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Benoît XVI prie la vierge Marie

À l’approche du Conclave, les spéculations les plus variées circulent sur celui qui sera le successeur de Benoît. L’absurde opposition entre candidats « modernistes » et « conservateurs » fait les choux gras des journalistes. Toutes sortes de critères sont inventés ou ressortis de la naphtaline.

Nous avons la chance de savoir que le successeur de Pierre est choisi par le Saint-Esprit, c’est-à-dire par Dieu. Dieu dit : « Autant les cieux sont élevés au-dessus de la terre, […] autant mes pensées sont au-dessus de vos pensées. » Isaïe 55, 9

Écartons l’objection courante : est-ce que Dieu a choisi les papes les plus scandaleux de l’Église ? Est-ce qu’il a choisi le célèbre Alexandre VI Borgia, père de Lucrèce et de César ? Eh bien, nous pouvons constater que même si Dieu n’a pas empêché cette élection, ce pape, comme les autres, n’a pas erré, il n’a pas remis en cause la foi de l’Église.

Maintenant, venons-en aux exemples plus récents. Nous allons voir comment la meilleure préparation est encore et toujours la prière, et non les bavardages stériles du style : jeune ou vieux ? membre de la Curie ou archevêque diocésain ? noir ou blanc ? médiatique ou discret ?

En 1958, aucun successeur évident de Pie XII n’apparaît au cours du Conclave, après dix tours de scrutin. Les cardinaux se tournent vers celui qui semble être un bon pape de transition : Mgr Roncalli, le ventripotent Patriarche de Venise, qui a 76 ans et prend le nom de Jean XXIII.

En le voyant pour la première fois, les Italiens présents sur la place saint Pierre font entendre un cri : « Un grosso ! » (Un gros !).

Tout le monde imagine un pontificat tranquille et court, en attendant qu’un cardinal se fasse remarquer et devienne le prochain pape.

Personne n’imagine que cet homme bon, gros et vieux va prendre l’initiative inouïe de convoquer un nouveau concile, 88 ans après le Concile Vatican I. Ce nouveau concile sera l’événement le plus important de l’histoire de l’Église au XXème siècle.

Voici un premier exemple de l’action du Saint-Esprit dans le cœur des cardinaux, qui n’avaient certainement pas, au moment de l’élection, l’idée que le nouveau pape aurait l’audace de convoquer un concile.

En 1978, les cardinaux pensent élire un pape qui soit un bon successeur de Paul VI, un pape souriant, affable, bien formé, et comme toujours, un pape italien. Ils choisissent celui qui prend le nom de Jean-Paul Ier, en hommage à ses deux prédécesseurs immédiats.

Sa mort 33 jours après son élection plonge les cardinaux dans la stupeur, et même pour certains dans la peur : « Et si l’Esprit-Saint nous demandait de sortir des sentiers balisés ? ».

Certains cardinaux sont prêts à élire un non italien. Mais où porter le choix ? Le cardinal König, influent prélat allemand, avait remarqué un cardinal polonais discret, qui avait fait une intervention de qualité au Concile Vatican II, un homme pieux et très apprécié dans son diocèse de Cracovie. Petit à petit, l’avis de Mgr Frings est écouté et l’idée suit son cours au fil des huit scrutins. On connaît la suite : à la stupéfaction générale, le monde découvre un pape polonais de 58 ans, tout de suite très à l’aise dans sa nouvelle mission, et qui va être un des plus grands papes de l’histoire de l’Église. Par son action, il va contribuer à un événement majeur du XXème siècle, la chute du communisme en Europe, libérant ainsi des millions de personnes d’un totalitarisme épouvantable.

Un journaliste non chrétien dira : « Mais comment est-ce que 100 types en robe ont pu élire un pape de cette trempe ? ».

En 2005 encore, beaucoup de personnes « bien informées » redoutent ouvertement un pape qui décevra, tellement il sera en-dessous de son prédecesseur. C’est l’un de ses plus proches collaborateurs qui est élu, une intelligence au service de la foi bien au-dessus de tous les penseurs et théologiens du moment. Au vu de son âge, on parle tout de suite, comme pour Jean XXIII, d’un « pape de transition », alors qu’il sera le pape qui va prendre en main avec un sérieux et une prudence exceptionnels le scandale des abus sexuels par de nombreux prêtres. Il va également tendre la main, au-delà de ce que beaucoup de dirigeants de l’Église lui conseillent, vers les disciples de Mgr Lefebvre.

Alors à ceux qui se livrent à des pronostics, je suis tenté de dire qu’ils perdent leur temps, et que ce temps serait beaucoup mieux employé à supplier le Saint-Esprit, lui qui ultimement choisit le pape, de nous donner celui dont nous avons besoin et dont le monde a besoin pour nous conduire vers Dieu, pour que Dieu puisse entrer en nous et nous remplir complètement.

Une attitude de complète ouverture au choix du Saint-Esprit n’est pas si évidente. Imaginons que le nouveau pape soit le primat de l’Église catholique syro-malankare Baselios Cleemis (né Isaac Thottunkal). Ce pape indien de 54 ans aurait des catégories mentales totalement étrangères à l’Occident. Il aurait une manière d’être et prendrait des décisions qui nous paraîtraient contraires à toute logique. Ceci est normal, parce que les logiques orientales n’ont rien à voir avec les logiques auxquelles nous sommes habituées, surtout celles de la raison raisonnante type Descartes.

Sommes-nous ouverts à un pape qui nous bousculerait ainsi ? Sommes-nous prêts à accueillir les surprises du Saint-Esprit, lui qui voit le cœur de chacun, et qui travaille déjà celui de notre futur pape ?

Si ce n’est pas le cas, demandons au Seigneur la conversion dont nous avons besoin pour que notre prière soit pleinement catholique, c’est-à-dire universelle.

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