI dans l’encyclique de 1975 Evangelii Nuntiandi, §14, « la grâce et la vocation propre de l’Église, son identité la plus profonde. Elle existe pour évangéliser. »

En 1990, dans l’encyclique Redemptoris Missio, §3, Jean-Paul II écrit : « J’estime que le moment est venu d’engager toutes les forces ecclésiales dans la Nouvelle évangélisation et dans la mission ad gentes. » La mission dite ad gentes est la première évangélisation dans des pays qui n’ont pas connu l’évangélisation des premiers siècles, ni l’arrivée massive d’européens chrétiens. Ce type de mission ne concerne donc pas l’Europe, ni l’Amérique, ni les communautés chrétiennes antiques du Moyen-Orient, d’Éthiopie et d’Inde, elle concerne le reste du monde.

À notre époque, il est possible d’esquisser une vision mondiale de la croyance ou de l’incroyance dans le monde, selon de grandes aires géographiques, et d’essayer de déterminer quelles sont les nouvelles frontières de l’évangélisation.

Pour avoir une idée de la répartition des grandes aires religieuses au niveau mondial, il serait bon de garder ouvert au cours de la lecture de cet article la très bonne « Carte mondiale des religions », (« Atlas des religions », Brigitte Dumortier, cartographie de Cécile Marin, Éditions Autrement, Paris, 2002).

Pour garder une certaine concision, je traite des groupes de pays rassemblant des caractéristiques communes ou bien des pays présentant des caractéristiques particulières.

I. Les régions ouvertes ou semi-ouvertes à l’évangélisation

Je traite ici des régions où la liberté religieuse est un droit officiellement reconnu et effectivement pratiqué, même si elle n’est pas totale.

A. Les pays « chrétiens » en voie de déchristianisation

En Europe et en Amérique, le christianisme a été la matrice de la vie individuelle et de la vie en société depuis des siècles. Selon les pays, le nombre de catholiques est élevé ou faible, mais il baisse pratiquement partout.

Jean-Paul II, en 1979, a lancé l’idée d’une « Nouvelle évangélisation » à propos de ces continents. En effet, ces pays qui voient progressivement le christianisme disparaître du champ inpiduel et social restent globalement ouverts à une annonce qui « demande une nouvelle ardeur, de nouvelles méthodes et un nouveau langage pour l’annonce et le témoignage évangéliques. » (Exhortation apostolique de Jean-Paul II Pastores Dabo Vobis, 1992).

Dans ces pays, la tâche de l’évangélisation est encore possible et légale, mais parfois très difficile dans certains lieux où la foi chrétienne et ses valeurs sont de plus en plus ouvertement combattus, comme en France, l’un des pays les plus athées du monde.

Les « missionnaires » sont surtout le petit nombre de catholiques convaincus restant. Le plus souvent, ils sont issus de familles très chrétiennes ou ont vécu une conversion personnelle puissante.

Cuba constitue une exception. Après des années de persécution par le communisme athée, un semblant de liberté religieuse est maintenant concédé, et l’œuvre d’évangélisation peut enfin reprendre.

B. L’Afrique noire, une région majoritairement animiste

En Afrique noire, l’islam est dominant sur la frange sud du Sahara et sur la côte de l’Océan indien. Hors de ces zones, les Africains noirs sont animistes ou n’ont reçus qu’un vernis chrétien superficiel. En effet, même musulmans ou chrétiens, les habitants de cette région continuent de pratiquer le culte des ancêtres, souvent de manière privée. On peut cependant espérer que le christianisme finira par s’ancrer de plus en plus dans la culture, même si ce processus peut prendre des siècles, comme en Europe.

L’Afrique noire reste donc une nouvelle frontière de l’évangélisation, évangélisation commencée au XIXe siècle (sauf en Éthiopie). Le travail à accomplir reste gigantesque.

Les missionnaires sont souvent des prêtres et religieuses d’ordres spécialisés venant d’autres continents. Les catholiques africains eux-mêmes mettent un zèle ardent à évangéliser leur continent, souvent très courageusement comme on le voit au Nigeria.

C. L’Asie

1. La Chine

Paradoxalement, la Chine, officiellement communiste, marquée par la triple influence confucianiste, taoïstes et bouddhiste, offre un espace à l’évangélisation. Certes, cette évangélisation est plus ou moins clandestine, et limitée par le régime. Aucune statistique n’est disponible, mais beaucoup de témoignages font état de conversions en nombre.

On peut donc, avec beaucoup de précautions, classer la Chine dans les régions où l’évangélisation est prometteuse.

2. Des cas particuliers : les Philippines, la Corée du sud et le Vietnam

Les Philippines ont très bien reçues l’Évangile depuis que les premiers missionnaires sont arrivées, au point que le catholicisme y est majoritaire. Comme toujours dans les pays chrétiens, l’évangélisation est une tâche toujours à reprendre.

La Corée du sud est un des lieux où le christianisme, tant catholique que protestant, progresse le plus dans le monde. Il est la religion « à la mode », la religion « moderne » face au confucianisme en perte de vitesse, vu comme une simple religion sociale visant à maintenir des conventions oppressantes.

Le Vietnam est officiellement une dictature communiste. Les chrétiens y représentent entre 10 et 20% de la population, et ils sont extrêmement déterminés face aux persécutions du régime, tantôt dures, tantôt mises en sourdine. Il est difficile de savoir quelle est la progression du christianisme dans ce pays. En dehors du christianisme, le Vietnam est un pays partagé entre bouddhisme et religions chinoises. Cependant, les croyances au Vietnam ne peuvent être évaluées de manière satisfaisante, car les statistiques religieuses sont faussées ou inaccessibles.

II. Les régions fermées ou semi-fermées à l’évangélisation

Ici, je traite de régions de deux types. La première catégorie est celle où la liberté religieuse est soit absente, soit restreinte. La deuxième est celle des régions où des tentatives d’évangélisation ont eu lieu, mais où la force et l’ancienneté des croyances ou religions présentes a empêché et empêche toujours une croissance réelle de l’Église.

A. Les régions ou pays hostiles à la liberté religieuse

Depuis sa fondation au VIIe siècle, l’islam a presque toujours été opposé au christianisme.

L’islam domine en Afrique du nord et de l’est, dans une grande partie du Sahel, dans la péninsule arabique, dans l’aire culturelle turque, en Iran, au Pakistan, au Bangladesh et en Indonésie. De fortes minorités existent en Europe.

Deux hadiths (paroles de Mahomet) rapportent : « Celui qui change de religion, tuez-le. » Ce précepte, qui concerne le musulman qui quitte l’islam, est rarement appliqué à la lettre. Plus souvent, il est appliqué sous forme de « mort sociale », c’est-à-dire d’exclusion totale de la famille ou de la communauté. Dans certains pays, l’abandon de l’islam est puni par la loi. Il existe également des groupes qui s’en prennent violemment aux non musulmans par des attentats ou des vexations perses, les poussant à s’exiler.

Il est donc impossible de mener une évangélisation ouverte dans ces pays. Les rares chrétiens peuvent y porter un témoignage par leur présence, comme les 15 millions de coptes d’Égypte. La cohabitation est harmonieuse entre chrétiens et musulmans dans quelques régions, comme le Sahel (à l’exclusion du Nigeria) ou certains pays de l’est de l’Afrique.

Un cas tout-à-fait particulier : la Corée du Nord partage avec l’Arabie saoudite le triste privilège d’être un pays ou il n’y a tout simplement aucune liberté religieuse. En Corée du Nord, ceux qui ont l’audace de se déclarer croyants sont expédiés dans des camps de concentration ou fusillés.

B. Les régions dominées par d’autres systèmes de croyance puissants et anciens

1. L’Inde

Le berceau religieux de l’Asie est depuis plus de 3000 ans un creuset de milliers de croyances qui l’ont profondément façonné. L’hindouisme a la faculté d’absorber tout ce qui entre en contact avec lui. En Inde, l’Évangile n’a pu pénétrer qu’à la marge, que ce soit par la toute première évangélisation, menée officiellement par l’apôtre saint Thomas, ou par les missionnaires qui ont suivi les grands découvreurs. Aujourd’hui, la situation n’a pas progressé. L’hindouisme et l’islam dominent. Les persécutions anti-chrétiennes sont courantes. Le christianisme ne dépasse pas 3% de la population, sans augmentation notable.

2. La région du bouddhisme Theravada

Il existe cinq pays asiatiques dont la population est presque exclusivement du courant Theravada : le Sri Lanka, la Birmanie, la Thaïlande, le Laos et le Cambodge. Dans ces pays (sauf le Laos), la liberté religieuse est une réalité, mais la prégnance du bouddhisme depuis 1300 ans empêche une réelle évangélisation. Le bouddhisme est un système cohérent, très ancré dans la société, au point de se confondre avec l’identité personnelle et nationale. L’évangélisation, dans les faits, n’a pas lieu. Par exemple, les chrétiens ne représentent que 0,7% de la population en Thaïlande.

3. Le Japon

Le Japon présente, comme la Chine, une mosaïque de croyances perses, très anciennes et ancrées dans la culture. Là aussi, l’évangélisation n’a de ce fait jamais réussi à s’imposer, les chrétiens ne représente qu’un peu moins d’1% de la population.

Pour résumer, c’est la Nouvelle évangélisation qui est à l’ordre du jour dans les pays chrétiens de longue date. La mission ad gentes se poursuit en Afrique noire et dans de rares pays d’Asie. La Chine est la grande inconnue.

Pour le reste du monde, seuls des événements ou changements sur plusieurs siècles peuvent laisser penser qu’un jour, l’évangélisation « en nombre » y deviendra possible.

À nous de supplier Dieu, pour que la lumière de l’Évangile puisse un jour éclairer l’ensemble de ses enfants.

Voir aussi :
Moines et moniales, des évangélisateurs ?
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  1. nathalieD

    ma première réaction

    c’est une surprise de lire qu’en corée du nord , ils envoient des personnes en camps de concentration. Est-ce possible qu’il existe encore dans notre monde actuel de telles horreurs . est-ce que ces camps sont comme ceux de la seconde guerre mondiale ? je n’en reviens pas cela me parraît difficile à croire est-ce certain ?

     

     

    • Filippo-modérateur

      Beaucoup de médias donnent

      Beaucoup de médias donnent une estimation invérifiable de 200 000 prisonniers dans les camps de concentration nord-coréens.

      Ces camps sont souvent si grands qu’il faut plutôt parler de “villes pénitentiaires”, comme le Camp 18, qu’on voit sur la photo dans l’article de “La Croix”.

      Pour les « crimes » politiques, comme le fait d’être repéré comme croyant, le régime applique le système des trois générations : si vous êtes arrêté, vos grands-parents, vos parents, ainsi que tous leurs collatéraux sont arrêtés avec vous. Les peines sont habituellement la mort ou un emprisonnement en camp sans durée précise. Ainsi, le régime entretient une terreur très dissuasive sur les habitants.

      Une phrase explique très bien ton étonnement, nathalieD, à propos de la Corée du Nord : “Les Tibétains ont le dalaï-lama et Richard Gere ; les Birmans, Aung San Suu Kyi, le Darfour, Mia Farrow et George Clooney. Les Coréens n’ont personne.”, et la population serait de 25 millions d’habitants !!!

      Selon l’AED (lien rompu) :

      “Une jeune femme a été exécutée publiquement en Corée du Nord, selon un journaliste de la BBC, résidant en Asie. Accusée de distribuer la Bible, de « collaborer avec les dissidents », Ri Hyon-ok, 33 ans et mère de trois enfants a été jugée dans la ville de Ryongchon le 16 juin 2009, selon un Rapport de la Commission d’enquête sur les crimes contre l’humanité rendu public le 25 juillet.”

      Difficile de croire qu’un régime aussi effroyable existe encore après la fin du communisme en Europe en 1991, et pourtant, c’est bien le cas aujourd’hui en 2013.

       

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